A 67 ans, Raouya, de son vrai nom Fatima Harandi, est au sommet de sa carrière! Une carrière pourtant entamée sur le tard. Car si elle a commencé sur les planches dès son plus jeune âge, ce n'est qu'en 2004 qu'elle se voit attribuée son premier rôle dans le cinéma avec Narjiss Nejjar, dans les Yeux Secs. Un rôle qui l'a immédiatement consacrée. Son allure mystérieuse, sa crinière grise et sa voix rauque, semblent imposer ses rôles aux auteurs et aux réalisateurs. Une clé pour son succès, mais peut être aussi un inconvénient. Car elle dit avoir « envie de jouer autre chose« . Dans la vraie vie, Raouya n'est pas si différente du personnage qu'on connaît sur écran, une femme charismatique et imposante. Dès le début, elle nous met en garde contre les « mêmes questions ». Car à force de lui poser toujours les mêmes questions elle finit par reprocher aux journalistes de ne pas « se lire entre eux ». Nous avons essayé de sortir des sentiers battus, en allant plus dans son intimité, particulièrement ses souvenirs d'enfance. Elle en a parlé avec des yeux pétillants. Raouya dans le rôle de la tante dans le film A Mile In My Shoes de Said Khallaf (2016). Barlamane: Puisque vous n'aimez pas les questions répétitives, commençons par le commencement. C'est à dire votre enfance et votre jeunesse? Raouya: (calmement) Je n'ai jamais été enfant. Mon enfance, passée entre Rabat et Casa, a été tourmentée par les conflits de mes parents. On me laissait souvent chez des proches ou des inconnus pour que ma mère puisse travailler. Je me souviens de ma peur d'un vieil homme qu'on me disait être Dieu qui punira toutes mes bêtises. Je n'ai commencé à fréquenter l'école avec assiduité qu'à l'âge de 9 ans à cause de l'instabilité familiale. Je me souviens bien de ces années ou je vivais avec mes belles mères dont certaines me traitaient sévèrement. Ces femmes, inconnues pour moi, s'amusaient à me faire croire que ma mère est un monstre qui veut m'enlever. J'ai pris l'habitude des enlèvements que je subissais par mes parents, ma mère m'enlevait à mon père et lui, à son tour m'enlevait à elle. Les principales figures féminines de mon enfance étaient ma mère, ses sœurs, et mes belles mères. Et elles m'ont toutes influencée. J'étais une enfant assez solitaire. A l'âge de 7 ans, mes parents se sont remis ensemble. Ma meilleure amie était « Louiza », ma chienne, on partageait nos repas, les sorties et les parties de chasses à une époque. J'ai du m'en séparer à l'âge de 11 ans car mon père ne travaillait plus et on ne pouvait plus la garder.
Raouya dans le rôle de « Mammass » dans le film de Mohammed Achaour « Lhajjates » (2017) Une citation qui vous définirait bien ? Je me définirai bien dans la citation d'Omar Al Khayyam qui dit « la distance qui sépare le doute de la certitude n'est que d'un souffle. Et celle qui sépare l'incrédulité de la foi n'est que d'un souffle, passons donc gaiement cet espace de souffle car notre vie n'est séparée de la mort que par l'espace d'un souffle ». Car, comme le dit le poète, je défie les obstacles et j'essaye de passer ma vie gaiement dans l'art et la poésie.