L'Autorité de développement agricole rural jamaïcaine (RADA) a formellement rejeté, jeudi 15 mai, les conclusions d'un audit de performance diligenté par le Département de l'auditeur général (auGD), récusant une lecture partiale de son rôle dans la gestion d'un don d'engrais octroyé par le Maroc entre 2019 et 2023. Dans un rapport présenté devant le Parlement, l'auGD a indiqué n'avoir pu confirmer la destination effective d'une cargaison d'engrais d'une valeur excédant 54 millions de dollars jamaïcains, allouée dans le cadre d'un accord bilatéral au bénéfice de plusieurs parlementaires, censés en assurer la répartition auprès des agriculteurs. Le document, s'appuyant sur un audit interne conduit par le ministère de l'agriculture, de la pêche et des mines, évoque notamment des allégations selon lesquelles une partie de ces engrais aurait été commercialisée illicitement dans une boutique agricole de Saint Catherine, en août 2023. RADA défend son rôle de coordination Dans une déclaration transmise à la presse, RADA a contesté toute carence dans la supervision des opérations, affirmant que «le rapport de l'auGD méconnaît les responsabilités effectives de l'autorité et occulte les ajustements stratégiques opérés tant pendant qu'après la période examinée.» L'organisme a rappelé que les engrais en question ne relevaient pas du Production incentive programme (PIP), mais constituaient un don gracieux du royaume du Maroc à l'Etat jamaïcain. «En ce sens, aucun processus d'acquisition n'a été engagé par RADA, dont l'intervention s'est limitée à une coordination logistique avec les parlementaires et les services ministériels concernés», a-t-il précisé. RADA a également fait savoir qu'une partie des 72 000 sacs d'engrais réceptionnés avait initialement été jugée impropre à une distribution directe, en raison de détériorations mécaniques et de manipulations inadéquates. L'essentiel de ces engrais aurait cependant été redéployé à des fins agronomiques sur les stations expérimentales du ministère. Dispositifs de vérification et culture de la transparence L'autorité a indiqué avoir reçu des listes de distribution nominatives émanant des parlementaires, recensant les agriculteurs bénéficiaires, et avoir procédé à des demandes de vérification a posteriori. «La majorité des élus ont coopéré avec diligence, témoignant d'une volonté commune de rigueur et de clarté dans la répartition des intrants agricoles relevant de la puissance publique», a souligné RADA. Le rapport de l'auGD s'interroge aussi sur la pertinence de l'outil de hiérarchisation des cultures mis au point par RADA, en soulignant que plus de la moitié des cultures prioritaires définies manquaient d'objectifs quantitatifs, rendant difficile toute évaluation rigoureuse des résultats. Engagement pour une administration rigoureuse Sur ce point, RADA a nuancé la critique, rappelant que seuls deux des huit produits agricoles sélectionnés par l'outil avaient été retenus pour l'exercice 2024/2025. «Ce constat ne saurait être interprété comme une déficience méthodologique. La sélection repose sur des critères économiques — potentiel exportateur, besoins du marché local, substitution aux importations — et tient compte des aléas phytosanitaires et climatiques», a-t-elle soutenu. Tout en prenant acte des observations de l'auGD, RADA affirme avoir entrepris une révision profonde de ses mécanismes internes et de ses dispositifs de suivi. «Les relations de longue date entre RADA et les parlementaires, fondées sur des procédures normées, continuent de permettre une diffusion équitable et opportune des soutiens agricoles à travers l'île», a-t-elle conclu.