La prochaine décision du Conseil de Bank Al-Maghrib est très attendue. Elle intervient dans un contexte international agité et une conjoncture nationale favorable. Ainsi, la Banque centrale pourrait acter une nouvelle baisse de son taux directeur lors de son Conseil du 24 juin 2025. Une orientation confortée par l'analyse de BMCE Capital Global Research et largement anticipée par les investisseurs institutionnels. Le deuxième Conseil trimestriel de Bank Al-Maghrib (BAM), prévu pour le mardi 24 juin 2025, suscite une attention particulière. Selon le Flash Strategy Preview publié le 16 juin par BMCE Capital Global Research (BKGR), cette réunion se déroule dans un climat international sous tension, où l'instabilité géopolitique et la politique monétaire offensive de l'administration Trump aux Etats-Unis compliquent la visibilité économique à l'échelle mondiale. Pourtant, malgré cette volatilité, les fondamentaux économiques marocains affichent une résilience notable, qui pourrait encourager la Banque centrale à poursuivre son cycle d'assouplissement monétaire entamé en mars dernier. À cette date, BAM avait abaissé son taux directeur de 25 points de base (pbs), amorçant un tournant après une longue phase de statu quo. Le Maroc bénéficie en effet d'un regain d'activité, notamment porté par le dynamisme du secteur non agricole et les investissements dans les infrastructures. D'après les comptes nationaux du Haut-Commissariat au Plan, la croissance a atteint +4,2 % au premier trimestre 2025, en hausse par rapport au +3,7 % du trimestre précédent et au +2,5 % observé un an plus tôt. BKGR a ainsi relevé sa prévision de croissance pour l'année en cours à +4,2 %, contre +3,9 % précédemment. Cette révision à la hausse intervient malgré une récolte céréalière revue à la baisse – 44 millions de quintaux contre 50 millions initialement prévus – confirmant la solidité de l'activité hors agriculture. Lors de son dernier Conseil en mars, BAM avait elle-même ajusté à la hausse sa prévision de croissance 2024 à +3,2 % (contre +2,6 %) et maintenu celle de 2025 à +3,9 %. Lire aussi : Bank Al-Maghrib souscrit à une nouvelle obligation durable du FIDA Une inflation sous contrôle mais vigilante Autre facteur favorable à une détente monétaire : la maîtrise de l'inflation. En avril 2025, l'indice des prix à la consommation affichait un repli de -0,3 % sur un mois et une hausse limitée à +0,7 % sur un an. L'inflation sous-jacente, qui exclut les produits volatils, s'établissait quant à elle à +1,2 % en glissement annuel. Ces niveaux, inférieurs aux attentes de BKGR, confortent l'hypothèse d'une désinflation durable. Toutefois, l'analyse souligne que cette trajectoire reste conditionnée à l'évolution de plusieurs facteurs exogènes : l'issue des tensions commerciales sino-américaines, le conflit russo-ukrainien, ou encore les répercussions potentielles de la guerre entre Israël et l'Iran, qui pourraient raviver les pressions inflationnistes via les canaux énergétiques et alimentaires. Le solde budgétaire s'est établi à -11,7 milliards de dirhams à fin avril 2025, contre -1,2 milliard un an auparavant, en raison d'une forte hausse des dépenses ordinaires (+28,5 %) et d'une progression des recettes (+19 %). Cependant, BAM table sur une réduction progressive du déficit budgétaire : -3,9 % du PIB en 2025, contre -4,1 % en 2024, puis -3,6 % en 2026. Ces projections, plus optimistes que celles émises en décembre dernier, traduisent une meilleure exécution des programmes budgétaires et une discipline fiscale renforcée, éléments également favorables à la poursuite d'un cycle monétaire accommodant. Marchés et investisseurs tablent sur une nouvelle baisse Le mouvement amorcé en mars dernier a déjà produit des effets : le taux débiteur moyen global est passé à 4,98 % au premier trimestre 2025, soit une baisse de 10 points de base par rapport à fin 2024. L'encours global des crédits bancaires a augmenté de 5,1 % en glissement annuel, atteignant 1 157 milliards de dirhams à fin avril. Sur le marché primaire, le Trésor a continué de marquer à la baisse les taux des adjudications obligataires, réduisant son coût d'emprunt. Cette détente généralisée des taux d'intérêt reflète une attente implicite des investisseurs : une nouvelle réduction du taux directeur dès la réunion du 24 juin. Selon le sondage réalisé par BKGR auprès d'investisseurs institutionnels marocains, 63 % anticipent une baisse de -25 pbs à l'issue du Conseil, et 75 % prévoient deux baisses d'ici la fin de l'année. Tous s'accordent à dire qu'un relèvement du taux directeur en 2025 est peu probable, y compris en cas de résurgence temporaire de l'inflation. Vers un ajustement de -25 pbs ? Une hypothèse crédible mais prudente Dans ses conclusions, BMCE Capital Global Research estime que, « compte tenu de la bonne orientation des indicateurs macroéconomiques et de l'assouplissement en cours au sein de la BCE, BAM pourrait opter pour une nouvelle baisse de son taux directeur de -25 points de base ». Toutefois, l'institution marocaine pourrait également adopter une posture plus attentiste, afin de mesurer l'impact de la première baisse opérée en mars et d'évaluer avec plus de recul les effets des tensions géopolitiques sur les prix mondiaux. En particulier, l'instabilité persistante au Moyen-Orient demeure un facteur de risque non négligeable dans le calcul des anticipations inflationnistes.