Le projet de gazoduc Nigéria-Maroc vient de franchir une étape stratégique majeure. En fin de semaine, une réunion de haut niveau tenue à Rabat a permis de faire le point sur les avancées techniques, d'aborder les phases institutionnelles et d'entériner l'engagement politique des parties prenantes. En effet, le méga-projet de gazoduc Nigeria, l'un des plus grands et ambitieux chantiers énergétiques jamais envisagés sur le continent africain, se concrétise un peu plus. A l'occasion de travaux du Gazoduc Africain Atlantique Nigéria Maroc (AAGP) tenus à Rabat les 10 et 11 juillet, réunissant responsables et acteurs actifs, les parties prenantes ont validé des jalons essentiels à la mise en œuvre du projet. En présence d'Amina Benkhadra, directrice générale de l'Office National des Hydrocarbures et des Mines (ONHYM), de hauts représentants de la CEDEAO, des sociétés pétrolières nationales et des institutions énergétiques régionales, la réunion a permis de valider les avancées concernant les études techniques et de lancer officiellement les préparatifs institutionnels pour le financement et la mise en œuvre. Le projet est désormais structuré autour d'une société holding qui supervisera trois entités régionales en charge de la réalisation des différents tronçons. Cette gouvernance en étoile vise à assurer flexibilité et coordination entre les partenaires, tout en respectant les spécificités locales. Sur le plan environnemental, les études d'impact menées dans les pays traversés ont abouti à des recommandations communes en matière de durabilité, de préservation des écosystèmes et de gestion sociale, indispensables pour un projet de cette ampleur. L'adoption, en décembre 2024 lors du Sommet de la CEDEAO, d'un accord intergouvernemental fixant les droits et obligations des Etats membres a renforcé la base légale du projet. Ce texte, désormais ratifié par les 13 pays concernés, constitue une avancée juridique capitale pour garantir la sécurité des investissements et la stabilité réglementaire à long terme. En marge de la réunion, un mémorandum d'entente a été signé entre la Nigerian National Petroleum Company (NNPC), l'ONHYM et la Société Togolaise du Gaz (SOTOGAZ), actant l'adhésion officielle du Togo au projet. La Communauté économique des Etats de l'Afrique de l'Ouest (CEDEAO) devrait approuver officiellement le projet à l'automne 2025, le consacrant comme chantier prioritaire pour l'intégration énergétique de la région. Ce soutien politique et institutionnel est d'autant plus crucial que le projet s'inscrit dans une conjoncture mondiale marquée par la transition énergétique, la reconfiguration des flux gaziers internationaux et la recherche d'alternatives au gaz russe en Europe. Long de plus de 5.600 kilomètres, le gazoduc reliera le Nigeria au Maroc en longeant la côte atlantique ouest-africaine. Il traversera 13 pays, du Bénin à la Mauritanie, pour atteindre le Maroc, où il sera raccordé au Gazoduc Maghreb-Europe, facilitant ainsi l'exportation vers le marché européen. Par son envergure, le projet est destiné à transporter jusqu'à 30 milliards de mètres cubes de gaz par an, contribuant ainsi à la sécurité énergétique du continent tout en alimentant les marchés internationaux. Par ailleurs, le gazoduc incarne une véritable vision géopolitique et économique panafricaine, visant à connecter durablement les pays producteurs, consommateurs et enclavés. Le Niger, le Burkina Faso et le Mali, qui ne sont pas directement sur le tracé, bénéficieront également de cette infrastructure grâce à des interconnexions planifiées. Outre les enjeux énergétiques, le gazoduc Nigeria-Maroc porte en lui une dimension stratégique de développement régional. Il permettra de fournir du gaz aux centrales électriques, d'alimenter les industries, de créer des milliers d'emplois directs et indirects, et de renforcer les infrastructures de transport et de télécommunications dans les pays traversés.