À Madrid, lors du forum économique « Maroc-Espagne : investir ensemble dans un avenir durable », le ministre de l'Investissement, de la Convergence et de l'Evaluation des politiques publiques, Karim Zidane a livré une vision du Royaume : celle d'un carrefour stratégique fondé sur la stabilité, l'ouverture commerciale et des incitations fiscales audacieuses. Exit la déclaration du ministre, le Maroc affine sa politique d'attractivité pour se positionner comme un hub incontournable entre l'Europe, l'Afrique et les Amériques. La pierre angulaire de cette ambition réside dans la nouvelle charte de l'investissement, entrée en vigueur fin 2022. Elle marque une inflexion majeure dans la politique publique en matière d'attractivité économique. Le texte, salué par les milieux d'affaires, accorde une place de choix aux incitations fiscales, pouvant aller jusqu'à 30 % d'allègements selon les régions ou les secteurs ciblés. Le Maroc propose ainsi des subventions directes, des exonérations fiscales étendues, mais aussi un cadre normatif plus prévisible, garantissant l'équité entre investisseurs nationaux et internationaux. Le tout, articulé autour d'une politique de décentralisation de l'investissement vers les zones à fort potentiel mais encore sous-développées. Cette orientation répond à une logique de compétitivité et de diversification, dans un pays qui ambitionne de faire des investissements étrangers un levier majeur de sa croissance et de son industrialisation. Le nouveau dispositif vise aussi à positionner le Royaume comme alternative crédible dans la dynamique actuelle de relocalisation industrielle. La stratégie marocaine repose également sur un ancrage géopolitique singulier, entre l'Europe et l'Afrique, avec des passerelles solides vers les marchés américain et européen grâce à ses accords de libre-échange. Le Maroc est en effet le seul pays d'Afrique à bénéficier d'un accès préférentiel à la fois aux marchés de l'Union européenne et des Etats-Unis, un privilège que ne partagent que huit autres Etats dans le monde. Ce statut permet aux multinationales installées au Maroc d'exporter sans barrières vers les deux plus grandes zones économiques de la planète, consolidant ainsi son rôle de plateforme logistique et commerciale intercontinentale. À cela s'ajoutent des infrastructures de rang mondial, notamment le port Tanger Med – l'un des plus performants au monde –, un réseau autoroutier étendu, et des lignes ferroviaires à grande vitesse. Autant d'atouts qui renforcent l'attrait du Royaume dans la compétition internationale pour les investissements directs étrangers (IDE). Lire aussi : Maroc-Finlande : Une délégation d'entreprises finlandaises en visite officielle à Rabat Des secteurs porteurs en pleine mutation L'architecture sectorielle de la stratégie d'investissement marocaine est également en profonde mutation. L'industrie automobile, désormais premier secteur exportateur, s'impose comme une success story avec Renault, Stellantis et plus de 250 équipementiers implantés dans le pays. De même, l'aéronautique, l'agroalimentaire, la pharmacie, le textile et les services numériques bénéficient d'un soutien renforcé. Mais c'est surtout sur les filières d'avenir que Rabat mise désormais : l'hydrogène vert, les énergies renouvelables, l'économie circulaire et la digitalisation. À titre d'exemple, le complexe solaire Noor à Ouarzazate symbolise cette transition vers un mix énergétique plus durable. En 2024, près de 40 % de la production électrique nationale provenait du solaire et de l'éolien, un ratio qui devrait continuer à croître avec les nouveaux projets en cours. La diplomatie économique marocaine s'appuie également sur une stratégie de soft power. L'organisation conjointe de la Coupe d'Afrique des Nations en 2025 puis de la Coupe du monde 2030 avec l'Espagne et le Portugal est perçue comme une vitrine d'attractivité exceptionnelle. Ces événements devraient catalyser les investissements dans les infrastructures, le tourisme, l'hôtellerie et les services urbains, tout en renforçant la notoriété du Maroc sur la scène internationale. « C'est le moment d'investir avec l'Espagne », a insisté le ministre Karim Zidane, appelant à transformer l'excellence des relations bilatérales en un partenariat économique élargi. Dans cette perspective, le rapprochement stratégique entre Rabat et Madrid revêt une importance particulière. L'Espagne, premier partenaire commercial du Maroc depuis plus d'une décennie, reste encore en retrait sur le plan des investissements. Les autorités marocaines entendent inverser cette tendance. Pour le ministre, « une fenêtre d'opportunité s'est ouverte, qu'il faut saisir maintenant ». Cette dynamique bilatérale, nourrie par la confiance politique retrouvée, pourrait bien devenir l'un des piliers de la reconfiguration des chaînes de valeur en Méditerranée occidentale.