Cours des devises du mardi 9 septembre 2025    Morocco and Senegal strengthen ties with new ministerial collaboration    Rentrée scolaire 2025-2026 : Environ 8,27 millions d'élèves rejoignent les classes    Mondial 2026: le Maroc confirme face à la Zambie et signe un carton plein    Le temps qu'il fera ce mardi 9 septembre 2025    Les températures attendues ce mardi 9 septembre 2025    Gad Elmaleh : « Jouer au Maroc a une saveur particulière, un trac particulier »    Maroc-Sénégal: Premier contact entre Bourita et Cheikh Niang    Maroc-UE : Un partenariat renforcé sur la recherche scientifique    La télévision algérienne diffuse l'image du drapeau de la "République kabyle" depuis le stade Mohammed V à Casablanca    Sahara : De Mistura démystifie le «statut d'observateur» de l'Algérie    Une étudiante marocaine brille au concours « Pont de la langue chinoise »    Palestine : Six colons tués et plusieurs autres blessés dans une opération de la résistance à Al Qods    Ferhat Mehenni fixe la date pour proclamer officiellement l'indépendance de la Kabylie    Rentrée scolaire 2025-2026 : Environ 8,27 millions d'élèves rejoignent les bancs de l'école (ministère)    Honolulu: Una exposición celebra el arte marroquí y marca el hermanamiento con Rabat    Le Maroc figure sur la liste européenne des pays d'origine sûrs tandis que l'UE+ voit chuter ses demandes d'asile de 23 % au premier semestre 2025, un chiffre historique    Le Maâlem Mustapha Baqbou n'est plus    L'Alhambra de Grenade accueille un nouvel espace amazigh en l'honneur de la Dr Leila Mezian    Moroccan Gnaoua master Maalem Mustapha Bakbou passes away at 72    Séisme en Afghanistan : la Chine envoie une aide d'urgence.    Zambie-Maroc: Les Lions en mode confirmation    Rachid M'Barki... De l'éviction en France à un retour en force sur l'écran de Medi1 TV...    Azemmour: Le melhoun, un patrimoine vivant au cœur de l'identité nationale    Bundesliga : le Danois Kasper Hjulmand prend les rênes du Bayer Leverkusen jusqu'en 2027    Le président Joseph Aoun reçoit à Beyrouth Ali Dahar, nouvel ambassadeur du Liban auprès du Maroc    Addis-Abeba accueille le 2e sommet africain sur le climat avec la participation du Maroc    Stade Prince Moulay Abdellah : une enceinte d'élite pour les grands rendez-vous mondiaux    Apprentissage de l'anglais : Rabat se prépare aux événements sportifs    Post-séisme à Marrakech : Les monuments historiques renaissent de leurs cendres    Tanger Med. Une centrale solaire flottante pour préserver l'eau    Transport maritime : le Maroc consolide son rôle de hub entre Europe et Afrique    Gaza : l'Espagne durcit ses sanctions contre Israël et augmente son aide humanitaire    France : vote décisif à l'Assemblée nationale pour le gouvernement de François Bayrou    Un résident d'Utrecht condamné à une amende après avoir perturbé un vol vers le Maroc    Alerte météo : orages et fortes rafales ce lundi    Casablanca s'embrase pour la victoire des Ravens au Free Fire Battle of Morocco 2025    Fédération nationale du Crédit Agricole : Meriem Echcherfi prend les rênes    Honolulu : Une exposition célèbre l'art marocain et marque le jumelage avec Rabat    Taroudant : Une dynamique accélérée de reconstruction après le séisme d'Al Haouz    Prépa CDM U20 Chili 25/ Le Maroc et les Etats Unis dos à dos    La 23ème édition du festival Tanjazz se tiendra, du 18 au 20 septembre 2026    Le Maroc se hisse au 6e rang des destinations mondiales en 2025 selon Kayak    Erick Baert, l'homme aux 100 voix, de retour au Maroc avec son spectacle "Illusions vocales"    Bourse de Casablanca : ouverture dans le vert    Marrakech : Deux morts dans un incendie au douar Moulay Azzouz Elmelk    Zakaria El Ouahdi réagit à son absence avec les Lions de l'Atlas    Association professionnelle des établissements de paiement : Nouveau bureau et gouvernance renforcée    







Merci d'avoir signalé!
Cette image sera automatiquement bloquée après qu'elle soit signalée par plusieurs personnes.



Dastara
Publié dans Le Soir Echos le 05 - 07 - 2011

Les Constitutions pérennes sont lapidaires, peut-être même laconiques. Elles disent peu mais bien, pour laisser à la vie publique l'occasion de se développer autour de l'ossature des articles.
Le XIXe siècle est connu pour être le siècle des inventions. Moins connu est le problème linguistique qui en découla. Comment appeler ces signes qui se transmettent, ces machines qui parlent, ces cylindres qui enregistrent ? On inventa foison de mots nouveaux : le télégramme, le gramophone, le phonographe.
Les Orientaux connurent le même problème, quand ils importèrent les inventions des autres. Par exemple, la Constitution. Les Arabes empruntèrent à la langue persane le mot dastour, qui signifie «ordre».
De jeunes intellectuels orientaux apprirent à épeler avec sérieux ces deux syllabes, et réclamèrent, dans l'enthousiasme, des dastour qu'ils préféraient prononcer dostour. La Tunisie, province ottomane, établit la première Constitution dans un pays musulman en 1857. Pour la féliciter, la France la colonisa en 1882. Mais cela ne suffit pas à modérer l'engouement pour le dostour. Le Caire trépigna en 1879, Téhéran en 1905, Istanbul en 1908. Partout des peuples piaffaient d'enthousiasme pour les dostour. On leur en donna. Il n'y eut pas jusqu'au lointain empire chérifien qui apprit le mot en 1908, à l'occasion d'un conflit de famille entre Moulay Abdel-Aziz et son frère Moulay Abdel-Hafid. La France le félicita, comme elle avait félicité la Tunisie.
Depuis quelques mois, les officines où se forgent les opinions publiques arabes promeuvent un verbe nouveau, dastara, «constitutionnaliser». Formé sur le mot dostour, c'est un néologisme au carré, autant dire le symptôme d'un profond malaise. Dastara est le procédé qui permet, à coup d'articles et d'amendements, d'introduire dans les Constitutions des réalités sociales (le sport, le développement…) ou des identifications culturelles (les langues, les ethnies…). Vu comme un gage de démocratie, la dastara créera des Constitutions obèses, boulimiques de toutes les réalités sociales et culturelles, obsolètes sitôt installées.
Croire qu'une inflation constitutionnelle fonde la liberté, c'est demander à la quantité de pallier l'absence d'une conception forte et stricte de la chose publique. Une Constitution n'est pas un catalogue culturel, répertoriant la réalité d'une société donnée. Les penseurs politiques du XIXe siècle précisaient souvent constitution «politique», pour la distinguer de la culture et des traditions du pays, qui sont sa constitution «sociale». Vouloir indexer une Constitution politique, qui est une structure, sur la Constitution sociale, mouvante, c'est prendre le risque de changer de Constitution à chaque génération, au moins, et de diminuer sa crédibilité aux yeux des citoyens.
Les Constitutions pérennes sont lapidaires, peut-être même laconiques – lisez la Constitution américaine, qui date de 1787. Elles disent peu mais bien, pour laisser à la vie publique l'occasion de se développer autour de l'ossature des articles. La dastara, la constitutionnalisation, est en train d'installer dans les espaces publiques arabes en devenir trois croyances néfastes : faire de la Constitution un miroir de la société, son résumé encyclopédique là où elle doit lui fournir un cadre où prospérer ; noyer la question du pouvoir et de la souveraineté dans des considérations culturelles et sociales oiseuses, source potentielle de violences civiles ; habituer l'opinion à des Constitutions périodiques, donc peu crédibles, devant la permanence, l'éternité même, de l'ordre social. Pour se féliciter de l'octroi royal du 17 juin dernier, plusieurs observateurs congratulèrent les Marocains qui allaient bientôt disposer de l'une des meilleures Constitutions au monde, fruit d'un assemblage de pièces rares et d'importations derniers cri. On appela dans les années 1970 les «éléphants blancs» ces usines clé en main, ces infrastructures mirobolantes et inutiles, que plusieurs pays du Tiers-monde, forts de l'argent du pétrole ou du cacao, achetèrent pour meubler les jungles et les déserts. Ils y rouillent encore.
Beaucoup de pays arabes s'offriront dans les mois ou les années à venir de tels éléphants blancs politiques, rédigés dans le consensualisme le plus flou, le plus angélique, en espérant en faire un bouclier contre la gestion des inévitables rapports de force politiques.


Cliquez ici pour lire l'article depuis sa source.