Le Syndicat des journalistes palestiniens dénonce une escalade sans précédent des attaques israéliennes contre la presse. Son rapport, publié début septembre, évoque quinze journalistes tués en août, dont trois femmes, et appelle la communauté internationale à agir pour mettre fin à ce qu'il décrit comme une stratégie de « destruction systématique de la vérité ». Le mois d'août 2025 s'est révélé particulièrement meurtrier pour la presse palestinienne. Selon un rapport du Comité des libertés du Syndicat des journalistes palestiniens, 15 journalistes, parmi eux trois femmes, ont été tués dans la bande de Gaza par des frappes israéliennes. Neuf autres reporters ont été blessés et plus de 80 violations contre la presse ont été documentées. L'agence officielle palestinienne WAFA, qui a relayé ces chiffres, souligne que ce bilan marque l'un des mois les plus sanglants depuis le début de l'offensive israélienne. Deux frappes en particulier ont marqué le mois d'août. Le 10, six journalistes ont trouvé la mort dans la cour de l'hôpital Al-Shifa, dont les correspondants d'Al Jazeera, Enes al-Sharif et Muhammed Kuraika. Quinze jours plus tard, le 25 août, une attaque contre l'hôpital Nasser de Khan Younès a tué cinq autres reporters. Au total, trois proches de journalistes figurent également parmi les victimes, tandis que quatre domiciles de membres de la profession ont été détruits. Lire aussi : Gaza : un plan américain prévoit le déplacement total de la population Si Gaza paie le tribut le plus lourd, la Cisjordanie occupée n'est pas épargnée. Le rapport du syndicat fait état de six attaques directes contre des journalistes, de trois cas d'agressions physiques et de 33 interdictions de couvrir des événements publics. Trois reporters y ont également été arrêtés par les forces israéliennes. Le syndicat dénonce en outre des campagnes de diffamation orchestrées par certains médias israéliens, qui auraient contribué à cibler les journalistes palestiniens sur le terrain. Ce bilan s'inscrit dans une tendance plus large déjà relevée par plusieurs organisations internationales. Reporters sans frontières (RSF) a récemment alerté sur la « vulnérabilité extrême » des journalistes à Gaza, estimant que « les professionnels de l'information y exercent dans des conditions parmi les plus dangereuses au monde ». L'ONU avait elle-même, dès 2024, appelé Israël à respecter ses obligations internationales en matière de protection des civils, en rappelant que les journalistes bénéficient d'un statut protégé par le droit humanitaire. Depuis le 7 octobre 2023, date du déclenchement du cycle actuel de violences, le Comité pour la protection des journalistes (CPJ) basé à New York a recensé plusieurs centaines de reporters tués ou blessés à Gaza, un chiffre inédit depuis la Seconde Guerre mondiale pour une zone de conflit d'une telle densité démographique. La dénonciation d'une stratégie « systématique » Pour Muhammed Lahham, président du Comité des libertés du syndicat, les attaques ne relèvent pas de simples « dommages collatéraux ». Elles traduisent, selon lui, « une politique systématique visant à annihiler la vérité et la cause palestinienne ». Dans sa déclaration, il appelle la communauté internationale à « agir d'urgence » afin de mettre en place des mécanismes de protection des journalistes et de traduire les responsables de ces crimes devant la justice internationale. Le syndicat exhorte notamment l'ONU, l'Union européenne et les grandes ONG de défense des droits humains à prendre position et à renforcer la documentation des violations. Jusqu'à présent, les appels à des enquêtes indépendantes, notamment de la part de la Cour pénale internationale (CPI), sont restés sans suite concrète, alimentant le sentiment d'impunité. L'attaque ciblée contre les journalistes en territoire palestinien soulève des inquiétudes plus larges sur l'avenir de la liberté de la presse dans les zones de conflit. Pour RSF, « laisser les journalistes devenir des cibles revient à priver les civils de leur droit fondamental à l'information ». Plusieurs ONG redoutent que le précédent de Gaza n'encourage d'autres Etats à utiliser la guerre comme levier pour étouffer la presse.