Pour la Belgique, c'est toujours non : le Premier ministre Bart De Wever a réaffirmé son opposition à l'utilisation par l'UE des avoirs russes gelés pour financer l'Ukraine, menaçant ainsi la viabilité du dispositif. «Pourquoi nous aventurer ainsi dans des terrains juridiques et financiers inconnus ?», interroge le chef du gouvernement belge, Bart De Wever, dans une lettre de quatre pages adressée jeudi à la présidente de la Commission européenne, Ursula von der Leyen. Pour le conservateur flamand, le dispositif prévoyant de recourir aux avoirs gelés de la Banque centrale russe, dont l'essentiel se trouve en Belgique, est «fondamentalement erroné». La Commission européenne a proposé une utilisation de ces avoirs pour financer un «prêt de réparation» de quelque 140 milliards d'euros à l'Ukraine, que Kiev ne rembourserait que si la Russie paie des réparations de guerre. Délicate équation Les Européens se sont engagés fin octobre à trouver des solutions pour financer l'Ukraine au cours des deux prochaines années, afin de garantir que Kiev ne se retrouve pas à court de ressources malgré le retrait progressif des Américains. La grande question est désormais de savoir comment organiser ce financement. Pour de nombreux pays de l'UE aux finances publiques fragiles, l'option la plus séduisante est de s'appuyer sur les avoirs de la Banque centrale russe, gelés sur le continent après l'invasion de l'Ukraine, en février 2022. La société Euroclear, basée à Bruxelles, détient quelque 210 milliards d'euros de ces avoirs, dont le total atteint 235 milliards dans l'UE. L'Allemagne, les pays baltes, les pays scandinaves, la Pologne et les Pays-Bas y sont très favorables. Risques et dangers Mais l'opération, complètement inédite, soulève de nombreuses interrogations, et pas seulement en Belgique. La Banque centrale européenne (BCE) s'inquiète d'éventuelles turbulences sur les marchés financiers, et d'une possible déstabilisation de l'euro. Bart De Wever redoute quant à lui que son pays paie seul les pots cassés en cas de problème, et soit exposé à d'éventuelles représailles russes. «Je ne ferai jamais porter à la Belgique seule les risques et les dangers qui découleraient de l'option d'un prêt de réparation», écrit le Premier ministre belge. Depuis plusieurs semaines, diplomates et responsables européens s'activent en coulisses pour répondre à ces inquiétudes. Ils ont trois semaines pour tenter de rallier la Belgique au projet ou bien de trouver d'autres formes de financement pour l'Ukraine. Le tout avant un sommet crucial, prévu le 18 décembre. Dans sa lettre, Bart De Wever martèle qu'il ne validera le dispositif que si des garanties contraignantes «sont fournies et signées par les Etats membres au moment de la décision».