Chambre des conseillers : Les projets de loi relatifs au système électoral approuvés à l'unanimité    Maroc : L'Institut supérieur des sciences de la sécurité inauguré à Ifrane    Ifrane: Inauguration de l'Institut supérieur des sciences de la sécurité    Législatives : Laftit réaffirme la volonté de consolider les valeurs d'une pratique électorale saine    Bourse de Casablanca: les banques contribuent de 32% à la croissance des revenus globaux    Dakhla-Oued Eddahab : trois conventions pour développer les infrastructures logistiques et commerciales    Nadia Fettah souligne la dimension stratégique du partenariat économique maroco-espagnol    Infrastructure gazière nationale : Publication de l'Avis de préqualification    Ouverture de la 28e édition du Salon international d'hiver des produits agricoles tropicaux de Chine à Hainan    La Chine, nouvel épicentre incontesté du marché mondial des véhicules à énergies nouvelles    SM le Roi félicite le Président finlandais à l'occasion de la fête nationale de son pays    L'ambassadrice de Chine au Maroc adresse une lettre aux amis marocains : les faits et la vérité sur la question de Taiwan    Walid Regragui : Les Lions de l'Atlas vont «tout donner pour rendre fiers leurs supporters» au Mondial 2026    Pourquoi le Maroc est-il considéré comme un adversaire redoutable pour l'équipe d'Ecosse ?    Mondial 2026, Hakimi, CAN 2025 : Walid Regragui fait le point et fixe le cap    AMO : Couverture d'environ 88% de la population    Cinq étudiants de Sorbonne-Euromed Maroc admis au barreau de Paris    Zineb Mekouar wins Henri de Régnier Prize for Remember the Bees    Morocco launches charter to boost financing for very small enterprises    Marrakech International Film Festival 2025 honors Guillermo Del Toro with Golden Star Award    Patrimoine immatériel : Le sort du caftan marocain bientôt scellé à l'UNESCO    Diaspo #418 : A Madagascar, Ikram Ameur trouve sa voie dans l'écriture avec la maternité    Programme du jour : journée marathon pour les Lions de l'Atlas    Permis, casques, contrôles : Kayouh dévoile son plan pour réduire les accidents de motos    Coupe Arabe 2025 : Ce samedi, bataille animée dès midi dans les groupes C et D    Netflix va racheter Warner Bros Discovery pour près de 83 milliards de dollars    Maroc : Une charte pour le financement et l'accompagnement des TPE    FAO: Baisse des prix mondiaux des produits alimentaires en novembre    Afrique du Nord et Proche-Orient : une plongée inquiétante dans la fournaise    Prévisions météorologiques pour samedi 06 décembre 2025    Les frais de l'Université Paris 1 augmentent pour des étudiants hors-UE, dont le Maroc    Echecs : À 3 ans, un Indien devient le plus jeune joueur classé    Coupe Arabe 2025 : Le succès saoudien redistribue les cartes dans le groupe B    Basket – DEX (H) / J8 : FUS-CODM et ASS-FAR en ouverture cet après-midi    Académie française : Zineb Mekouar reçoit le prix Henri de Régnier de soutien à la création littéraire    Réunion de haut-niveau Maroc–Espagne : quatorze accords pour structurer une coopération d'impact    Guillermo del Toro : « J'aimerais être un monstre »    Vente aux enchères : Soufiane Idrissi propulse l'art marocain dans une nouvelle ère chez Christie's Paris    Revue de presse de ce vendredi 5 décembre 2025    GenZ Maroc : Un total de 55 années de prison pour les participants aux émeutes d'Aït Ourir    UNESCO : Casablanca et Oujda rejoignent le Réseau mondial des villes apprenantes    Quand le public s'essouffle, l'éducation se pantoufle    Secousse tellurique de magnitude 4,9 ressentie dans le sud de l'Espagne    L'Humeur : Manal, madame l'ambassadrice    Le Maroc réélu au Conseil d'administration du Programme alimentaire mondial    Le Maroc souligne « un moment inédit » dans ses relations avec l'Espagne    Autodétermination, autonomie et nouveau cap diplomatique : ce que révèle la parole de Nasser Bourita    «Mira» de Lakhmari : La rupture qui n'en est pas une ?    







Merci d'avoir signalé!
Cette image sera automatiquement bloquée après qu'elle soit signalée par plusieurs personnes.



« Mon histoire avec les médicaments », une autobiographie de feu Omar Tazi [Chapitre 1]
Publié dans Challenge le 05 - 05 - 2021

Son enfance, sa bataille contre le trust des multinationales qui dominaient le marché des médicaments à l'époque, son militantisme pour l'industrie pharmaceutique marocaine, plus épanouie, innovante et compétitive, son engagement pour un entrepreneuriat citoyen et responsable...« Mon histoire avec les médicaments », l'autobiographie de feu Omar Tazi publiée à titre posthume, véhicule des leçons aussi bien dans le champ managérial que sur le registre des valeurs morales et citoyennes ou encore pour les perles sur l'histoire économique et sociale du Royaume, que vous propose CHALLENGE pendant ce mois de ramadan, à travers 19 chapitres. Capitaine d'industrie, feu Omar Tazi qui nous a quittés le 20 mars 2020, faisait partie de cette génération de grands industriels qui ont contribué à façonner l'industrie marocaine.
Le petit fumiste cravaté
Je m'appelle Omar Tazi. Né à Fès le 12 septembre 1945, je suis le troisième fils d'une fratrie qui compte deux filles et trois garçons. Certains pensaient que mes parents avaient choisi mon prénom en hommage à Omar Ibn El Khattab, le deuxième calife bien guidé de l'Islam. Ce n'est pas le cas. Ma famille n'était pas si conservatrice bien que son respect des préceptes de l'Islam et des traditions marocaines était toujours profond. C'est ma mère qui choisit mon prénom en référence à Haj Omar Tazi, le puissant vizir du Sultan Moulay Hafid. Elle voulait que je devienne aussi important que lui. Comme toutes les familles de la première moitié du vingtième siècle, la mienne rêvait d'un avenir radieux pour ses enfants. Ma mère me ressassait toujours une phrase qui s'ancra dans mon esprit comme une croyance libératrice. « Tu sais mon enfant, me dit-elle en rapprochant son visage du mien, depuis ta naissance, tu as toujours été Merzaq [1] ! » Le fait de croire que j'attirais l'abondance fut pour beaucoup dans ma réussite. Cette conviction nourrit ma volonté. Quand mes projets rencontraient les pires obstacles, je persistais dans ma quête aux solutions en me disant que mon rendez-vous avec le succès est immanquable. Cette devise ne m'avait jamais trahi. Malgré mes liens naturellement proches à ma mère, j'étais plus proche de ma grand-mère, la personne que je chérissais le plus au monde. On dit que la grand-mère est doublement mère, surtout si son enfant est une mère. La mienne l'a vraiment été pour moi. Un lien indéfectible nous unissait. Femme silencieuse et souriante, ma grand-mère eut de son mariage avec mon grand-père, Mohamed Tazi, le célèbre Pacha de Fès, une fille unique, à savoir ma mère. C'est peut-être pour cette raison qu'elle devint ce précieux repère affectif au cœur d'une famille nombreuse où ma mère ne pouvait pas à elle seule assumer la responsabilité de nous élever. Je me souviens encore de l'image de ma grand-mère, en hiver froid et bien arrosé, lavant les couches en tissu de mon frère encore bébé et les séchant grâce à la fumée chaude émanant des brûleurs d'encens qui ornaient le salon. Avec une méthodologie de virtuose, ses gestes étaient pleins de douceur, de délicatesse et d'infinie tendresse. Elle pouvait confier cette tâche à une de ses domestiques, mais elle la faisait elle-même en témoignage de son amour pour son petit-fils. Ma relation avec elle était quasi maternelle, amicale, empreinte de complicité et de sérénité. Bref, ma grand-mère était mon rempart contre toutes sortes de problèmes que je rencontrais.
Lire aussi | Youssef Amrani, Ambassadeur du Maroc en Afrique du Sud : « La formation est la passerelle prioritaire et la voie privilégiée d'une diplomatie qui souhaite gagner en compétence et en efficience »
Mon enfance était paisible. Ma scolarité n'était pas brillante. Le plus important est que je réussissais. A l'époque du protectorat, entrer à l'école était un luxe. Mes parents étaient peu impliqués dans les études de leurs enfants. Nous étions libres de faire ou de ne pas faire nos devoirs. Chacun de nous avait le choix et surtout la responsabilité de réussir. Il faut dire que nous avions profité du système éducatif du protectorat. On avait toujours dit qu'on pouvait classer les colonisateurs en mauvais et moins mauvais. La colonisation française fut la moins mauvaise grâce notamment à son système éducatif dont elle fit profiter les enfants marocains, majoritairement analphabètes à cette époque. Mon jugement sur ce système ne changea pas malgré un incident dont j'ai été victime à l'âge de huit ans et qui marqua ma vie à tout jamais. Ce fut la première fois où je vécus du racisme. Un de nos instituteurs français se moquait toujours de moi et de mes camarades en raison de nos tenues vestimentaires. Pour lui, les enfants des « indigènes » devaient se présenter à l'école les crânes rasés, les pieds nus et surtout portant des djellabas déchirées. Celui parmi nous qui osait venir en classe dans de jolis accoutrements européens représentait à ses yeux une insulte à la civilisation française. Chacun de nous avait droit à un surnom savamment concocté par ce maigre instituteur, aux cheveux roux frisés qui ressemblait étrangement au professeur de la série Tom Sawyer. Pour moi, il me fit nommer le petit fumiste cravaté car je portais toujours une cravate. Ma grand-mère insistait pour que j'aille à l'école bien tiré. Je ne comprenais pas pourquoi il était si cruel envers moi à chaque fois qu'il me voyait. Le matin, à l'entrée de classe, devant tout le monde, il exprimait son mépris en m'appelant le petit fumiste cravaté, puis il enchaînait avec un rire nerveux qui cachait peu sa sévérité. En même temps qu'il prenait plaisir à me voir agacé, il orientait son regard menaçant envers mes camarades les invitant à le rejoindre dans sa plaisanterie de mauvais goût. Cet instituteur français ne faisait pas que se moquer de nous. Il sévissait souvent contre de faibles mômes marocains pour des raisons futiles. Personne n'osait le dénoncer. Ma seule consolation était l'expression de rage que je lisais dans ses yeux en me voyant, le lendemain même du supplice psychologique qu'il m'infligea, le défier en portant à nouveau une cravate.
Lire aussi | Hôtellerie : l'Israélien Fattal lorgne le Maroc
Un jour, je rentrais de l'école, le moral en berne, impuissant face à cet énergumène qui portait injustement le titre d'instituteur. J'en avais ma claque de son comportement mais je ne pouvais rien faire pour l'arrêter. Je décidais alors de ne plus me rendre à l'école. Ma grand-mère remarqua mon humeur morose. Elle voulait savoir ce qui n'allait pas. Face à son insistance, je lui avais tout raconté. Je n'oublierai jamais sa réaction. Elle se précipita, le visage ferme, au grand salon où se tenait une réunion importante présidée par mon grand-père. Elle le fit sortir au milieu de ses invités et lui raconta l'incident. Mon grand-père se dirigea vers une pièce adjacente où un vieux téléphone était branché. Il appela son frère, El Abbès Tazi, Pacha de Rabat, et lui raconta l'affaire. Ce dernier appela à son tour le résident général français et se plaignit du racisme de mon instituteur. A cette époque, la France insistait pour se montrer en faveur de la tolérance religieuse et communautaire dans ses colonies. Un incident de cette nature, de surcroît dans une école censée refléter les valeurs de la République française, ferait passer les colons pour des propagandistes. C'est pourquoi la réaction du résident général était immédiate. L'instituteur qui s'était longtemps moqué de moi fut renvoyé en France le lendemain même de la plainte de mon grand-oncle. Toute l'école était soulagée du fait qu'on venait de la débarrasser de son raciste. Néanmoins, personne ne sut que c'est ma grand-mère qui déclencha cette petite révolte.
[1]Un mot en dialecte marocain qui se dit de quelqu'un qui attire la richesse.
Tribune et Débats
La tribune qui vous parle d'une actu, d'un sujet qui fait débat, les traite et les analyse. Economistes et autres experts, patrons d'entreprises, décideurs, acteurs de la société civile, s'y prononcent et contribuent à sa grande richesse. Vous avez votre opinion, convergente ou différente. Exprimez-la et mesurez-vous ainsi à nos tribuns et débatteurs.
Envoyez vos analyses à : [email protected], en précisant votre nom, votre prénom et votre métier.


Cliquez ici pour lire l'article depuis sa source.