Au troisième jour du procès du chanteur marocain Saad Lamjarred, dans le cadre du procès pour viol après la plainte de Laura Prioul, la Cour d'assises de Paris a entendu l'experte en charge du suivi psychique auprès de la jeune femme, qu'elle a examinée depuis 2017. Selon elle, la plaignante n'aurait pas mesuré le risque que représentait la situation où elle dit avoir subi un viol avec violences. Le procès pour viol aggravé et violences volontaires du chanteur marocain Saad Lamjarred a entamé, ce mercredi 22 février, son troisième jour. A la Cour d'assises de Paris, l'audience d'aujourd'hui a été consacrée au témoignage de la spécialiste en charge de l'expertise psychiatrique de la plaignante Laura Prioul, qui accuse l'artiste. Ce dernier a également été entendu sur les faits qui lui sont reprochés. Présente à l'audience, la journaliste et correspondante de RFI, Marine de La Moissonnière, a repris les déclarations de l'experte, qui a reçu Laura en 2017, un an après les faits objet du procès. Elle décrit la jeune femme comme présentant «une apparence assez adolescente, immature, mais elle a en même temps un très bon contact, un très bon relationnel». A 21 ans à l'époque, «elle est encore en construction et présente une certaine fragilité». 3e jour du procès de la star marocaine S. #Lamjarred. Le chanteur sera entendu aujourd'hui sur les faits qui lui sont reprochés @RFI pic.twitter.com/u0JTHiO4hv — MdeLaMoissonniere (@MarineAmericas) February 22, 2023 La victime présumée «bloquée dans sa construction et son épanouissement» Concernant le viol dont Laura dit victime, l'experte décrit une personne «encore sidérée, bloquée dans sa construction et son épanouissement», souffrant de ce qui «correspond à un syndrome post-traumatique». Elle évoque une «mésestime de soi, un sentiment d'incapacité, un désintérêt pour tout ce qui l'intéressait avant, des pleurs subis, une hyperréactivité et une hypersensibilité, des troubles du sommeil, des cauchemars, un syndrome dépressif…». En outre, la plaignante a «le sentiment que rien ne pourra changer et que ça n'ira jamais mieux, l'impression de ne pas pouvoir sortir de cette situation de mal-être». Laura aurait par ailleurs confié les mêmes propos à l'experte qu'à la Cour, en affirmant ne pas avoir voulu «rester seule avec Saad Lamjarred». «Elle pensait que les deux personnes avec qui ils étaient à l'hôtel Intercontinental allaient les rejoindre au Marriott ; elle ne voulait pas avoir de rapport sexuel avec lui», a-t-elle déclaré. Sur ce point, l'experte décrit des «conduites à risque typiques des adolescents». Chez Laura, il y avait ainsi «quelque chose d'assez infantile dans son fonctionnement, comme un enfant qui peut vouloir quelque chose sans le vouloir, décider en le regrettant». Il s'agit d'un «fonctionnement adolescent avec la certitude que je gère, qu'il ne peut rien m'arriver». France : Des témoignages accablant Saad Lamjarred, accusé de viol aggravé L'avocat de la défense, Me Fedida, questionne alors l'experte sur le changement de psychiatre que Laura a décidé, depuis la date des faits. La spécialiste répond que la plaignante avait «besoin de se débrouiller seule», dans la suite du mécanisme de fonctionnement de l'adolescent. «Il faut aussi ne pas être trop sidéré et dissocié pour pouvoir parler de ce qui s'est passé. Il faut aussi une volonté du patient», ajoute l'avocat, tout en demandant à l'experte si la victime présumé avait «pris des risques ce soir-là», notamment en suivant un homme «qui lui témoignait de l'affection». Selon l'experte «c'est une conduite à risques, un comportement d'exploration». «Nous adultes, on voit arriver le danger à grand pas», a-t-elle souligné. Une autre victime présumée convoquée par les juges Lors de la même audience, une autre femme, d'origine franco-marocaine et qui a accusé Saad Lamjarred de l'avoir violée dans des circonstances similaires à Laura, a été appelée à la barre. Sous la pression de sa famille, elle a retiré sa plainte et n'a pas été présente à la séance de ce mercredi. Le tribunal a ainsi ordonné sa comparution. Par ailleurs, des extraits vidéo ont été montrés, datant de 2016 à l'intérieur de la boîte de nuit dans laquelle l'artiste a rencontré Laura, dans une ambiance festive. La veille, la Cour a entendu un membre du personnel de l'hôtel où les faits se sont déroulés. L'employé, témoin d'une scène en octobre 2016, a dit avoir vu la victime présumée «se mettre à courir quand elle a vu Saad Lamjarred sortir de la chambre». «Il était en caleçon. Il la cherchait. Je lui ai bloqué le passage et elle s'est réfugiée dans une autre chambre. Il s'est mis à genoux devant moi et m'a demandé de ne pas appeler la police. Il était paniqué», a-t-il déclaré. Pour sa part, Saad Lamjarred a nié toutes les accusations. «ma version est complètement différente de celle de Laura», a-t-il insisté. «Si quelque chose l'a affolée et lui a fait peur, ce n'était pas du tout mon intention», a ajouté l'artiste. Laura Prioul a déclaré que cette affaire avait eu plusieurs conséquences sur sa vie, notamment des «crises d'angoisse dans les lieux publics». «J'ai changé de vie. Je ne suis plus moi-même», a-t-elle dit, indiquant avoir changé de ville et de travail, tout ayant mal vécu les «articles mensongers publiés dans la presse», ainsi que «les menaces et les insultes».