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Salon international de Tanger des livres et des arts : L'écriture selon Marcus Malte et David Foenkinos
Publié dans Les ECO le 12 - 05 - 2017

Deux plumes, deux artistes à la sensibilité débordante que le Salon international de Tanger des livres et des arts a réuni pour une conférence dialoguée afin de mieux cerner leur processus d'écriture, leur histoire et les histoires qui émanent d'eux. Prix Mystère de la critique et prix Fémina, Marcus Malte ouvre les portes de son écriture sombre et mystérieuse alors que David Foenkinos, prix Goncourt des lycées et Prix Renaudot nous invite dans son univers léger au service d'une belle humanité et d'un humour décalé touchant.
Tout semble les séparer, mais ils se retrouvent forcément dans leur profonde humanité et dans la passion avec laquelle ils font vivre des personnages. L'un est d'apparence plus énigmatique, plus mystérieux, plus sombre. L'autre paraît accessible, solaire et aérien. Pourtant, lors de cette conférence dialoguée, samedi 6 mai au Palais des institutions italiennes lors de la 21e édition du Salon international de Tanger des livres et des arts, Marcus Malte et David Foenkinos se sont retrouvés dans le processus d'écriture dans leur amour de la musique, dans la force des personnages qu'ils puisent de la force de l'humain et dans ce besoin de raconter une histoire.
Marcus Malte raconte des histoires d'êtres humains.
Quand on lit un roman de Marcus Malte, on ne peut être que saisi par la force de l'écriture et le pouvoir du magnétisme des mots. Le romancier français qui puise sa force dans sa ville natale Seyne-sur-Mer, est l'auteur de plusieurs polars, romans dit noirs à l'image de «Carnage, constellation» (1998), récit de la rencontre entre un jeune transsexuel et un truand, «Garden of Love» (2007), lauréat de plusieurs prix et «Les Harmoniques» (2011), qui remporte le Prix Mystère de la critique 2012. «Garden of love, comme la plupart de mes romans, c'est tout d'abord une histoire d'homme, d'hommes et de femmes, des histoires d'êtres humains. Ce qui m'intéresse, comme le fait David d'ailleurs, ce sont les êtres humains. J'ai tendance à m'intéresser au côté obscur de la force, aux choses assez sombres qui émanent de l'homme mais celles qui lui arrivent en pleine figure aussi. Je creuse à travers chaque roman, dans ces espaces sombres», confie celui qui a également fait paraître des romans policiers destinés à la jeunesse, notamment «Il va venir» (2005) et «De poussière et de sang» (2007). Le romancier qui donne une impression d'assurance et de force inouïe, et qui donne ce sentiment de toujours savoir où il va tellement il nous embarque à chaque aventure, avoue qu'il n'a aucune idée de sujet avant de commencer un roman. «Avant de commencer un roman, je ne sais pas du tout de quoi j'ai envie de parler. Je n'ai aucun thème, aucun sujet, aucune idée de sujet !
La seule chose qui me cherche au départ, c'est ce rapport musical. J'écris des romans comme on pourrait écrire de la musique. Je cherche un ton, une tonalité. Je cherche des sonorités, un certain type de rythme. Tout cela va me mener à un certain type d'histoires», confie Marcus Malte qui se lance à la recherche d'une autre sonorité pour son dernier roman : le Garçon. Une sonorité qui laisse la place au silence et parfois au malaise puisque son héros ne parle pas et pendant tout le début du roman, le lecteur ne sait pas s'il agit d'un être humain ou d'un animal. «Pour le garçon, je recherchais une autre sonorité avec une langue d'un autre registre, dans la veine d'un roman du 19e siècle. Je m'impose quelques barrières : ne pas utiliser de mots qui n'existaient pas avant 1930. L'air de rien, cela change beaucoup de choses. On pense différemment. Ça m'a donné l'idée d'un autre type d'histoire». Le roman qui se situe entre 1908 et 1938 raconte l'histoire de ce garçon que l'on suit pendant 30 ans, à la quête de son humanité.
À travers lui, on apprend à vivre, à découvrir l'autre, à aimer, à détester, à voir le monde autrement, à travers un œil neuf. Un roman étonnant, raconté à partir de ses sensations, de ses axes. Il a un peu plus de 14 ans, quasi sauvage, on le découvre dans un endroit isolé avec sa mère, il n'a jamais vu aucun être humain, il ne connaît rien. Quand sa mère meurt il va à la découverte du monde. Marcus Malte tente de répondre à la question existentielle : «Qu'est-ce qu'être homme ?» et pas à pas, on rencontre des personnages à travers ce road book, on monte vers les sommets de la civilisation, on est confronté à la guerre de 14-18 à travers lui. «C'est une page blanche, il ne connaît rien au monde. Tout peut être écrit sur cette page. Regard neuf sur notre manière de vivre. Par un effet miroir, on jette nous-mêmes un regard sur la manière dont nous vivons, sur notre société. Il voit comment on vit, comment on évolue, qui peut sembler étranger», continue l'auteur nature et brut qui aime bien explorer des voies diverses et variées. Quand tous ses romans racontent notre temps, des histoires contemporaines, de notre époque, il décide d'explorer d'autres voies : «Notre époque me pèse, j'avais envie de voir ailleurs. Pas dans l'espace mais dans le temps, ce qui est aussi une forme d'exotisme pour moi. C'était une envie de registre de langue différent. C'est ce qui me motive». Il donne alors naissance à un roman touchant où l'art joue un rôle essentiel puisque l'art va l'humaniser, tout comme l'amour. À travers des rencontres comme celle du «Shrek philosophique», un mentor qui va lui transmettre sa passion des voyages et de l'art, il rencontre l'amour avec Emma, une bourgeoise pianiste, mélomane qui lui transmet son amour de la littérature et des mots. Telle une éponge, ce garçon absorbera tout sur son passage, il connaît le bonheur et la plénitude tout en passant par l'obscurité de la condition humaine avec une véritable réflexion sur le mal. «Ce rapport à la violence, en l'occurrence la guerre qui est la forme le plus impressionnante de violence, est peut-être nécessaire. Est-ce que c'est inscrit dans la nature profonde de l'homme ou est-ce que c'est quelque chose qui est poussé par des circonstances ?».
David Foenkinos fait sourire même quand ça va mal
Moins dans le côté obscur mais plus dans la lumière, même quand les sujets sont lourds, David Foenkinos a ce pouvoir de donner le sourire même quand ça va mal. Avec des personnages touchants, décalés dans leur banalité, presque effacés mais dont on ne peut qu'être marqués lors de chacun de leur passage, le romancier à la plume touchante propose des voyages à travers les souvenirs, les sensations, les émotions. De «La délicatesse» à «nos séparations», en passant par «les souvenirs», «Je vais mieux» ou encore «Charlotte», David Foenkinos explore l'humain en mettant un mot juste sur les maux. «Il y a des gens formidables qu'on rencontre au mauvais moment. Et il y a des gens qui sont formidables parce qu'on les rencontre au bon moment», dit-il dans son roman «La délicatesse» adapté au cinéma dont le rôle principal est joué par Audrey Tautou. Ce n'est pas pour rien que tout part, selon lui de ses personnages. L'histoire vit à travers eux, grâce à eux, grâce à un prénom même. «Tout commence par le prénom. Quand je trouve le prénom de mes personnages, je trouve l'histoire», s'amuse le romancier qui se décrit comme un «dépressif heureux» qui mûrit une rupture avec «Charlotte», un roman plus noir, une biographie mais née également d'une rencontre qui l'a profondément bouleversée. «J'ai découvert Charlotte Salomon par le plus grand des hasards en 2006 lors d'une exposition à Paris, je ne savais pas qui elle était. Je ne savais pas à quoi j'allais être confronté, ce que j'allais voir. Elle m'a attrapé l'esprit, à un tel niveau de culture et d'intelligence que ce sont des tableaux qui racontent sa vie. Elle m'a attrapé le cœur. Une vie de souffrance, de désespoir. C'est quelqu'un qui a du courage, de la beauté, de la lumière puisque dans ce désespoir, au bord de la folie, elle va transformer cette noirceur en source éclatante, artistique, pleine de vie, d'intelligence». Il se trouve dans l'obligation d'écrire, dans l'urgence de raconter cette histoire qui l'a marqué. Et de la même façon qu'elle le marque, David Foeknios souhaite marquer en «Charlottisant» tout le monde. «On n'est pas dans l'ordre du choix, de la volonté. Ce livre là, qui a nécessité beaucoup d'enquêtes parce qu'il n'y a pas beaucoup d'information sur elle, est une biographie émotionnelle. Je raconte pourquoi elle me touche autant, cette enquête, mon rapport à elle. C'est la première fois que je suis autant présent dans mon roman», raconte l'auteur qui est dépassé par le succès d'un roman fait avec le cœur, les tripes. Au-delà de tous les prix et de toutes les distinctions, le monde connaît Charlotte Salomon, l'étudie, la découvre, la cherche via des expositions hommages, cérémonies et celle-ci est même étudiée au bac, des jeunes lycéens l'ont dans leur programme de lecture. Il y aurait même un projet de film que le romancier réalisateur ne se voit pas diriger : «J'espère un meilleur réalisateur que moi pour Charlotte ! Mon obsession, c'est que tout le monde connaisse cette femme, cette grande artiste». Pari tenu.
David Foenkinos montre au monde entier comment cette femme et cette artiste a résisté au nazisme, à la maladie, à la folie, à l'héritage d'une famille où toutes les femmes se suicident grâce à son art. En dessinant sa vie, elle n'oublie pas son passé tel un exutoire, une voie à la résistance. «Au-delà de sa vie, c'est incroyable de voir à quel point, malgré toute la misère, toutes les souffrances, en ayant peur, en ayant faim, elle a pu donner naissance à une œuvre d'une telle puissance à la fois musicale, picturale. C'est comme si elle trouvait la vie tellement insoutenable qu'elle va la transformer en une vie de lumière et de musique».
Le romancier choisit une autre forme d'écriture, celle de la prose comme pour lui avouer son amour et son admiration. Une façon d'écrire qui s'est imposée d'elle-même puisque David Foenkinos n'a pas réussi à mettre des mots sur cette histoire, au départ. «Je n'arrivais pas à l'écrire, je n'arrivais pas à trouver les mots. En allant à la ligne, j'ai pu écrire ce livre. En respirant, je raconte cette histoire pleine de blessures. J'avais envie aussi de lui rendre hommage par la forme en y mettant de la respiration, de la douceur, de la délicatesse». La délicatesse, une vertu qu'on lui connaît bien...


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