La 46ème session de l'Académie du Royaume du Maroc qui se tient à Rabat, sur le thème « L'Asie comme horizon de pensée » du 9 au 17 décembre, avec la participation d'éminents intellectuels venus de différents horizons et notamment d'Asie s'est poursuivie ce mercredi avec sa seconde séquence consacrée à l'Inde. C'est Rahma Bourqia, membre de l'Académie du Royaume du Maroc sociologue et anthropologue de renommée qui a ouvert la séance, avant de passer la main à Mohammed Kettani, Chancelier et Membre de l'Académie du Royaume du Maroc, pour, entre autre « vanter les ramifications de civilisations vieilles de plus de 5000 ans et en dresser les perspectives d'un géant en devenir« . Ce pays émergeant faisant parti du BRICS pour (Brésil, Russie, Inde, Chine et Afrique du Sud) a réalisé au cours de ces dernières décennies à coups de réformes économiques des progrès considérables, qu l'Inde est appelée à se positionner dans un futur proche parmi les cinq grandes puissances mondiales, ont par ailleurs mis en avant les différents intervenants, notant que la plus grande démocratie du monde a du reste, dépassé la France et la Grande-Bretagne en termes de PIB. L'Inde couvre tout un subcontinent et compte 1,3 milliard d'habitants. Dotée d'un régime parlementaire, c'est une Fédération de 29 Etats dirigés par des « Chief Ministers », le gouvernement central ayant à sa tête un Premier Ministre (Narendra Damodardas Modi depuis 2014). Mais c'est à Surinder Singh Jodhka, professeur à l'Université Jawaharlal-Nehru qu'est revenu l'honneur de conduire la conférence inaugurale, sous le thème « Diversités multiples et politique d'Etat : l'expérience indienne de vie avec la différence et construction de la citoyenneté ». Il détailla l'Inde sous toutes ses diversités, historiques, géopolitiques et sociales (castes, religions, langues). Contrairement aux idées reçues ce phénomène particulier à ce pays est plus une richesse. La diversité des langues en est une belle illustration. On parle en Inde 22 langues officielles dont bien sûr, l'hindi (première langue officielle en 1947) et l'anglais mais la mosaïque linguistique va au-delà de la centaine (sanskrit, tamoul, turc, persan, arabe, hindoustani, ourdou…) voire des milliers de dialectes (liés aux castes et religions), dira-t-il, la notion de caste (brahmanes (prêtres), les ksatriyas (guerriers, princes), les vaishyas (agriculteurs, commerçants) et les shudras (serviteurs, ouvriers) étant à lire au premier degré pour ne pas la voir en tant que classe sociale fermée. Mais de ces diversités linguistiques et autres, l'Inde, depuis son indépendance il y a soixante-dix ans, a eu le temps de s'en accommoder et de les gérer en tirant les meilleurs profits, nous dit, de son côté, Sujan R. Chinoy Diplomate et Directeur de l'Institut d'études d'analyses de défense (IDSA) qui développait le thème « Transformation économique de l'Inde et sa politique étrangère ». Le diplomate nous apprend aussi que l'avenir appartient à l'Inde car et la Chine et les Etats-Unis ont des populations vieillissantes au contraire de son pays dont la moitié est jeune et n'excède guère les 25 ans. Sunjoy joshi, directeur et « observer research Foundation » à New Delhi du thème « L'expérience de la modernisation en Inde vers un siècle numérique », a dans son domaine développé l'évolution de l'informatique en Inde depuis 1978 jusqu'à en devenir un géant du numérique depuis que l'Inde a corrigé le bug du siècle (an 2000). Dans un pays où 70 % de la population n'est pas urbaine, la digitalisation de l'économie est perçue comme un véritable accélérateur de développement surtout dans le monde rural (alphabétisation numérique). Mais il nuancera tout de même cette formidable évolution digitale car elle ne touche pas toute la population le genre féminin étant le premier à en souffrir, écarté en cela à 70%. On retiendra cette phrase pour ce qui est des échanges avec le Royaume « nous avons beaucoup à apprendre les uns des autres, il ne faut pas que le Maroc fasse nos erreurs car sur notre chemin nous sommes appelés à en faire ». Jean-Luc Racine, Directeur de recherche émérite au CNRS, Centre d'Etudes de l'Inde et de l'Asie du Sud de l'Ecole des Hautes Etudes en Sciences Sociales a quant à lui, schématisé académiquement et géopolitiquement son thème « Une nouvelle Inde ? Nationalisme, quête de puissance et défis du développement », où il a mis en exergue les progrès de l'Inde tout en mentionnant le discours nationaliste et le programme économique du parti au pouvoir. On retiendra de cette intervention cette citation journalistique indienne à l'occasion du soixante-dixième anniversaire de l'Inde en 1947 : « on peut avoir un débat sur la rapidité de notre progrès mais on ne peut pas nier le progrès lui-même. » La première séquence de cette session, qui s'est achevée le 10 décembre 2019, avait comme thème principal la Chine, tandis que la troisième, qui se déroulera les 16 et 17 décembre sera dédiée au Japon.