Le gouvernement algérien avait promis un Aïd al-Adha plus clément pour les foyers, après deux années marquées par des prix jugés exorbitants. L'importation d'un million de têtes ovines, validée par le président Abdelmadjid Tebboune en mars, devait prévenir toute surenchère. Mais l'acheminement et la vente des bêtes donnent lieu à de multiples désordres logistiques, rendant difficilement perceptible la décrue attendue des prix. Officiellement et à en croire les autorités, l'Algérie recense plus de 18 millions de moutons et environ six millions de chèvres, mais les effets conjugués de six années de sécheresse, de l'inflation des coûts vétérinaires et du recours massif à l'abattage des femelles ont fait fondre les cheptels disponibles pour le sacrifice rituel. En réponse, les autorités ont retenu trois pays pour l'importation, dont l'Espagne et la Roumanie, sur la base, assure-t-on, d'un cahier des charges conforme aux normes sanitaires et aux préceptes islamiques. Des promesses gouvernementales minées par l'exécution défaillante La distribution a été confiée exclusivement à des entreprises publiques, excluant les opérateurs privés. Des coopératives agricoles, théoriquement chargées de la commercialisation, peinent à recevoir les animaux. À Alger, Oran, Sétif et Constantine, des acheteurs font la queue devant des enclos vides ou mal approvisionnés. Le flou entoure encore la localisation des points de vente, le calendrier de livraison et les modalités de fixation des prix. Les autorités ont annoncé un plafonnement des tarifs et l'exonération de toute taxe à l'importation, mais ces mesures restent difficilement perceptibles sur le terrain. Dans les campagnes, les éleveurs affirment ne pas avoir constaté d'inflexion significative des prix, en dépit des déclarations officielles. Le président Tebboune avait jugé «inconcevable» qu'un bélier atteigne 170 000 dinars (environ 12 580 dirhams marocains), comme c'était le cas l'an dernier. Vers une baisse passagère des prix, sans effet durable Selon l'Organisation algérienne de protection du consommateur (OAPC), la mise sur le marché d'un million de bêtes devrait, en théorie, permettre une réduction d'au moins 25 % des prix. La quantité annoncée est jugée «considérable» et de nature à rétablir une certaine équité d'accès. Toutefois, l'organisation met en garde contre une désorganisation persistante, susceptible de favoriser la spéculation à la veille de la fête. La Fédération nationale des éleveurs (FNE) déplore, de son côté, l'absence de mesures structurelles. Elle a estimé que «le déséquilibre du marché perdurera tant que l'abattage des femelles restera impuni et que les moyens de production (eau, vaccins, fourrages) feront défaut.» Pour elle, seule une reconstitution méthodique du cheptel pourra garantir une stabilité pérenne des prix. En moyenne, plus de quatre millions de têtes sont sacrifiées chaque année en Algérie à l'occasion de l'Aïd, toutes espèces confondues. La réussite partielle de l'importation en 2025 semble néanmoins souligner, à rebours, les carences profondes d'un secteur agro-pastoral fragilisé, tant par les aléas climatiques que par les errements de la gouvernance.