Cette question du foulard peut être réglée d'élégante manière. Il suffit que ces tissus portent la griffe d'un couturier de renom. Le seul risque est que toutes les Françaises se feront enfoularder. On aimerait rester lové dans la réalité douillette de notre pays, loin des turbulences des ailleurs. C'est malheureusement impossible, car des éclaboussures nous parviennent du reste du monde, où tout n'est ni gai ni rose. Des guerres se prolongent, d'autres se préparent. Des luttes s'intensifient. Tout contribue à rendre notre confort aléatoire. Quand, par exemple, on embrasse du regard l'ensemble occidental et qu'on remarque qu'il encourage fortement les pays du tiers-monde -surtout musulmans- à opter pour la laïcité, -ce qui est en soi une excellente chose- et qu'on observe plus attentivement, on est frappé par sa conception pour le moins bizarre de la laïcité. L'Italie est un des pays qui a payé très cher en vies humaines sa laïcité, et après de nombreuses guerres à travers les siècles, ce n'est qu'en 1984 qu'un concordat a établi la séparation entre l'Eglise et l'Etat italien. L'histoire n'avait pas compté avec l'arrivée de Sylvio Berlusconi, “l'occidental chrétien supérieur”. En effet, le président du Conseil italien qui a la justice de son pays aux basques, s'en est défait en faisant voter des lois sur mesure, et, poussant son avantage, a réussi un coup double de maître. Il a obtenu de faire inviter le Pape à la Chambre des députés. C'est évidemment un événement considérable, que seuls quelques députés ont refusé de fêter. Le Pape a bien entendu profité de l'aubaine pour recommander dans son discours aux députés d'agir sans oublier “l'aspect chrétien”. De l'autre côté de l'Adriatique, à quelques encablures, il y a des pays européens et musulmans. Ce sont des farfelus qui prétendent qu'il y a actuellement une bataille contre l'Islam, dont le guide mondial est l'intégriste Walker Bush. L'Italie et l'Espagne en sont les éléments les plus dociles. Madrid, qui est depuis longtemps sous la férule de l'Opus Dei, continue le combat d'Isabelle la catholique tout en ouvrant les bras aux pétrodollars. Les pogroms dont ont été victimes les Marocains en Andalousie il n'y a pas si longtemps sont encore dans les esprits. Encore que dans ces deux pays on prend des gants et on use du double langage. Il y a un chef d'Etat qui leur dame le pion et qui n'y va pas par quatre chemins, c'est Vladimir Poutine, président de la CEI (ex-URSS). L'ancien colonel du KGB a refusé de prondre part à Copenhague à une réunion européenne qui avait inscrit à son ordre du jour le problème tchétchène. Il n'a accepté de se rendre qu'à Bruxelles où il a été quand même question de la Tchétchénie et des droits de l'homme, sinon de crimes de guerre. A un journaliste français qui lui a posé une question sur le sujet, Poutine s'est souvenu de son grade de colonel, a empoigné le micro et s'est lancé dans une diatribe violente et ordurière contre l'infortuné journaliste, contre les Musulmans et l'Islam, au point que le traducteur en a perdu la voix. Le journal de ARTE qui a donné l'information a remis en place la traduction intervenue un peu plus tard. La décence interdit de retranscrire ces injures ordurières. Il faut simplement rappeler qu'il y a quelques mois Poutine avait proposé à Walker Bush de lui fournir du “pétrole chrétien”, en remplacement du “pétrole arabo-musulman”. Mais l'Américain considère que ce produit-là est la propriété légitime des USA, fut-ce au prix d'une guerre à venir. Ce sont des farfelus qui prétendent qu'il y a actuellement une bataille contre l'Islam. On ne peut pas ne pas citer la France, ancienne puissance protectrice, et qui a encore des colonies éparpillées dans les océans. La France tolérante et pas raciste pour un centime. Elle l'était, par la force des choses, quand elle avait une riche collection de colonies. Aujourd'hui, non. Ces jours-ci, ce pays est en état de siège ou tout comme, sillonné par des gendarmes, des soldats, des policiers en uniforme ou en bourgeois, des délateurs et des chiens policiers. Le pays de Georges Brassens est occupé. Par son ministre de l'intérieur – souvenirs, souvenirs !- qui a parfois des allures d'épurateur, avec sa façon de faire la chasse aux immigrés, en particulier. L'amalgame entre terrorisme et Islam ayant réussi, les Français flairent tout basané qui passe. Il y a cependant un côté presque frivole. Dame, c'est la France. Malheur au halal et au foulard féminin. Un épicier a décidé de ne plus mettre en vente de la charcuterie et des boissons alcoolisées. Les autorités françaises le somment de remettre ces produits sur les étagères. Des jeunes filles sont renvoyées des écoles pour port de foulard. Cette question de foulard peut être réglée d'élégante manière. Il suffit que ces tissus portent la griffe d'un couturier de renom. Le seul risque est que toutes les Françaises se feront enfoularder. Les pays secoués de tant de soubresauts devraient prendre exemple sur le Maroc. Pardon et tolérance. Amour et convivialité. Tout s'achève en arabesques.