IA et culture au Maroc : vers une stratégie Sud–Sud, ancrée et partagée    Botola DII / Programme de la saison 2025-2026 : Ittihad Bejaâd vs MAT en ouverture !    MAGAZINE - Souheil Ben Barka : fluide planséquence    Botola D1 / Le programme de la saison 25-26 dévoilé : un derby à Rabat en ouverture    Mauritanie : Les militaires algériens emboitent le pas aux délégations des FAR    Afrique : 6 M$ pour une plateforme des agendas de développement par l'UM6P, l'UNESCO et la Fondation OCP    CAN 2024 féminine : Le Maroc affronte le Ghana qui a battu l'Algérie aux tirs au but    Morocco to face Ghana in WAFCON semi-finals    Mondial 2030 : David Hallyday saisit la FIFA sur la traque des chiens errants au Maroc    CAN 2024 femenina: Marruecos se enfrenta a Ghana, que venció a Argelia en los penales    South Africa : Will Zuma's party succeed in ousting the Polisario's main ally ?    Diaspo #398 : De la Belgique au Maroc, Sarra El Massaoudi célèbre Nos Héritages migratoires    Le temps qu'il fera ce dimanche 20 juillet 2025    Une mère accuse le vol d'organes de son fils décédé : le parquet de Casablanca dément et rétablit les faits    CAN de rugby à XV (Ouganda-2025) : le Maroc termine à la 6è place    Enseignement et biens habous : Toufiq clarifie les nouvelles orientations    Cinéma : Voici les projets admis à l'avance sur recettes au titre de la 2e session de 2025    À Avignon, la famille de Christophe Gleizes, le journaliste incarcéré en Algérie, dénonce une «fantasmagorie politico-judiciaire»    Le Maroc debout    Euro (f) Suisse 25 : Cruelle désillusion pour les Bleues, l'Allemagne en demi-finale        L'ancien président coréen Yoon Suk Yeol inculpé pour abus de pouvoir    La présidence syrienne annonce un cessez-le-feu immédiat à Soueïda    Défis climatiques et souveraineté : histoire d'eaux troubles    Interview avec Paul Mamere : « Mon parcours n'est pas une exception »    Le détenu décédé à Nador souffrait d'une maladie incurable et bénéficiait des soins de santé nécessaires    Ouezzane/Génération Green: Lancement de plusieurs projets de développement agricole et rural    Le Gabon adopte une nouvelle stratégie de développement du secteur de la pêche maritime    Le Parlement panafricain demeure un organe sans autorité, vingt ans après sa création, déplore le Policy Center for the New South    Le Real Madrid lance son programme éducatif de football au Maroc    La co-organisation du Mondial 2030 devrait générer plus de 100 000 emplois annuels au Maroc, selon Nadia Fettah    Ferhat Mehenni : Le régime algérien transforme Tala Hamza en base militaire dans le cadre d'un plan d'éradication des Kabyles    Bruno Retailleau accuse l'Algérie de connivence avec l'immigration clandestine et prône une rupture nette    Hackathon national : quatre initiatives distinguées à Rabat    Des enseignants marocains entament un programme inédit sur la Shoah en Europe centrale    Partenariat Maroco-Chinois Pionnier pour Stimuler l'Innovation en Santé et l'Intégration entre Médecine Moderne et Traditionnelle    Le moral des ménages repart à la hausse au 2e trimestre 2025    Saham Bank obtient 55 millions d'euros de la BERD    Lekjaa : Le Maroc prépare 2030 dans une logique de continuité et de durabilité    Infantino : Le Maroc est devenu un des centres mondiaux du football    Cinéma: La Commission d'aide dévoile sa liste    Le Maroc et l'UNESCO annoncent une nouvelle alliance pour promouvoir le développement en Afrique par l'éducation, la science et la culture    Les prévisions du samedi 19 juillet    Programme "Moussalaha" : 390 détenus bénéficiaires    Yaoundé vibre avec les « Renaissance Music Awards »    Pose de la première pierre du projet de valorisation du site archéologique de Sejilmassa    Festival : Jazzablanca, un final éclatant de stars et de jeunes talents    Ould Errachid reçoit l'ancien président d'Afrique du Sud et leader du parti MK, Jacob Zuma    







Merci d'avoir signalé!
Cette image sera automatiquement bloquée après qu'elle soit signalée par plusieurs personnes.



Elite et développement : la secte des grandes écoles
Publié dans La Vie éco le 08 - 07 - 2019

Les résultats du centre de préparation aux concours des grandes écoles françaises d'ingénieurs de Benguérir ont été éloquents cette année.
Beaucoup d'étudiants issus des familles les plus modestes ont désormais l'opportunité par leurs seuls mérite et intelligence de faire d'excellentes études et d'exercer potentiellement les plus hautes fonctions publiques ou privées dans leur pays, changeant ainsi à jamais leur condition sociale et celles de leurs familles.
C'est une très bonne chose pour eux, mais est-ce une bonne chose pour le Maroc ? Pas si sûr. Depuis le Protectorat français, le Maroc envoie annuellement quelques dizaines de ses plus brillants enfants faire leurs études dans les prestigieuses grandes écoles françaises, sous-traitant ainsi la formation de son élite à son ancien colonisateur. De retour au bercail, ils occupent les plus hautes fonctions dans le secteur privé et dans la haute administration, formant ainsi une caste qui se fond très peu dans le paysage local, formant ce qu'on peut appeler le «piège de l'élite marocaine». En effet, quels que soient le niveau et la qualité de leur formation, leur nombre demeure insuffisant pour exercer un quelconque effet d'impulsion sur le développement du pays. À titre d'illustration, le nombre de Marocains admis au concours d'entrée à l'Ecole Polytechnique ne dépasse pas la trentaine, sachant que cet établissement forme chaque année plus de 2 000 élèves. De ce paradoxe naît une situation inique relevée pertinemment par Omar Saghi, enseignant-chercheur à Sciences-Po Paris : «Parallèlement à ces promotions annuelles de brillants technocrates revenus de l'étranger, le Maroc investit à peine dans l'éducation de masse. Il offre l'image d'un pays baroque, associant l'un des plus hauts taux d'analphabétisme dans le monde arabe à une brillante et abondante élite intellectuelle, tout comme il combine l'un des plus puissants secteurs bancaires africains avec un taux de pauvreté massif. Quant à la France, elle trouvait son avantage dans cet outsourcing des élites. Les diplômés marocains des grandes écoles françaises poursuivent, chez eux, le maintien d'une alliance économique et politique favorable aux deux bords». Une fois bien installés dans leurs fonctions, ils mettent en place un système de cooptation où l'attribution des meilleurs postes que compte ce pays est réservée en priorité à leurs camarades d'école, grâce à un esprit de corps qu'on a pris le soin de leur inculquer tout au long d'une scolarité couronnée par l'octroi de la nationalité française. Dans cet univers savamment cadenassé, pour qu'un étudiant issu de l'enseignement public ou privé marocain se fraye un chemin, il faut qu'il fasse montre d'un talent hors pair, alors que ce même poste est octroyé sans exiger le même effort à un camarade d'école. L'élite devient plus préoccupée par la pureté de son diplôme que par la transmission de l'excellence académique qu'elle a acquise à ses jeunes compatriotes. C'est ainsi qu'une banque d'affaires au Maroc classait ses cadres en trois catégories A, B et C. La catégorie «A» est réservée aux diplômés des grandes écoles étrangères d'ingénieurs et de commerce, la catégorie «B» pour les écoles de moindre prestige et les universités étrangères et la catégorie «C» est un fourre-tout consacré aux étudiants marocains, quel qu'en soit le diplôme (école d'ingénieurs, école de commerce, universités, etc.). Le traitement est naturellement différencié selon la catégorie, car pour le fondateur de ce groupe, les «C» sont de la main-d'œuvre au service des catégories «A» et «B». Un autre exemple non moins parlant eut lieu dans les années 90, quand une jeune école marocaine de commerce avait conclu un accord de partenariat avec une grande école parisienne de commerce, les lauréats marocains de cette dernière avaient envoyé une lettre incendiaire à la direction de l'école française, la mettant en garde contre la «contamination» de leurs diplômes par ce partenariat. Cette perpétuation de la fabrication des élites dans un circuit fermé est l'une des raisons qui expliquent le maintien du Maroc dans le club des pays en développement, tant elle empêche l'émergence d'une large élite. Car les défis du développement doivent être portés par des milliers de Marocains issus des différentes écoles et universités du Royaume et non verrouillés par quelques chanceux. C'est pour échapper à cette triste réalité que des milliers de familles marocaines caressent ce doux rêve de voir leurs enfants faire partie de cette petite minorité d'élus qui va intégrer ce monde magique et fermé des grandes écoles françaises. Ce «droit de rêver» d'un avenir garanti pour leurs enfants siphonne une part de plus en plus grosse de leurs revenus, car l'Etat français a décidé de faire porter le poids entier de ce rêve sur leurs épaules. Une fois que cette petite minorité a réalisé ce rêve au prix de lourds sacrifices, elle veille à le maintenir au sein des mêmes sphères où les liens de sang et d'argent prolongent cette consanguinité des élites et accentuent la fraction de la société marocaine. Pis encore, elle consacre la réussite au sein des réseaux fermés où le diplôme l'emporte sur le caractère et où, pour accéder aux hautes fonctions privées et publiques, on doit soit être né sous la bonne étoile, soit avoir un QI de génie. Entre les deux, il n'y a aucune place pour le rêve de la majorité.


Cliquez ici pour lire l'article depuis sa source.