Alors que la vie culturelle meknassie s'est basculée, cela fait plusieurs mois, dans le pseudo-culturel, marqué particulièrement par des hommages de surabondance de courtoisie et d'empressement, assortis de dédicaces à considération plutôt marchande, sous le feu des projecteurs sublimant l'événement, voilà que l'association «3ibq Al-Kaharif» (Arôme automnale) a décidé de dépoussiérer la culture locale à travers son 2e festival interculturel sur le soufisme et la poésie mystique de Sidi Kaddour El Alami. Organisé les 16, 17 et 18 octobre à Meknès, ville qui ne se mentionne guère sans que son nom soit associé à son fils Sidi Kaddour El Alami, à la fois maître spirituel, poète mystique et cheikh du tarab Al-malhoûn, ce festival international, auquel prendront part des personnalités nationales de premier plan dans les domaines de la pensée et de la poésie, et d'autres venues des quatre horizons, ambitionne d'embarquer le public meknassi au cœur de ce courant de pensée fondé sur la bienveillance humaine, et de l'immerger dans des œuvres poétiques d'une intense spiritualité, inspirées par la transcendance, la contemplation et la quête du sens de la vie. Des magiciennes et magiciens marocains de la parole poétique, classés au premier rang des poètes et poétesses de leur génération, à l'image de Nabila Hamani, Shama Ammi, Latifa Meskini, Mohammed Benaissa, Chafiq Idrissi et d'autres grandes figures de la poésie marocaine, donneront ainsi, aux côtés de leurs confrères et consœurs venus des Etats-Unis, de France, du Danemark, du Canada et de plusieurs pays arabes, lecture en français et en arabe de leurs poèmes marqués, pour la plupart, par une réflexion existentielle fondée sur un sentiment humaniste imprégné d'une forte charge spirituelle. Ces poétesses et poètes, dont la carrière consolidée est largement reconnue au Maroc et dans les pays arabes et francophones, offriront deux soirées de langage poétique, d'images et de métaphores pour exprimer l'ineffable par des paroles rythmiques, et humaniser, à leur manière, ce qui se perd ou s'oublie de notre identité humaniste. Ils chercheront à toucher le cœur d'une existence tout en plongeant dans les mystères de celle-ci, plaçant l'Homme, dans sa pureté, son humilité et sa simplicité, au centre de leurs œuvres poétiques. La réflexion intellectuelle ne sera pas en reste. Conçu et mis en scène par la présidente de l'association «3ibq Al-Kaharif» (Arôme automnal), Latifa Algharras, en coordination avec le président d'honneur, l'emblématique écrivain et dramaturge, Dr Abderrahmane Benzidane, le festival consacre un large espace à un séminaire international portant sur la vie spirituelle et poétique du poète marabout Sidi Kaddour Al-Alami. En dépit des récits confus entourant l'histoire de sa naissance, une certitude rassemble tous les historiens : notre marabout a été élevé, petit garçon de moins de trois ans, en plein cœur historique de l'ancienne médina (quartier Tizimi), où l'histoire et la culture prennent vie à chaque pas. Les intervenants s'attarderont sur la variété de ses œuvres, reconnues pour leur puissance évocatrice, leur beauté stylistique et leur influence dans la vie culturelle marocaine. Le public y redécouvre des poèmes rédigés en darija fiable, recherchée et bien structurée, devenus pour beaucoup une source intarissable de pureté et de sagesse. Les conférenciers mettront en lumière la manière dont le soufisme s'est élaboré et transformé au fil des temps politiques, des mutations sociales et des changements structurels. Pour la présidente de «3ibq Al-Kharif», la poétesse Latifa Algharras, surnommée «la dompteuse des mots» pour la puissance de son langage poétique et son style d'une sensibilité exceptionnelle, l'édition actuelle diffère de la précédente, consacrée à «la musique et la ville», en ce qu'elle s'articule cette année autour d'une triple identité : foi, poésie et culture locale. «L'objectif, nous dit-elle, est de valoriser le patrimoine meknassi et de permettre au public de s'immerger dans sa culture locale, source de fierté nationale». Plus qu'un rendez-vous d'échanges, cette édition se veut un espace de réflexion sur le poète et maître soufi, Sidi Kaddour Al-Alami, dont l'esprit habite toujours les quartiers, mosquées et ruelles de l'ancienne médina de Meknès, et dont l'empreinte restera gravée dans la mémoire des Marocains, comme symbole de sagesse et de créativité. L'édition projette enfin d'embarquer le public dans un voyage poétique réglé sur le fil du temps, et de lui faire vivre la poésie «arabo-française», comme un point de rencontre entre deux cultures. Cette diversité linguistique, qui entre en résonance avec les poètes invités au festival, est un vivier d'inspirations sans limite pour ces artistes du mot, qui s'efforcent de faire de la poésie tantôt un rêve qui nous réjouit, tantôt un espoir qui nous épanouit.