Maroc : Le gouvernement Akhannouch temporise la réforme des retraites    Détournements de fonds au consulat marocain à Dubaï : le principal suspect arrêté    Procédure civile : le texte recadré par la Cour arrive au Parlement    Sahara : de Laâyoune à Fès, la société civile trace un nouvel axe de plaidoyer    Plan d'autonomie marocain : L'événement diplomatique le plus marquant du monde arabe en 2025    Nadia Fettah Alaoui : « Les investissements marocains en Afrique ont atteint 5 milliards de dirhams en 2024 »    Visas : le Burkina Faso impose la réciprocité aux ressortissants américains    Tebboune : «Nous ne sommes pas Sahraouis plus que les Sahraouis»    La croissance économique au Maroc a ralenti au cours du troisième trimestre de 2025    Phosphates et dérivés : plus de 87,14 MMDH d'exportations à fin novembre    Bilan 2025. Mohamed El Jaouadi: « Dans le secteur maritime, le Maroc confirme son statut de hub continental »    Aide sociale directe : 49 MMDH mobilisés depuis le lancement du dispositif    Digitalisation des procédures : Bank Al-Maghrib lance la gestion dématérialisée des contrats d'achats    La DGI publie l'édition 2026 du Code général des impôts    CMGP Group retenu pour la réalisation du réseau de distribution hydraulique du projet hydroagricole de Saïss    La Bourse de Casablanca termine dans le vert    Guinée : Mamadi Doumbouya remporte de la présidentielle    Bœuf importé : la Chine enclenche un virage protectionniste calculé    La Bulgarie, membre de la zone euro à compter du 1er janvier    Une ressortissante portugaise condamnée pour homicide serait en cavale au Maroc    Verdicts à Marrakech : peines de prison pour les émeutiers de Génération Z    CAN 2025 : Les 16 équipes qualifiées pour les huitièmes de finale    Bodom Matungulu : "La CAN est un bon accélérateur de la coopération Sud-Sud"    CAN 2025 au Maroc : les Lions de l'Atlas fixés sur la Tanzanie pour les huitièmes    ONDA: La ferveur de la CAN s'empare des aéroports du Royaume    CAN au Maroc : Au total, 118 personnes ont été arrêtées pour revente illégale de billets    Bulletin d'alerte : Rafales de vent localement fortes vendredi dans plusieurs provinces    Modèle des Groupements sanitaires territoriaux : Des indicateurs positifs à plusieurs égards    Casablanca : poursuites contre deux mineurs pour avoir arraché le drapeau de l'Algérie, pays participant à la CAN    Elias Al-Malki bénéficiera d'une peine alternative avec 900 heures de service communautaire    Brigitte Bordeaux - Brigitte Bardot    Musique et arts de la scène : 56 projets soutenus au titre de la 2e session de 2025    Madonna choisit Marrakech pour une escapade en famille    Prix sportifs : la FIFA met fin aux trophées The Best    Yémen : les Émirats mettent fin aux missions de leurs dernières unités antiterroristes    Premier League : la J19 à cheval sur 2025 et 2026    Avec Nedjim Bouizoul, tout va Labess!    Institut de l'UNESCO pour l'apprentissage tout au long de la vie : le Maroc élu à la tête du Conseil d'administration    Mondial 2026 : 250 millions de dollars pour sécuriser l'espace aérien américain    Gaza : la France appelle, avec une coalition internationale, à lever les entraves à l'aide humanitaire    CAN 2025 : les Lions de l'Atlas entrent en mode conquête    Main-d'œuvre : les Baléares recrutent des chauffeurs au Maroc    Pluies, neige et oubli : Chronique d'un pays à deux vitesses    Marrakech : l'exposition « Mohammed Ben Allal, récits du quotidien » au musée Jamaâ el-Fna    CAN 2025 : Marrakech vue de l'Ouganda    Heirs of Greatness Day célèbre l'artisanat d'excellence africain    Les Émirats refusent d'être impliqués dans les événements en cours au Yémen    Malgré les stéréotypes, le darija gagne en popularité parmi les apprenants étrangers de l'arabe    







Merci d'avoir signalé!
Cette image sera automatiquement bloquée après qu'elle soit signalée par plusieurs personnes.



Interview avec Saïd El Abadi : « L'organisation de la CAN au Maroc ouvre une nouvelle ère pour le sport africain »
Publié dans L'opinion le 31 - 12 - 2025

À l'occasion de la sortie de son ouvrage "L'Histoire du football africain", le journaliste Saïd El Abadi livre une analyse sans concession sur l'évolution du ballon rond sur le continent. Rencontre avec un témoin privilégié qui appelle à une décolonisation des regards.
- Vous avez récemment publié votre ouvrage intitulé "L'Histoire du football africain" (octobre 2025). Cet ouvrage est-il né d'une volonté de déconstruire certains clichés occidentaux sur le football africain ?
- Dans un premier temps, j'avais l'envie de transmettre l'Histoire africaine aux personnes qui ne connaissent pas forcément leur Histoire, que ce soit sur le continent ou dans les diasporas. C'est important de ne pas oublier ce qu'il y a eu auparavant. Et évidemment, oui, l'idée était aussi de mettre un terme à ses clichés en se réappropriant notre Histoire. Il y a souvent ce problème de «paternalisme» de la part de l'Europe vis-à-vis de l'Afrique qui perdure. On apprécie le foot africain mais on a encore trop souvent cette tendance à le réduire au folklore et à de simples exploits. Exemple, en Coupe du Monde, on ne dit jamais qu'un Africain peut gagner. Et lorsqu'il y a une belle épopée, on en parle comme si c'était un petit poucet en Coupe de France. Pareil concernant le style de jeu africain qui ne serait que physique en Afrique subsaharienne ou fait de dribbleurs au Maghreb et que le seul moyen de les faire évoluer était d'amener un "Sorcier Blanc". Si pour des Hervé Renard et Bruno Metsu (paix à son âme), cela était plus du symbolique, l'idée du sauveur européen s'est un peu trop développée. Il est donc important de montrer que l'Afrique sait travailler d'elle-même avec ses talents. Autre exemple, lorsque la CAN approche, dans beaucoup de médias, on va évoquer les surnoms des équipes et les danses, etc. Mais le côté tactique n'arrive qu'après. Quand on parle de l'Euro, on ne procède pas ainsi. Il faut que les mentalités changent et respecter l'Afrique.
- Dans votre livre, vous parlez souvent de la transition entre la "passion pure" et les enjeux de "business". Selon vous, le football africain a-t-il réussi ce virage professionnel sans y perdre son âme ?
- C'est tout le pari du continent, aller de l'avant tout en conservant son originalité et son âme. Il y parvient au fur et à mesure. Le Maroc en est l'exemple parfait avec son développement exceptionnel en termes d'infrastructures, de formations et de détections. Les investissements sont nombreux et sont réussis. D'autres suivent comme le Sénégal. Ce n'est pas facile du tout car l'Afrique ne doit pas se dénaturer, mais globalement tous les acteurs du sport et de l'économie semblent enfin avoir une voix unique ces dernières années pour avancer dans ce chemin. Ce n'est que positif.
- Beaucoup de talents partent très jeunes pour l'Europe. Quelle est la clé pour que les académies locales deviennent la norme plutôt que l'exception ?
- Prenons l'exemple du Maroc, l'objectif est d'arriver un jour à 50-60% de joueurs formés localement dans la sélection A. C'est ce qui est entrepris ces dernières années chez les hommes et les femmes. Il y a une détection et une formation qui sont parfaitement effectuées. Et ce n'est pas tout puisque le Maroc forme aussi ses entraîneurs et ses techniciens. Et les résultats portent leurs fruits. Maintenant, la clé, c'est la continuité et l'encadrement. Il faut que cela perdure. Il convient de ne pas relâcher les efforts et de mettre les moyens humains et financiers pour continuer. C'est l'unique clé.
- Quel regard portez-vous sur l'organisation de la CAN 2025 au Maroc ? Est-ce là le nouveau gisement de croissance pour le sport africain ?
- La barre a été mise très haute de la part du Maroc, qui prouve qu'il est une véritable locomotive du continent. Cette organisation, avec des stades de dernière génération, a fait rougir de nombreux pays dans le monde entier, des complexes hôteliers de qualité et une expérience fan géniale avec des fan zones superbes, et va ouvrir la porte à une nouvelle ère du football et du sport africains. Avec les Jeux olympiques de la jeunesse l'an prochain au Sénégal et la Coupe du Monde 2030, sans oublier l'organisation de la BAL (Basket African League), l'Afrique prouve qu'elle est en pleine croissance dans ce secteur.
- Selon vous, le "modèle marocain" est-il exportable sur le continent ?
- Il est partiellement exportable en Afrique, on peut dire. Pourquoi ? Il repose sur une vision à long terme, des infrastructures modernes et une politique de formation efficace, qui peuvent inspirer d'autres pays africains. Mais il nécessite des moyens financiers importants et une stabilité institutionnelle. On peut plutôt parler d'un modèle d'inspiration que d'un modèle exportable.
- En quoi l'organisation conjointe du Mondial 2030 avec l'Espagne et le Portugal est-elle, selon vous, l'aboutissement d'une véritable "diplomatie sportive" marocaine entamée il y a plus d'une décennie ?
- La diplomatie par le sport est une donnée que les Occidentaux ont énormément utilisée depuis plus de 50 ans. Cela n'a jamais été le cas, ou rarement, en Afrique. Le Maroc a très bien compris l'importance de ses passerelles entre les pays. Et c'est à merveille que cela a abouti à l'organisation conjointe de la Coupe du Monde. Elle prouve que l'on peut ressouder les liens diplomatiques à travers le sport. Depuis plus d'une décennie, le Maroc a investi dans des infrastructures sportives modernes, renforcé sa présence dans les instances du football africain et international, et multiplié les partenariats sportifs avec l'Europe et l'Afrique. Les performances sportives récentes, notamment en Coupe du Monde 2022, ont aussi renforcé sa crédibilité. Le soft power, ou sportocratie, est un élément stratégique qui permet le rayonnement international. Et tout le monde l'utilise depuis la nuit des temps dans le monde. Et le Royaume a compris son importance.
- Par ailleurs, comment le traitement médiatique du football africain a-t-il évolué depuis vos débuts ?
- À mes débuts, il était trop souvent résumé par des clichés (manque de discipline, folklore dans les tribunes, surnoms des sélections...) et peu couvert hors des grandes compétitions. Il y a encore en Europe ces sujets (notamment celui sur les surnoms) mais aujourd'hui, il est plus analysé et valorisé. On parle tactique, formation, projets fédéraux et de performances internationales. Les succès récents des sélections africaines, l'émergence de joueurs de classe mondiale et les infrastructures marocaines notamment ont contribué à donner au football africain une visibilité plus respectueuse et plus professionnelle, même si certains stéréotypes persistent encore...
Portrait
Saïd El Abadi, un archiviste de la passion africaine
Journaliste au carrefour de deux rives, Saïd El Abadi ne se contente pas de commenter les scores, il analyse les trajectoires d'un continent. Visage bien connu du groupe Canal+ en France et voix écoutée sur les ondes de nombreuses radios, émissions et podcasts consacrés au football, à la culture et à la diaspora, il incarne cette nouvelle génération de reporters qui refusent de dissocier le sport de la sociologie et de l'Histoire.
D'origine franco-marocaine, Saïd El Abadi puise dans sa double culture une sensibilité particulière. Son regard est celui d'un observateur capable de comprendre les codes européens tout en vibrant pour les réalités africaines.
Avec la publication de son premier ouvrage, "L'Histoire du football africain", ce jeune de 39 ans quitte le direct et l'immédiateté de l'actualité pour s'immerger dans le temps long. Sa mission est claire : documenter la dimension tactique, la rigueur institutionnelle et la capacité du continent à produire ses propres techniciens et cadres.


Cliquez ici pour lire l'article depuis sa source.