Face aux mutations profondes de l'économie mondiale, le Maroc affirme son ambition industrielle en s'appuyant sur trois secteurs clés : l'automobile, l'aéronautique durable et les énergies renouvelables. Ces filières stratégiques, portées par l'innovation et la transition écologique, dessinent un modèle de développement résolument tourné vers 2030, visant à renforcer la souveraineté, la compétitivité et la création d'emplois qualifiés. Alors que l'économie mondiale entame une profonde mutation, tirée par l'innovation et les impératifs de durabilité, le Maroc trace sa propre voie industrielle. Trois secteurs se distinguent par leur dynamisme et leur potentiel stratégique : l'automobile, l'aéronautique durable et les énergies renouvelables. À l'horizon 2030, ils pourraient bien incarner les piliers d'un nouveau modèle industriel marocain, résolument tourné vers l'avenir. Dans un secteur aérien mondial soumis à des objectifs climatiques de plus en plus stricts, les carburants d'aviation durables (SAF – Sustainable Aviation Fuels) suscitent un intérêt croissant. En trois ans seulement, leur production a bondi de 1 150 %. Pourtant, en 2024, ils ne représentaient encore que 0,3 % de l'offre globale en kérosène. Un paradoxe révélateur des obstacles encore à franchir. Selon une enquête du Boston Consulting Group (BCG), menée auprès de 500 professionnels du secteur, le frein principal reste le coût élevé de production. Si 80 % des entreprises interrogées se disent optimistes quant à leurs objectifs SAF à l'horizon 2030, seules 14 % sont prêtes à s'engager dès maintenant. Lire aussi : Industrie pharmaceutique : Le Maroc, nouveau hub africain Un terrain sur lequel le Maroc pourrait jouer un rôle décisif. Grâce à ses ressources abondantes en énergies renouvelables, à des infrastructures aéroportuaires modernes et à une position géographique stratégique, le Royaume ambitionne de devenir un futur hub régional pour la production de SAF. Miser aujourd'hui sur les carburants durables, c'est investir dans la souveraineté énergétique, la croissance verte et l'emploi qualifié. Mais entre ambition et réalisation, un saut reste à faire. BCG recommande la mise en place de projets pilotes connectés aux grands hubs logistiques, d'un cadre incitatif ainsi que la mobilisation conjointe des pouvoirs publics, des énergéticiens, des transporteurs et des investisseurs. D'autant que l'Union européenne s'apprête à rendre progressivement obligatoire l'usage de ces carburants. Le moment est donc stratégique. Premier exportateur industriel du pays, le secteur automobile marocain est une véritable success-story. Avec plus de 500 000 véhicules produits chaque année, principalement dans les usines Renault de Tanger et Stellantis à Kénitra, le Maroc s'impose comme un acteur-clé sur les marchés européen et africain. Mais l'histoire ne s'arrête pas là. Le ministre de l'Industrie et du Commerce, M. Ryad Mezzour, fixe la barre haut : atteindre entre 1,3 et 1,4 million de véhicules produits à l'horizon 2026-2028, pour culminer à 2 millions à l'horizon 2030. Un doublement de la production en moins d'une décennie. Pour réussir ce pari, un levier s'impose : l'intégration locale. Aujourd'hui encore, une large partie des composants sont importés. Or, produire localement les moteurs, boîtes de vitesses, pneumatiques et autres pièces stratégiques permettrait de capter davantage de valeur et de renforcer la souveraineté industrielle. À cela s'ajoute la transition vers l'électromobilité, qui ouvre la voie à la fabrication de batteries, de nouveaux composants électroniques et au déploiement d'infrastructures de recharge sur l'ensemble du territoire. Le Maroc n'a pas attendu la crise énergétique mondiale pour faire le pari du renouvelable. Depuis plus d'une décennie, le Royaume investit massivement dans le solaire, l'éolien et, plus récemment, l'hydrogène vert. L'objectif est clair : atteindre 52 % de la production électrique à partir d'énergies propres d'ici 2030. La centrale solaire Noor Ouarzazate, l'une des plus grandes au monde, incarne cette ambition. Mais c'est surtout l'hydrogène vert qui suscite aujourd'hui les plus grandes attentes. En 2023, plusieurs partenariats stratégiques ont été noués avec l'Allemagne et la France, pour faire du Maroc un fournisseur majeur de cette énergie vers l'Europe. Les défis ne manquent pas : infrastructures coûteuses, régulation encore embryonnaire, besoin de compétences spécialisées. Mais les opportunités, elles, sont immenses. La transition énergétique n'est pas qu'un impératif climatique : elle est aussi un vecteur de souveraineté, d'emploi qualifié et de compétitivité industrielle. Au-delà de ces trois piliers, d'autres secteurs accompagnent la transformation du paysage industriel marocain. Le numérique, d'abord, avec un écosystème de startups en plein essor, notamment dans la fintech, l'e-commerce et l'intelligence artificielle. Des zones d'accélération industrielle, comme celle de Casablanca, attirent désormais des entreprises digitales à fort potentiel. L'immobilier, ensuite, connaît une dynamique soutenue, stimulée par le programme d'aide au logement 2024-2028. Mais là aussi, la tendance est à la transition : l'éco-construction, les matériaux biosourcés et la performance énergétique s'imposent progressivement comme les nouveaux standards.