Invité de l'émission Yes We Can, Mouhamadou Youssifou, ambassadeur du Cameroun au Maroc et doyen du corps diplomatique africain accrédité à Rabat, a livré une lecture approfondie de cet événement qu'il qualifie de « plus grande fête populaire de l'Afrique » Pour le diplomate camerounais, la CAN est bien plus qu'une compétition sportive. Elle rassemble l'ensemble des nations africaines, qu'elles soient qualifiées ou non, et projette une image forte d'un continent uni. « Aujourd'hui, le Maroc est devenu la capitale de l'Afrique », observe-t-il, soulignant l'attention portée par les Africains et le reste du monde aux villes hôtes, de Rabat à Agadir, en passant par Casablanca, Tanger, Fès et Marrakech. La participation du Cameroun à cette édition nourrit un sentiment particulier de fierté. « Une CAN sans le Cameroun, ce n'est pas une CAN », rappelle l'ambassadeur, évoquant l'ancrage historique des Lions indomptables dans la compétition. Mais au-delà de l'enjeu sportif, il insiste sur l'atmosphère de convivialité et de fraternité qui règne au Maroc, où ressortissants africains, supporters et délégations partagent un même espace dans un esprit de respect et de communion. Des infrastructures qui élèvent le standard africain Sur le plan organisationnel, Mouhamadou Youssifou salue les investissements massifs réalisés par le Royaume. Vivant au Maroc depuis plus d'une décennie, il dit avoir été témoin de transformations profondes, tant en matière de qualité de vie que d'infrastructures sociales, routières, éducatives et sportives. La livraison de grands stades en un temps record, à Rabat comme dans les autres villes hôtes, illustre selon lui une capacité technique et organisationnelle de haut niveau. À ses yeux, le Maroc a placé la barre très haut sur le continent, établissant un nouveau standard pour l'organisation des grandes compétitions africaines. Une dynamique qu'il juge positive, car elle pousse les futurs pays hôtes à faire mieux que leurs prédécesseurs, dans une logique de progrès continu. Diplomate de carrière, Mouhamadou Youssifou revendique une conviction forte : le sport est aujourd'hui l'un des outils les plus efficaces de la diplomatie. « Les footballeurs ont parfois fait plus pour l'image de nos pays que des décennies d'action diplomatique », confie-t-il, rappelant que de nombreux Etats sont identifiés à l'international à travers leurs figures sportives. La CAN permet ainsi de braquer les projecteurs sur les potentialités économiques, humaines et culturelles des pays africains, tout en favorisant la coopération Sud-Sud. Selon lui, le sport crée un terrain neutre propice au dialogue, à la confiance et au codéveloppement. Intégration africaine : entre ambitions et obstacles Le doyen du corps diplomatique africain ne masque toutefois pas les défis persistants de l'intégration du continent. Problèmes de connectivité, faiblesse des échanges intra-africains, entraves à la libre circulation des personnes et des biens, contraintes sécuritaires : les obstacles sont nombreux. Il plaide pour la création de grands hubs africains, le développement des infrastructures routières et aériennes, et la réussite de la Zone de libre-échange continentale africaine (ZLECAf), appelée à faire passer les échanges intra-africains à un niveau plus significatif. Sur le plan politique, Mouhamadou Youssifou a réitéré le soutien constant du Cameroun à l'intégrité territoriale du Maroc. Il rappelle que son pays n'a jamais reconnu le Polisario et soutient la solution politique portée par le Royaume, notamment à travers l'initiative d'autonomie, jugée crédible et réaliste. Il estime par ailleurs que l'Union africaine est appelée à s'aligner sur le processus onusien, désormais central dans le règlement de ce dossier. Enfin, l'ambassadeur adresse un message direct à la jeunesse africaine, portée par la ferveur de la CAN. Il l'invite à croire en ses capacités, à investir dans l'éducation et à construire l'avenir du continent par elle-même. « Le sport est un levier, mais l'éducation est tout aussi essentielle », insiste-t-il, appelant à une Afrique confiante, pacifiée et intégrée. Son rêve est clair : une Afrique où l'on circule librement, où l'économie continentale prime sur les dépendances extérieures, et où le partage d'expériences, à l'image de ce que réalise le Maroc, devient un moteur de développement collectif. Une vision qui fait de la CAN 2025 bien plus qu'un tournoi : un symbole d'une Afrique qui se projette et avance.