À Avignon, la famille de Christophe Gleizes, le journaliste incarcéré en Algérie, dénonce une «fantasmagorie politico-judiciaire»    Le Maroc debout    Casablanca : La vérité sur des allégations de vol d'organes    Le Parlement panafricain demeure un organe sans autorité, vingt ans après sa création, déplore le Policy Center for the New South    Capacité future à épargner : perception pessimiste des ménages au T2-2025 (HCP)    Economie verte : la BERD octroie 55 M€ à Saham Bank pour appuyer les projets de développement durable    Ouezzane/Génération Green: Lancement de plusieurs projets de développement agricole et rural    Le Gabon adopte une nouvelle stratégie de développement du secteur de la pêche maritime        L'ancien président coréen Yoon Suk Yeol inculpé pour abus de pouvoir    La présidence syrienne annonce un cessez-le-feu immédiat à Soueïda    Défis climatiques et souveraineté : histoire d'eaux troubles    Euro (f) Suisse 25 : Cruelle désillusion pour les Bleues, l'Allemagne en demi-finale    FIFA/FRMF : Gianni Infantino salue les avancées du football marocain    CAN (f) 2024 : Pas de demi-finale Maroc–Algérie, les Lionnes affronteront le Ghana    Interview avec Paul Mamere : « Mon parcours n'est pas une exception »    Le détenu décédé à Nador souffrait d'une maladie incurable et bénéficiait des soins de santé nécessaires    Subventions aux œuvres cinématographiques : la commission dévoile la liste des bénéficiaires    Le Real Madrid lance son programme éducatif de football au Maroc    Bonus INTGVIEW. Lahcen Saâdi : « Les engagements du programme gouvernemental sont tenus »    Des enseignants marocains entament un programme inédit sur la Shoah en Europe centrale    Partenariat Maroco-Chinois Pionnier pour Stimuler l'Innovation en Santé et l'Intégration entre Médecine Moderne et Traditionnelle    Lekjaa : Le Maroc prépare 2030 dans une logique de continuité et de durabilité    La co-organisation du Mondial 2030 devrait générer plus de 100 000 emplois annuels au Maroc, selon Nadia Fettah    FC Barcelone: le retour au Camp Nou encore repoussé    Brahim Diaz va prolonger au Real    Hackathon national : quatre initiatives distinguées à Rabat    Ferhat Mehenni : Le régime algérien transforme Tala Hamza en base militaire dans le cadre d'un plan d'éradication des Kabyles    Le Maroc scelle un accord avec Boeing pour ériger cinq pôles aéronautiques d'excellence    Bruno Retailleau accuse l'Algérie de connivence avec l'immigration clandestine et prône une rupture nette    Le Maroc et l'UNESCO annoncent une nouvelle alliance pour promouvoir le développement en Afrique par l'éducation, la science et la culture    5G au Maroc : Un train de retard pour une technologie sur le déclin ? [INTEGRAL]    Les prévisions du samedi 19 juillet    Morocco National Hackathon supports digitalization for four local NGOs    Programme "Moussalaha" : 390 détenus bénéficiaires    Yaoundé vibre avec les « Renaissance Music Awards »    Pose de la première pierre du projet de valorisation du site archéologique de Sejilmassa    Ferhat Mehenni honoré lors d'une prestigieuse cérémonie internationale à Paris    Selon le prestigieux institut américain WINEP, «Alger pourrait contribuer à persuader le Polisario d'accepter un modèle négocié d'autonomie, la proposition marocaine servant de canevas»    Festival : Jazzablanca, un final éclatant de stars et de jeunes talents    Décès d'Ahmed Faras : le président de la FIFA rend hommage à la carrière exceptionnelle d'une légende du football africain    Marruecos extiende la alfombra roja a Jacob Zuma tras el acercamiento sobre el Sahara    El conflicto se intensifica entre la Unión Europea y Argelia    Nadia Fettah: « Tous les partenaires sont convaincus de la nécessité d'une solution consensuelle »    L'Humeur : Timitar, cette bombe qui éclate mou    Ould Errachid reçoit l'ancien président d'Afrique du Sud et leader du parti MK, Jacob Zuma    Festival des Plages Maroc Telecom : Une soirée d'ouverture réussie à M'diq sous le signe de la fête et du partage    Temps'Danse fait rayonner le Maroc à la Coupe du monde de danse en Espagne    







Merci d'avoir signalé!
Cette image sera automatiquement bloquée après qu'elle soit signalée par plusieurs personnes.



«Le poète a toujours raison»
Publié dans La Vie éco le 14 - 12 - 2009


Au-delà de la puissance
de l'Å"uvre et de la force créative de l'écrivain et du poète, le Goncourt de la poésie à Laà¢bi, c'est toute cette histoire et tout ce parcours de vie qu'il salue. Emotion donc et chapeau bas à ce poète qui, malgré toutes les épreuves endurées,
a toujours conservé
sa capacité à aimer
et à croire en l'humain.
Des nouvelles qui apportent du plaisir, il n'en tombe pas tous les jours. Il en est une qui, bien que délivrée dans le froid libellé du communiqué de presse, a dû susciter de l'émotion chez bien des personnes. Des hommes et des femmes appartenant à une génération dont la jeunesse, dans les années 70, s'est dopée à l'utopie d'un monde meilleur, plus juste et plus égalitaire. Reprise ensuite par les médias nationaux et internationaux, une dépêche de la MAP nous a ainsi appris que «le Goncourt de la poésie 2009 a été attribué mardi (1er décembre) à Paris à l'écrivain et poète marocain Abdellatif Laâbi pour l'ensemble de son œuvre». Pour la deuxième fois de son histoire, la prestigieuse Académie Goncourt a ainsi consacré un des nôtres, qui plus est un poète dont toute l'œuvre est un hymne à la liberté et à la justice. Laâbi «goncourdisé», quelle formidable revanche sur «la citadelle de l'exil» !
Le premier Goncourt à un Marocain, celui de la littérature, c'était en 1987 et le lauréat en était Tahar Ben Jelloun. Le plus célèbre des prix littéraires à un écrivain marocain d'expression française, un grand moment que ce fut là ! S'approprier la langue de l'Autre, l'ancien colonisateur, la réinventer, y ciseler des mots à soi, forgés à son histoire collective et atteindre l'excellence jusqu'à forcer la porte du temple, l'auteur de La Nuit sacrée fut le premier à réaliser cette prouesse. Forte de cette reconnaissance, la littérature marocaine d'expression française a vu s'élargir son éventail de lecteurs non marocains. Grâce au Goncourt, un livre tel que La plus haute des solitudes a été relu. Car, il est juste de le rappeler, avec cette langue de l'autre qu'il a faite sienne, Tahar Ben Jelloun a participé à tirer de l'ombre des êtres alors plongés dans un noir absolu. Après Driss Chraïbi et ses Boucs, il fut parmi les tout premiers écrivains à écrire sur la condition des émigrés maghrébins en France, contribuant ainsi à casser leur invisibilité.
L'attribution du prix Goncourt de la poésie à Abdellatif Laâbi est chargée d'une autre symbolique, aussi forte mais de nature différente. Au-delà de l'homme d'écriture, le Goncourt à Laâbi honore l'homme d'engagement. Il consacre une plume qui, toute une vie durant, fut au service de la lutte. Non pas la lutte pour les biens matériels ou pour le pouvoir mais la lutte noble, le combat de l'homme pour l'homme. Les mots contre les maux, telle pourrait être la devise de Abdellatif Laâbi, devise qui lui coûta de ne pas voir ses enfants grandir, privé qu'il fut de liberté pendant huit longues années.
Né à Fès en 1942, Abdellatif Laâbi a 14 ans à l'indépendance. Trop jeune pour participer à la lutte de libération mais suffisamment âgé pour avoir connu la condition humiliante du colonisé. Et donc pour s'éprendre à tout jamais du mot liberté.
Abdellatif découvre la lecture et la langue française à l'adolescence. Très tôt, il est atteint du «mal d'écrire». «Mon premier choc, raconte-t-il, fut la découverte de l'œuvre de Dostoïevski. Je découvrais avec lui que la vie est un appel intérieur et un regard de compassion jeté sur le monde des hommes». A vingt ans, Laâbi s'ouvre à la passion, celle des mots, du théâtre et d'une femme, la compagne rêvée d'une vie, Jocelyne, qu'il épouse à 23 ans. Sa sensibilité est à fleur de peau, réceptive et réactive à l'extrême. En 1965, les émeutes de Casablanca au cours desquelles des milliers d'enfants sont fauchés par les balles marquent son engagement en politique. Un an plus tard, avec d'autres poètes, il crée Souffles, une revue qui va cristalliser autour d'elle toutes les énergies créatrices de l'époque. D'abord lancée dans une perspective de renouveau poétique, la revue attire très vite vers elle des peintres, des cinéastes, des hommes de théâtre, des chercheurs…. Au-delà du poétique, c'est le politique dans toutes ses dimensions qui se donne à penser. «Ce minuscule opuscule contient de la dynamite. Les hommes qui nous parlent ont déjà laissé derrière eux le temps des gammes et des vocalises. Ils ont moins de trente ans, mais, à travers une expérience mouvementée, douloureuse du monde, ils témoignent d'une lucidité, d'une présence rare». (Politique-Hebdo, 1966). Souffles, qui sera interdite en 1972, ce sont trente numéros de questionnement sur la culture et de mise en exergue des maux de la société marocaine. Entretemps, Laâbi est devenu l'un des fondateurs du mouvement d'extrême gauche Ilal-Amam. En 1972, en même temps que la revue est interdite, Laâbi est arrêté. Jugé en 1973, le poète est condamné à dix ans de prison. Les «preuves» de son entreprise de «subversion», du complot fomenté contre le régime : les numéros au complet de Souffles.
Au-delà de la puissance de l'œuvre et de la force créative de l'écrivain et du poète, le Goncourt de la poésie à Laâbi, c'est toute cette histoire et tout ce parcours de vie qu'il salue. «Le poète a toujours raison/qui voit plus loin que l'horizon…». Emotion donc et chapeau bas à ce poète qui, malgré toutes les épreuves endurées, a toujours conservé sa capacité à aimer et à croire en l'humain.


Cliquez ici pour lire l'article depuis sa source.