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Sexe contre emploi, le phénomène s'amplifie
Publié dans L'observateur du Maroc le 10 - 10 - 2024

« Il faut arrêter de classer l'abus de fonction pour obtenir des faveurs sexuelles comme un simple comportement immoral ou un acte de harcèlement sexuel. Il faut dorénavant le considérer comme un acte de corruption », préconise l'Instance nationale de la probité, de la prévention et de la lutte contre la corruption (INPPLC), dans son dernier rapport rendu public mardi dernier.
Largement répandu
Alarmant, le rapport 2023 de l'INPPLC a révélé que « le diagnostic global a permis de révéler les véritables dimensions du phénomène et l'étendue de sa propagation croissante que ce soit au niveau international, régional ou national ». « Sexe contre emploi », la situation serait en train de s'aggraver au sein des administrations mais aussi dans les entreprises du secteur privé. Formes mutantes, manifestations multiples et changeantes selon le milieu, les auteurs et les victimes, « ces crimes deviennent plus difficiles à détecter et à prouver », ajoute l'instance qui en appelle à la requalification de ce type d'abus de fonction lié à des avantages sexuels en actes de corruption.
Une pression insoutenable pour la victime
« L'analyse de ces données a révélé l'ampleur des offres présentées, promises ou attendues en échange de faveurs et d'avantages sexuels. De nombreux domaines et secteurs sont touchés par ce phénomène », ajoutent les auteurs du rapport. Ce dernier nous apprend que le phénomène touche tout espace impliquant l'exercice d'activités professionnelles et économiques « que ce soit un lieu de travail ou un espace d'accès aux services ».
Sexe contre emploi, sexe contre service
« C'est de la corruption sexuelle que l'on retrouve aussi bien dans le secteur public que dans le secteur privé ou dans le secteur des services. Ça implique l'abus de fonction et de pouvoir pour soutirer des faveurs sexuelles aux victimes contre un service ou un droit », explique maître Aicha Guellaâ, avocate et présidente de l'Association marocaine de défense des victimes. Au plus près de la souffrance des victimes, l'activiste note l'aspect étendu et multiforme d'un phénomène « mutant ».
« Presque 50% des plaintes et dossiers que nous traitons à l'association relèvent de ce registre : des abus de fonction de la part de chefs d'entreprises, de professeurs universitaires, de responsables dans des administrations publiques. Des hommes qui sont en postes de responsabilité qui abusent de leur pouvoir pour exploiter leurs subordonnés qui sont pour la plupart des femmes mais des hommes aussi même si ces derniers restent minoritaires », explique Guellaâ.
Une main baladeuse, un mot grivois, des messages... Les formes changent selon les cas
Un phénomène tentaculaire, aux formes mutantes, qui n'épargne personne même s'il a une certaine prédilection pour la gent féminine. « Sexistes, les auteurs de ce genre d'abus voient dans les femmes des proies faciles. Qu'importe son statut, ses diplômes ou sa situation dans la société ou au sein de l'entreprise ou dans l'administration, la victime devient une cible facile pour ces prédateurs », estime de son côté Samira Muheya, présidente de la Fédération des ligues des droits des femmes (FLDF).
Cette dernière nous raconte par ailleurs l'histoire d'une femme cadre, chef de service dans le secteur public, qui vit actuellement un enfer à cause de l'abus de fonction de son supérieur. « Elle est venue demander notre aide car refusant de céder au chantage : faveurs sexuelles contre carrière. Elle a été mise au placard malgré ses qualifications et elle est malmenée au quotidien. Elle paie cher son refus d'être exploitée sexuellement », regrette Muheya.
Personne n'est à l'abri
Des propos confirmés par Aicha Guellaâ qui nous apprend que, contrairement à ce que l'on peut croire, les victimes ne sont pas toujours des femmes de condition socio-économique fragile. « Il y a des cas de femmes chefs d'entreprises qui doivent subir ce type d'abus pour pouvoir décrocher un contrat ou une bonne affaire. Des cadres qui sont harcelées pour monnayer leurs faveurs contre une promotion... C'est un phénomène qui n'épargne personne », tranche l'avocate qui côtoie au quotidien les victimes d'agressions sexuelles. Comment s'explique donc cette sorte de « vulnérabilité féminine » face aux assauts des prédateurs profiteurs de leurs positions ? « Il faut dire que la société et les victimes n'ont pas conscience que ces agissements sont criminels et qu'ils sont passibles de poursuites judiciaires », explique maître Guellaâ.
La présidente de la FLDF est du même avis et fait valoir l'importance cruciale de la sensibilisation aux droits des femmes, la moralisation de l'espace public et surtout le pouvoir de la loi dans le changement des mentalités. « Sans le pouvoir dissuasif des lois et de leur application stricte, il serait ridicule de s'attendre à un véritable changement des mentalités et de la perception de la société par rapport aux femmes et aux abus sexuels contre elles en milieu professionnel. Il faut renforcer les textes de loi, la requalification des abus de fonction pour des faveurs sexuelles et l'application de la loi et des sanctions pour pouvoir aspirer à un changement réel », estime Samira Muheya.
Victimes « spéciales »
Pour Aicha Guellaâ, la spécificité de ce type de crime requiert un cadre juridique et réglementaire spécifique. Décryptage ? « Tout ce qui a trait au sexe reste tabou dans la société marocaine ; encore plus lorsqu'il s'agit du milieu professionnel. Ce type d'abus, s'opère souvent dans des lieux fermés loin des regards. Ce sont des crimes particuliers qui sont difficiles à prouver pour les victimes et qui ne doivent pas être traités comme des crimes « ordinaires » ; d'où la nécessité d'une section policière spéciale, de cadre juridique adapté et de juges spécialisés dans le traitement de ce genre d'affaires », suggère l'avocate. Cette dernière insiste sur l'état psychique et la situation sociale particulièrement fragilisées des victimes qui osent rarement dire non et porter plainte.
« L'exploitation sexuelle a des répercussions profondes sur la stabilité psychologique et familiale des victimes. Ces situations génèrent souvent un sentiment de honte, de peur et de culpabilité chez les personnes concernées, ce qui affecte leur estime de soi et leur confiance en elles-mêmes. Cela peut mener à des troubles anxieux, à la dépression et à l'isolement social. Ceci impacte profondément la dynamique familiale en créant des tensions au sein même du foyer des victimes », nous explique Houbib Mohammed, président de l'Association nationale de l'assistance sociale dans le secteur de la justice. Côtoyant les victimes à travers son travail dans les tribunaux, l'acteur associatif, qui est également psycho-sociologue, en sait long sur leur souffrance multidimensionnelle.
Impact ravageur
Un impact psycho-social ravageur qui peut être, également, doublé d'une carrière professionnelle mise en stand by pour échapper à la pression. « Les conséquences se manifestent aussi sur le plan professionnel. Les victimes peuvent être amenées à quitter leur emploi pour échapper à ces pressions, ce qui a un impact économique direct sur leur vie. Considérer cela comme une forme de corruption met en lumière la manière dont ces abus de pouvoir dénaturent les relations professionnelles et affaiblissent l'intégrité du milieu de travail », analyse Houbib.
Les victimes fragilisées par les assauts des prédateurs en milieu professionnel
Même avis du côté de Guellaâ et de Muheya qui notent l'impact économique du phénomène frappant de plein fouet l'égalité des chances. Pire encore, selon les activistes féministes, ces abus approfondissent les inégalités hommes-femmes en poussant ces dernières à se retirer de la vie active pour se protéger des assauts des prédateurs sexuels en fonction.
La lutte
La solution ? « La nécessité de mécanismes de soutien et de recours pour protéger les victimes et promouvoir un environnement professionnel sain. Un cadre légal et des lois spécifiques qui reconnaissent l'abus de fonction pour des faveurs sexuelles comme un crime en soi, des instances spécialisées pour traiter ce type d'affaires (enquêteurs, juges, assistants sociaux, contrôleurs de travail...) et la sensibilisation », résument nos interlocuteurs.
De son côté l'INPPLC, appelle dans son rapport à une « criminalisation renforcée » de ces comportements, en se basant sur les normes et conventions internationales. « En incriminant de manière explicite ces pratiques dans les cadres juridiques nationaux, cela permettrait de mieux sanctionner ces abus, tout en les intégrant dans les stratégies de prévention de la corruption », insiste l'instance. Cette dernière propose par ailleurs de repenser la lutte contre ces formes d'abus en élargissant leur champ de reconnaissance, en améliorant les moyens de preuve et de prévention, et en les traitant sous l'angle de la corruption systémique.


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