Le secrétaire général du Parti de la justice et du développement (PJD, opposition), Abdel-ilah Benkiran, a appelé l'ancien chef du gouvernement, Saad Eddine El Othmani, à «présenter des excuses» pour avoir paraphé la décision de reprise des relations avec Israël, lors d'un discours prononcé au rassemblement organisé dans la ville de Casablanca. Pour lui, «les frères de la résistance connaissent bien le PJD ainsi que toutes ses composantes. Ils savent comment communiquer avec lui, ils savent qui les invite à ses réunions, ils savent qui les soutient matériellement et moralement. Bien que le PJD n'ait jamais été favorable à la reprise des relations avec Tel-Aviv, et qu'il ne le sera jamais, nous avons présenté nos excuses. Cependant, celui qui doit vraiment s'excuser est le docteur Saad Eddine El Otmani, car il connaît les circonstances qui l'ont poussé à agir ainsi et il doit les expliquer», a tonné l'ancien chef du gouvernement. Benkiran, par la même occasion, a appelé à «une mobilisation dans la rue», pour faire tomber l'accord tripartite de 2020. Ce n'est pas la première fois que les propos de Benkiran révèlent une attitude ambivalente sur la question de la reprise des relations avec Israël. En dépit de son opposition affichée à cette décision, il en reconnaît implicitement la légitimité en demandant aux militants de son parti de ne pas se concentrer sur les politiques étatiques, invoquant des «circonstances spécifiques». Un ancien membre du premier cercle du PJD critique «la dissonance cognitive» chez Benkiran. «Plutôt que de rejeter totalement l'accord de 2020, Benkiran cherche à en externaliser la responsabilité sur El Otmani, tout en essayant de préserver le socle idéologique du PJD. Cette stratégie lui permet de garder le contrôle sur la base militante en maintenant une ligne dure contre les relations avec Tel-Aviv, tout en conservant une certaine flexibilité face aux impératifs de l'Etat marocain», a-t-il confié. Par ailleurs, il note que «Benkirane veut concilier des attentes contradictoires. Il se présente à la fois comme un défenseur des valeurs du PJD et un observateur pragmatique qui comprend les contraintes diplomatiques de l'Etat. En demandant à El Otmani de s'expliquer, Benkiran mobilise une stratégie de redistribution des responsabilités, où il se distancie subtilement des choix de son successeur tout en conservant une relation fonctionnelle avec l'Etat.» Néanmoins, il met en garde contre une approche populiste «où la volonté populaire est présentée, à tort, comme un contrepoids aux politiques souveraines.»