CAN-2025 et CDM-2030 : une stratégie d'infrastructures et d'investissements conçue dans la continuité pour un héritage durable    5G au Maroc : Un train de retard pour une technologie sur le déclin ? [INTEGRAL]    Les prévisions du samedi 19 juillet    Morocco National Hackathon supports digitalization for four local NGOs    CAN féminine. Les Lionnes de l'Atlas vont en demi-finale    Programme "Moussalaha" : 390 détenus bénéficiaires    Yaoundé vibre avec les « Renaissance Music Awards »    Espagne : Un feu de forêt provoque un énorme nuage de fumée près de Madrid    « Le Monde » et l'art de blanchir les fugitifs : Mehdi Hijaouy, un imposteur promu martyr    Infrastructures sportives : Rabat et Tanger finalisent leurs stades avant la CAN 2025, cap sur le Mondial 2030    CAN (f) Maroc 24 : Les arbitres désignés pour les quarts de finale de ce vendredi    CAN féminine : le Nigéria surclasse la Zambie et file en demi-finales    Port Dakhla Atlantique : les travaux avancent à 40%    Pêche : Ouverture de la campagne estivale du poulpe après une phase de repos biologique (Secrétariat d'Etat)    Le président de la Chambre des conseillers reçoit une délégation de l'OLP    Brésil : l'ex-président Bolsonaro contraint au port d'un bracelet électronique, dénonce une « suprême humiliation »    Football : Le milieu de terrain marocain Neil El Aynaoui est sur le point de rejoindre l'AS Roma    El Jadida : un gardien de voitures tué pour avoir voulu empêcher une bagarre    Le Real Madrid étend son programme éducatif au Maroc pour la saison 2025-2026    Pose de la première pierre du projet de valorisation du site archéologique de Sejilmassa    La campagne chinoise « Voyage de la lumière » redonne la vue à des centaines de patients à Chefchaouen    Allemagne : Des Marocains condamnés pour des attaques à l'explosif contre des distributeurs automatiques    Fútbol: Gianni Infantino y Patrice Motsepe rinden homenaje a Ahmed Faras    Les relations avec le Maroc sont un "pilier" de la politique étrangère américaine (Directeur au Hudson Institute)    Médiateur du Royaume : 13.142 plaintes traitées en deux ans    Ferhat Mehenni honoré lors d'une prestigieuse cérémonie internationale à Paris    Peng Liyuan assiste à un événement sur l'amitié entre les jeunes chinois et américains    Deux hauts dignitaires catholiques à Gaza après la frappe contre une église    Les Marocains représentent 8,8 % des victimes de délits de haine recensées en Espagne en 2024    Data Centers au Maroc : comment ça marche ?    Bourse de Casablanca : ouverture en territoire négatif    Selon le prestigieux institut américain WINEP, «Alger pourrait contribuer à persuader le Polisario d'accepter un modèle négocié d'autonomie, la proposition marocaine servant de canevas»    Inauguration d'un Centre de Médecine Traditionnelle Chinoise à Mohammedia : L'Ambassade de Chine au Maroc renforce la coopération sanitaire entre Rabat et Pékin    Festival : Jazzablanca, un final éclatant de stars et de jeunes talents    Maroc/France: Les villes de Dakhla et Nice renforcent leur coopération    Talbi El Alami reçoit Jacob Zuma, ancien président d'Afrique du Sud    Aéronautique: Alphavest Capital et Boeing vont créer des centres d'excellence au Maroc    Décès d'Ahmed Faras : le président de la FIFA rend hommage à la carrière exceptionnelle d'une légende du football africain    El conflicto se intensifica entre la Unión Europea y Argelia    Le temps qu'il fera ce vendredi 18 juillet 2025    CHAN 2024 : Six arbitres marocains désignés    Mobile Payment : Al Barid Bank lance sa solution    Nadia Fettah: « Tous les partenaires sont convaincus de la nécessité d'une solution consensuelle »    L'Humeur : Timitar, cette bombe qui éclate mou    Summer Series Au Blast : Un été en live, au cœur de la ville ocre    Le ministère français de la Culture salue l'essor culturel du Maroc    Festival des Plages Maroc Telecom : Une soirée d'ouverture réussie à M'diq sous le signe de la fête et du partage    Temps'Danse fait rayonner le Maroc à la Coupe du monde de danse en Espagne    







Merci d'avoir signalé!
Cette image sera automatiquement bloquée après qu'elle soit signalée par plusieurs personnes.



Salim Jay : Quand Jamal Eddine Bencheikh écrivait «Rose noire sans parfum»
Publié dans Le Soir Echos le 26 - 05 - 2010

Né en 1930 à Casablanca, l'Algérien Jamal Eddine Bencheikh fut de ces grands professeurs qui ne craignent pas de se mesurer aux poètes et aux romanciers, comme en attestent ses recueils de poèmes et son roman «Rose noire sans parfum» (Stock, 1998). Il se révèle romancier plus convaincant que ne l'était le poète, assez pompeux.  Professeur de littérature arabe à la Sorbonne, Jamal Eddine Bencheikh fut ami de Jean Sénac et un essayiste fécond. «Rose noire sans parfum», récit accablant, se lit comme un poème oraculaire, une vertigineuse plongée dans l'histoire avec les armes du verbe le plus séducteur et de l'érudition la plus gourmande. 
Ce roman d'une sure originalité se donne comme «la chronique d'un vrai faux prophète». C'est un tapis de mots et d'idées tissé par une vie vouée à la connaissance des textes anciens. On y perçoit une réflexion discrètement désabusée sur les fourberies de la politique et les abus perpétrés au nom de la foi. 
Peignant les paysages de bataille qu'offre l'Histoire, Bencheikh raconte une sorte d'affolement universel par la pulsion de conquête. Son projet, le romancier l'explique clairement : «Dans les manuels apparaît donc un Arabe du nom de Ali, fils de Yahya, qui conduisit au neuvième siècle (de l'ère chrétienne) un soulèvement d'esclaves et coupa en deux l'immense empire de Bagdad. Chef d'une révolte, silencieux à jamais et qu'un Je va faire parler : première faille où je m'engouffre, pousse, m'acharne à passer, m'agrippant à ce corps sans vie».
L'acte de naissance de celui qui s'empare de la parole et du glaive ?  «Mère : Qurra, fille de Ali, fils de Muhammed, un Kharidjite de Koufa celui-là, qui se réfugia à Narzanîn. Père : Muhammed, fils de Abd ar-Rahim : Je me suis vu uriner en rêve, a-t-il dit, un jour avant que je naisse et mon urine a brûlé la moitié du monde».
Bencheikh ne veut jamais oublier qu'il est, lui, un homme du XXe siècle et il s'attache délibérément à manifester l'étrange rémanence entre ce qui se tramait jadis et ce qui se trame aujourd'hui : presque mêmes tourments, violences et turpitudes. Avec rigueur et vigueur, le romancier agit en poète, en historien, voire en pédagogue. Sa phrase est ample, à la fois enveloppante et nerveuse.
Rose noire sans parfum dresse le portrait d'un individu à la furie messianique. Cela vaut comme explicitation de la vanité totalitaire. La passion belliqueuse s'exerce sur fond de narcissisme vertigineux : «L'histoire se choisit et se prend, et puisque j'avais quelque chance d'être cru, je me crus d'abord moi-même. Dès lors que j'avais choisi d'être le sixième petit-fils du cousin et gendre du Prophète, je le fus».
L'anachronisme est une perspective qui n'intimide pas Bencheikh. Ainsi le Mahdi ose-t-il citer incidemment le romancier malien Yambo Ouologuem, l'auteur du «Devoir de violence» qui obtiendra, onze siècles plus tard, le prix Renaudot !
Le roman puise son charme dans le flux poétique qui s'y déverse à peine subrepticement tandis que la foi et l'épée, l'hystérie et la mégalomanie multiplient leurs cliquetis sous un ciel de menaces. Les tombes sitôt creusées, sitôt oubliées, envahissent les phrases. La terreur contemporaine et la terreur de jadis semblent adossées l'une à l'autre. «Rose noire sans parfum» affronte les séductions de la violence pour dénouer le fil du labyrinthe qui mène à l'auto-intoxication par le mal.  
Les califes, les rebelles, les mercenaires, les esclaves et les poètes passent dans Rose noire sans parfum et continuent longtemps de hanter le lecteur. Jamal Eddine Bencheikh installe dans son roman tous les flux de sa passion d'Arabie et d'Islam, laquelle passion connut son acmé dans la Bibliothèque de la Pléiade, où est publiée sa traduction des Mille et une nuits, co-signée avec André Miquel. Jamal Eddine Bencheikh n'avait jamais cessé de publier des essais savants. Ainsi, en 1998, «Les Mille et une nuits ou la parole prisonnière» (Gallimard), paru en même temps qu'il révélait, avec «Rose noire sans parfum», ses propres dons de conteur stimulant.


Cliquez ici pour lire l'article depuis sa source.