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Le Royaume-Uni, membre permanent du Conseil de sécurité, reconnaît pour la première fois «l'importance cardinale que la question du Sahara revêt pour le Maroc»
La cinquième session du dialogue stratégique entre le Maroc et le Royaume-Uni, membre permanent du Conseil du sécurité, s'est tenue dimanche à Rabat, sous la coprésidence du ministre des affaires étrangères, Nasser Bourita et de son homologue britannique, David Lammy, secrétaire d'Etat aux affaires étrangères, du Commonwealth et du développement. Cette rencontre, d'une rare densité politique et symbolique, a débouché sur la conclusion d'un accord d'orientation appelé à rehausser la relation bilatérale à un degré supérieur de coordination et de confiance. À l'issue de leurs échanges, les deux parties ont salué «un lien singulier, forgé par les siècles, affermi par la constance des engagements, et désormais orienté vers les exigences de notre temps». Le Maroc et le Royaume-Uni entendent désormais œuvrer, selon les termes de la déclaration conjointe, à «l'édification d'un partenariat lucide, équitable et durable, enraciné dans les intérêts profonds des deux nations». La question du Sahara, enjeu central du dialogue Sur le dossier du Sahara, Londres a exprimé une appréciation explicite de la position du Maroc. Le Royaume-Uni a rappelé «l'importance cardinale que cette question revêt pour le Royaume du Maroc» et s'est déclaré résolu à soutenir les efforts menés sous l'égide des Nations unies. Il a souligné la nécessité de parvenir à une solution politique fondée sur le compromis, tout en qualifiant la proposition marocaine d'autonomie comme étant «la plus sérieuse, la plus crédible et la plus structurée» parmi les options envisagées. Cette reconnaissance s'accompagne d'un appel commun à «sortir de l'atermoiement diplomatique et à engager sans délai des négociations substantielles», dans l'esprit des résolutions du Conseil de sécurité. Un tissu de coopération revisité dans son architecture L'entretien ministériel a permis de réexaminer l'ensemble des cadres institutionnels qui régissent les échanges bilatéraux : dialogue stratégique, conseils conjoints, plateformes sécuritaires, ainsi que les mécanismes de concertation sur les droits fondamentaux. L'objectif affiché est de leur conférer une portée renouvelée, plus apte à répondre aux mutations géopolitiques et aux défis globaux. Dans le domaine de la sécurité, le Maroc et le Royaume-Uni se sont accordés sur une intensification des échanges en matière de lutte contre le terrorisme, la criminalité transnationale, les cybermenaces et les dérives associées à l'intelligence artificielle. Londres a salué «l'autorité reconnue du Maroc en matière de sécurité régionale», notamment à travers son élection à la vice-présidence africaine d'Interpol. Un accent particulier a été mis sur le domaine naval et industriel, où les deux royaumes entendent approfondir leur entente, conjuguant la maîtrise technologique britannique et la vocation stratégique du Maroc sur l'Atlantique. Relations commerciales : vers une forme de maturité partagée Les échanges entre Rabat et Londres ont franchi en 2024 le seuil des 4,2 milliards de livres sterling (environ 54 milliards de dirhams), traduisant un élan continu depuis l'entrée en vigueur de l'accord d'association. Dans cette perspective, les deux parties ont convenu d'un resserrement des liens économiques à travers la création d'un conseil d'affaires conjoint, piloté par les opérateurs privés. L'agence britannique UK Export Finance a confirmé son concours financier à hauteur de 5 milliards de livres (près de 64 milliards de dirhams) pour soutenir les investissements dans les secteurs stratégiques, y compris dans les provinces du Sud, dans le respect des règles de conformité en vigueur. Parallèlement, les questions agricoles et douanières ont été abordées avec finesse : Rabat et Londres s'entendent pour lever les entraves persistantes, faciliter l'accès aux marchés, et garantir la reconnaissance mutuelle des appellations protégées. Changements climatiques, savoirs et santé : des convergences affirmées Les deux gouvernements ont insisté sur la nécessité de conjuguer leurs efforts dans les domaines liés à la transition énergétique, à la gestion raisonnée de l'eau et à la sauvegarde de l'environnement. Le Royaume-Uni a reconnu au Maroc «un rôle pionnier et structurant dans la reconfiguration des équilibres énergétiques au sud de la Méditerranée», notamment à travers ses engagements au sein des alliances internationales pour une production propre. Dans le secteur de la santé, Londres s'est déclaré disposé à appuyer l'ambitieux chantier de généralisation de la couverture médicale universelle au Maroc, en particulier dans le développement des infrastructures hospitalières et la formation des praticiens. S'agissant de l'enseignement et de la recherche, l'heure est au renforcement des passerelles entre les établissements d'enseignement supérieur, à la reconnaissance réciproque des diplômes, et à une extension maîtrisée de la présence académique britannique au Maroc. Une concertation resserrée sur les affaires régionales Au chapitre diplomatique, Londres a rendu hommage à «la posture équilibrée et constante du Maroc sur les grandes questions du moment». Le Royaume-Uni a notamment marqué son intérêt pour les deux grandes orientations géostratégiques portées par Rabat : le regroupement des Etats africains riverains de l'Atlantique, et l'ouverture logistique des pays du Sahel à l'océan. Sur la question palestinienne, Rabat et Londres ont réaffirmé leur attachement au principe de deux Etats, vivant côte à côte dans la paix et la sécurité, avec Jérusalem comme capitale partagée. Le Royaume-Uni a tenu à saluer «le rôle singulier et modérateur de Sa Majesté le Roi Mohammed VI, en sa qualité de président du Comité Al-Qods». Enfin, la rencontre s'est achevée sur une convergence de vues quant à la nécessité d'un multilatéralisme fondé sur le droit, la dignité humaine et la solidarité active. Londres a félicité le Maroc pour sa présidence du Conseil des droits de l'homme des Nations unies en 2024 et s'est dit disposé à accueillir une nouvelle session du dialogue informel maroco-britannique consacré à ces thématiques. «Ce que nos deux Royaumes partagent dépasse les cycles politiques. C'est une communauté de principes, une culture du dialogue, et une volonté de bâtir ensemble, sans condescendance ni illusions, un ordre plus juste», a déclaré David Lammy à l'issue des entretiens.