Maroc - Algérie : Les chances de la Pax Americana [INTEGRAL]    Le SG de l'ONU enjoint au "polisario" de mettre fin à ses violations du cessez-le-feu    « Qahchuba » : le géant électrique des mers chinoises    Scandale politique en Algérie : la fuite d'un sénateur vers l'Espagne, signe d'un régime à bout de souffle ?    SM le Roi adresse un message de condoléances et de compassion aux membres de la famille de feu Mohamed Razin    Inauguration de l'Organisation internationale de la médiation à Hong Kong pour renforcer le droit international    CDM (f) U17 : Les Lioncelles QUALIFIEES pour les 8es !    Match test : Les Lionnes s'inclinent face à l'Ecosse    CAN Maroc 2025 : Les chaînes détentrices des droits de diffusion dévoilées    Mise en service de 49 nouveaux centres de santé dans 9 régions du Royaume (communiqué)    Port Nador West : Marsa Maroc et CMA CGM scellent un accord    La position du Kenya sur le Sahara balise la voie à une coopération maritime renforcée    Le Maroc parmi les pays intéressés par la plate-forme américaine HADES de renseignement aéroporté    Le Wydad de Casablanca surclasse Asante Kotoko et accède à la phase de poules de la Coupe de la confédération    Le Maroc et le Kenya approfondissent leur coopération maritime et logistique, Rabat soutient la candidature de Nairobi au Conseil de l'OMI    IFJ and SNPM demand review of Moroccan Press Council draft law    Morocco braces for escalating locust outbreak as FAO issues warning    Coupe du monde féminine U17 : La sélection nationale progresse au fil des matchs    Revue de presse de ce samedi 25 octobre 2025    La délégation de l'USFP en France conteste la légitimité des organes issus du onzième congrès national    Aéroports du Royaume: Plus de 23,9 millions de passagers accueillis en huit mois    Fonction publique: Près de 69.000 départs à la retraite prévus entre 2025 et 2029    Transport urbain: 1.000 nouveaux bus bientôt en circulation    Fatwa sur la Zakat: Le texte mis en ligne    Le Conseil supérieur des oulémas publie la fatwa sur la zakat après l'approbation royale    Médiateur du Royaume: L'accès à la plateforme MARFI9I ouvert aux usagers du «Pass Jeunes»    Domaine privé de l'Etat : 148 projets approuvés pour une superficie globale de 20.771 Ha au S1-2025    Le polisario dénonce le projet US sur le Sahara et menace de se retirer du processus politique    CAF Awards : le Maroc prépare une razzia    Province de Benslimane : l'INDH, moteur d'émancipation pour les femmes rurales    Energie : le pétrole bondit après les sanctions américaines sur deux groupes pétroliers russes    Académie des Arts : la Fondation Al Mada donne un nouvel élan à la jeunesse créative    Le Zimbabwe fait face à une montée inquiétante du crime    Limogeage de la directrice régionale de la Santé de Rabat-Salé-Kénitra (Source ministérielle)    « Croissance » : un voyage gospel entre ciel et terre    Tiflet accueille le Festival "NAFAS", un espace de dialogue et de créativité pour la jeunesse    Football : 50 ONG appellent Fouzi Lekjaa à intégrer l'amazigh    Sahara : le consensus autour du plan d'autonomie continue de se conforter    Téhéran étend méthodiquement son influence politique, économique et religieuse en Tunisie pour garantir un ancrage en Afrique du Nord alerte un rapport israélien    CAN 2025 : Voici le calendrier des Lions de l'Atlas dans le Groupe A    Hakim Ziyech rejoint officiellement le Wydad de Casablanca après son passage au Qatar    Le Maroc, "pays à l'honneur" du prochain EFM de Berlin    Bounou praises Lamine Yamal, says he still feels «like one of Morocco's own»    France : Le Maroc s'invite à l'Olympia pour les 50 ans de la Marche verte    Un documentaire néerlandais suit un étudiant marocain bloqué après avoir fui l'Ukraine    Mohammed VI exprime ses condoléances à la famille d'Abdelkader Moutaa    Météorologie : Le Maroc et la Finlande signent à Genève un mémorandum d'entente    Rubio affirme que les projets d'annexion d'Israël en Cisjordanie "menacent" la trêve à Gaza    







Merci d'avoir signalé!
Cette image sera automatiquement bloquée après qu'elle soit signalée par plusieurs personnes.



La Turquie cherche à occuper le vide arabe
Publié dans L'observateur du Maroc le 25 - 06 - 2010

Certains signes ont valeur de message politique. Il en est ainsi de la première et brève visite d'Amr Moussa, le secrétaire général de la Ligue Arabe, le 13 juin à Gaza. Soucieuse de ne pas y légitimer le pouvoir islamiste du Hamas, la Ligue Arabe s'était abstenue jusque là de toute visite et adoptait, comme d'ailleurs l'Egypte, une position ambiguë sur le blocus israélien: éviter de condamner trop fermement ce blocus censé isoler le Hamas tout en affichant sa solidarité avec les «frères palestiniens».
Cette position est devenue intenable quand il est apparu, lors de l'assaut meurtrier des forces israéliennes contre la flottille pour Gaza, que ceux qui manifestaient le plus bruyamment leur soutien étaient deux pays non arabes : l'Iran et la Turquie. Du coup l'Egypte a immédiatement levé son blocus de Gaza et Amr Moussa s'est décidé à y faire une brève apparition. Il y a cependant peu de chance que cela suffise à contrecarrer l'aura grandissante dans l'opinion arabe de Recep Tayyip Erdogan, le Premier ministre turc de l'AKP (islamique conservateur).
Sa virulence à l'égard d'Israël à l'occasion de ce raid est à l'origine de cette popularité. Ankara a rappelé immédiatement son ambassadeur en Israël, annulé des manœuvres militaires communes avec l'Etat hébreu, clamé son manque de «confiance» dans la Commission d'enquête créée par les Israéliens, exigeant des excuses et que celle-ci soit placée sous le contrôle direct des Nations Unies. Sous peine de «réexaminer ses relations avec Israël».
L'ambition du leadership régional
Cette radicalisation ne fait que consacrer un éloignement bien antérieur d'une Turquie gouvernée par l'AKP de son allié traditionnel israélien, alors que la relation entre les deux pays avait résisté à toutes les tempêtes depuis la signature de leur accord militaire en 1996. Si la surenchère verbale d'Ankara a atteint son paroxysme avec ce raid, les rapports israélo-turcs battaient de l'aile depuis l'offensive israélienne à Gaza en décembre 2008. Et l'initiative turco-brésilienne sur le nucléaire iranien a encore creusé le fossé en compliquant la stratégie de sanctions contre le régime de Téhéran.
Pourquoi cette réorientation de la diplomatie turque au détriment d'Israël ? Un siècle après la chute de l'empire ottoman, la Turquie, seul membre musulman de l'Alliance Atlantique, entend bien regagner de l'influence dans la région, voire en assumer le leadership. D'où son rôle d'intermédiaire en 2008 entre la Syrie et Israël, puis avec l'Iran. L'arrivée au pouvoir en 2002 des islamistes de l'AKP a aussi pesé, ces derniers surfant sur la radicalisation de l'opinion après l'invasion américaine de l'Irak et surtout l'offensive israélienne contre Gaza. L'AKP, soucieuse de séduire les couches les plus conservatrices du pays, a en outre compris l'intérêt politico-diplomatique qu'il avait à se distancer des Américains et plus encore d'Israël et à regarder vers l'Orient. Surtout quand les intérêts économiques incitent plus ce pays membre du G20, seizième économie mondiale forte d'un marché de 72 millions d'habitants à regarder vers son riche environnement proche-oriental qu'à jouer les «ponts» entre l'Orient et l'Occident.
Faire pression sur l'UE  
Ce repositionnement a été favorisé par les frustrations de la Turquie face à une Union Européenne où elle est candidate depuis… 1959 et qui lui ferme obstinément ses portes pour des raisons bien peu honorables : des préjugés culturels bien ancrés dans un vieux continent qui tend à se replier sur lui-même. Dans ce contexte, la réorientation de la diplomatie turque est aussi un moyen de faire pression sur l'UE (qui représente encore 60% des échanges de la Turquie). Car de l'aveu même du président Abdullah Gül, l'adhésion à l'UE demeure un objectif fondamental d'Ankara. D'où l'appel lancé aux Européens de «ne pas créer de problèmes là où il n'y en a pas».
C'est là le paradoxe d'une situation plus complexe qu'il n'y paraît. Il est vrai que l'évolution du gouvernement de l'AKP préoccupe les Européens et les Américains au point que la revue Foreign Policy note qu'un nouveau terme désigne la nature de la relation entre la Turquie et les Etats-Unis : «Frenemy», contraction de «Friend and ennemy», soit «ami et ennemi»! Mais il est tout aussi vrai que la colère de la rue a été moins massive qu'attendue après l'assaut contre la flottille pour Gaza, qu'Ankara ne sort pas de l'Otan, ne s'est pas opposé à l'entrée d'Israël dans l'OCDE, n'a pas non plus rompu ses relations avec l'Etat hébreu, demeure candidate à l'adhésion à l'UE, mais ambitionne d'être la grande puissance de la région.
Méfiance anti-turque
La popularité de Erdogan dans les opinions arabes, ajoutée à une diplomatie et une économie très dynamiques, ne peut qu'y aider. D'autant qu'une étude réalisée dans sept pays arabes montre que la Turquie est le pays musulman le plus apprécié dans le monde arabe : 63% des sondés estiment même qu'elle a réussi une «bonne combinaison entre islam et démocratie».
C'est l'inverse de ce qu'il se passe dans l'Iran de Mahmoud Ahmadinejad. La détermination du président iranien à «ne pas laisser l'arme nucléaire aux seules grandes puissances et à Israël» lui assure également une belle popularité dans les opinions arabes. Mais il est aussi souvent perçu comme dangereux par des secteurs plus «modérés» excédés par l'inaction de leurs dirigeants mais n'approuvant pas pour autant ses positions ultra-radicales et ultra-conservatrices. Une situation idéale pour Erdogan puisqu'elle lui permet de concurrencer l'Iran dans sa volonté de leadership au Proche-Orient et de remplir le vide laissé par les dirigeants des pays arabes modérés.
Mais ce type d'«ingérence» a aussi ses limites : n'être pas populaire dans les Etats arabes voisins. Tous ont en effet peur de leurs oppositions islamistes et n'ont aucune envie de voir le radicalisme de Recep Tayyip Erdogan venir les conforter. Autant dire que la voie est étroite entre une ambition de leadership régional rendue possible notamment par le déclin de l'Egypte de Hosni Moubarak et le danger de rallumer la vieille méfiance arabe antiturque et antiottomane.


Cliquez ici pour lire l'article depuis sa source.