La stabilité familiale de la société marocaine, même si d'aucuns prétendent qu'elle est la plus menacée au monde par le phénomène de rupture conjugale, sans atteindre ce point de gravité, prête sérieusement à l'inquiétude. Les dernières statistiques sur les mariages et les divorces soulignent la lenteur des premiers et l'aggravation des seconds. Si le nouveau code de la famille, entré en application depuis 2004, a réussi, quoique très sensiblement, à faire moins d'émules au titre de la polygamie, en enregistrant 811 cas du type en 2006 contre 841 en 2005 et 904 l'année d'avant, des sources des tribunaux de la famille et universitaires en droit, le nombre de couples ayant convolé en justes noces, est estimé à 289 821 en 2006 marquant un ralentissement constant. Au motif que l'on se marie, maintenant, de moins en moins et de plus en plus tardivement. Par contre, les mêmes sources indiquent un nombre de divorces en accroissement exponentiel pour totaliser, dans la même année considérée, 43 030 cas. Un chiffre qui a pratiquement quadruplé en quelques années à peine. Bien sûr, ce n'est pas encore le record absolu du Texas et de sa ville Reno, mais la tendance est de plus en plus structurelle. Selon la LDDF (Ligue démocratique des droits des femmes), les centres d'écoute sont quotidiennement sollicités par des plaintes de femmes victimes d'arbitraire, de violence physique, d'escroquerie «juridiques» (bien avant l'instauration des juridictions spécialisées dans la famille), les fraudes, dont ne sont pas épargnées les femmes marocaines vivant dans les pays d'accueil des immigrés. Selon les militantes associatives, «l'application du code de la famille de manière adéquate demande une grande transparence des données et la participation active de la société civile dans le suivi et le contrôle de ses dispositions sur le terrain». Pour la raison que l'accès aux informations et données chiffrées auprès des juridictions compétentes, notamment à Casablanca, est très difficile, voire «verrouillé». Selon les rapports fournis, des violations entravant une application saine de la Moudouwana ont été relevées. Qu'il s'agisse des affaires de mariage, de divorce, de «nafaka», de violence conjugale, de répudiation, de filiation ou de garde des enfants. Les conclusions ont abouti à la coexistence des deux mentalités dans la mise en œuvre de cette loi, légaliste pour ceux qui s'en tiennent à l'esprit et à la lettre du nouveau code, et conservatrice pour ceux qui empruntent l'ancien esprit dans l'application de la nouvelle loi. Le rapport annuel sur l'application du code de la famille produit par la LDDF, mentionne clairement, au 12 mai 2005, bien des dérapages : «On a relevé dans des cas de violence physique et morale à l'encontre des femmes, l'indifférence ou le refus du parquet (ministère public) d'assumer ses responsabilités dans l'application des dispositions de la loi». Et d'ajouter, la «faiblesse des ressources humaines aux niveaux quantitatif et qualitatif» ainsi que le constat «qu'aucune femme n'a été nommée par le ministre de la Justice en tant que juge notaire».