Le Club des Avocats du Maroc est entré en ligne dans l'affaire des agriculteurs de Figuig, qui se retrouvent aujourd'hui contraints de quitter leurs terres de palmiers-dattiers, qu'ils exploitent depuis plus de 50 ans. Les exploitants de terres agricoles situées dans la zone dite « Al-Arja » se sont retirés et s'en sont remis aux autorités de la province de Figuig pour examiner les développements de la situation des terres agricoles situées dans la partie nord de l'Oued Al-Arja à la frontière maroco-algérienne et ce, suite à la décision « provisoire et circonstancielle » des autorités algériennes d'interdire l'accès à cette zone, à partir du jeudi 18 mars. Il convient de rappeler que le 6 juillet 1961, une convention signée en vertu d'un accord entre le Roi Hassan II et Farhat Abbès, président du Gouvernement provisoire de la République algérienne (GRPA), reconnaissait le problème posé par la délimitation arbitraire des frontières imposé par la France, avait institué une commission algéro-marocaine pour l'étudier, en vue d'une solution au lendemain de l'indépendance de l'Algérie. À nos jours, la délimitation n'est toujours pas définie malgré le traité de 1972, relatif au tracé de la frontière d'Etat établi entre le Maroc et l'Algérie (FAR et ANP). Mises devant le fait accompli, les familles d'exploitants agricoles marocains, les historiens et professeurs universitaires de Figuig installés à l'étranger, ont saisi le club des avocats du Maroc pour s'emparer juridiquement du dossier. « On a reçu un certains nombre de documents d'ex-propriétaires, d'historiens, de professeurs universitaires originaires de la région qu'on est actuellement en train d'étudier. Il nous ont envoyé les conventions signées entre le Maroc et l'Algérie et les cartes et les tracés géographiques pour déterminer déjà si ces terres appartiennent effectivement aux Algériens ou non », nous apprend Me Mourad Elajouti, avocat au barreau de Casablanca et président du club des avocats du Maroc. « Pour le moment, il s'agit uniquement d'allégations. On n'est pas sûr à 100%« , précise le juriste. A noter que le 16 mars courant, la province de Figuig a publié un communiqué, à l'issue d'une réunion tenue par le gouverneur avec des exploitants de terres agricoles situées dans la zone dite Al-Arja, où elle reconnait l'existence d'un problème et affirme que les mesures prises par les autorités algériennes sont « temporaires et conjoncturelles« . « Les autorités locales sont en train d'étudier le dossier et d'élaborer des formules susceptibles de résoudre les problèmes nés de cette situation, en envisageant toutes les options« , a encore indiqué la province. En réaction à une question sur la réaction des autorités marocaines qui confirment l'existence d'un problème, Me. Elajouti estime que « ce ne sont pas des avocats« . « Les autorités ont reconnu qu'il y a un problème temporaire. Mais elles n'ont jamais confirmé que ces terres appartenaient à l'Algérie. En tout cas, moi en tant qu'avocat, je dois m'assurer que ces terrains appartiennent vraiment aux Algériens. Si après recherche il s'avère que c'est le cas, il y restera un second problème: Ces terres ont été exploitées par les agriculteurs marocains durant près de 50 ans », relève l'avocat. Là, il s'agit d'une « usucapion » ou « prescription acquisitive » qui désigne la manière dont la propriété peut s'acquérir par une possession paisible et publique prolongée dans la durée, explique Me Elajouti, qui poursuit qu'il y a, en plus, l'article 827 du code civil Algérien qui est clair sur cette question : » Celui qui exerce la possession sur une chose, mobilière ou immobilière, ou sur un droit réel mobilier ou immobilier sans qu'il en soit propriétaire ou le titulaire, en devient propriétaire si sa possession continue sans interruption pendant quinze ans ». S'il s'avère que les terres relèvent du territoire algérien, est-ce que l'Etat marocain doit dédommager ces agriculteurs ? « S'il appartiennent à l'Algérie, pourquoi le Maroc doit les dédommager? C'est à l'Algérie de le faire », soutient l'avocat. « Ces agriculteurs marocains sont sur ces terres depuis 50 ans. Si l'on se réfère au code civil algérien, ils en ont déjà eu possession, parce qu'ils y vivent depuis plus de quinze ans« , conclut Me. Elajouti.