Le secteur industriel marocain fait montre d'une résilience notable, selon les dernières enquêtes de conjoncture publiées par le Haut-Commissariat au Plan (HCP). Dans sa note de juin 2025, le HCP souligne que les entreprises de l'industrie manufacturière anticipent, au deuxième trimestre, une augmentation de leur niveau de production. Cette dynamique serait portée principalement par les performances des branches de l'« industrie automobile », de l'« industrie chimique » et de l'« industrie alimentaire ». Ces secteurs apparaissent ainsi comme des piliers de la reprise industrielle, dans un contexte marqué par la poursuite des efforts de modernisation et d'intégration des filières productives. Si la production affiche des perspectives haussières, les effectifs employés devraient, quant à eux, connaître une stabilité, signe que la confiance des industriels reste teintée de prudence. Par ailleurs, la situation des carnets de commandes demeure jugée « normale » par les chefs d'entreprise interrogés, traduisant un retour progressif à la demande sur les marchés intérieurs et extérieurs. Cependant, le HCP pointe toujours certaines fragilités structurelles. Les tensions sur les approvisionnements, les fluctuations des prix des matières premières et les contraintes logistiques continuent de peser sur la capacité des entreprises à exploiter pleinement leurs capacités productives. Le taux d'utilisation des capacités dans l'industrie manufacturière reste ainsi limité à 74 %, un niveau qui, bien qu'en hausse, trahit encore les marges de progression à consolider. C'est dans ce climat contrasté que le gouvernement entend donner un nouvel élan au secteur industriel. Lors de la séance des questions orales à la Chambre des représentants, le ministre de l'Industrie et du Commerce, Ryad Mezzour, a dévoilé un plan ambitieux : le montant total des investissements destinés aux projets industriels s'élève à 126 milliards de dirhams (MMDH). Dans ce portefeuille, 95 MMDH sont affectés aux initiatives de substitution des importations, tandis que 96 MMDH seront déployés pour soutenir les exportations, a-t-il précisé. Lire aussi : Industrie et construction : des signes de reprise contrastés au deuxième trimestre 2025 Au-delà des chiffres, l'impact social de cette dynamique apparaît considérable. Le ministre a ainsi annoncé la création de plus de 177.000 postes d'emplois directs, traduisant l'ambition de faire de l'industrie un moteur de développement inclusif et durable. Cette approche s'inscrit dans la volonté du gouvernement de renforcer la compétitivité nationale et de réduire la dépendance vis-à-vis des importations, tout en consolidant les parts de marché à l'export. Parmi les filières les plus dynamiques, l'industrie alimentaire occupe une place de choix. Selon M. Mezzour, cette branche se distingue par son potentiel d'implantation dans toutes les régions du Royaume et par sa contribution à la sécurité alimentaire du pays. L'enveloppe d'investissement dédiée à ce secteur atteint 19 MMDH, et devrait permettre la création de 750.000 emplois directs, un chiffre particulièrement significatif pour un secteur qui se concentre sur la transformation de produits agricoles locaux et la satisfaction de la demande intérieure. Le ministre a également rappelé que près de 200 entreprises opèrent déjà dans les industries alimentaires, sur un total de 13.000 entreprises industrielles actives. Ces entreprises génèrent un chiffre d'affaires annuel de 185 MMDH et des exportations de 43 MMDH, contribuant ainsi de manière décisive au chiffre d'affaires global de l'industrie marocaine, estimé à 800 MMDH. En parallèle, le gouvernement poursuit ses efforts pour fluidifier l'investissement industriel. Lors du dernier Conseil de gouvernement, trois nouveaux décrets ont été adoptés afin de simplifier les procédures administratives et de lever les obstacles bureaucratiques qui freinent encore les initiatives entrepreneuriales. Ces mesures devraient permettre un accès plus fluide aux opportunités d'investissement et un meilleur accompagnement des porteurs de projets, en phase avec les ambitions nationales de réindustrialisation. Ainsi, les données du HCP, croisées avec les annonces de Ryad Mezzour, traduisent l'ampleur d'une relance industrielle qui entend dépasser les seules fluctuations conjoncturelles pour s'inscrire dans une dynamique de long terme. Si les tensions sur les approvisionnements et les défis liés à la compétitivité restent des préoccupations majeures, la volonté affichée de réorganiser les filières, d'accroître l'intégration locale et de renforcer les exportations laisse entrevoir un secteur industriel en mutation profonde, appelé à jouer un rôle stratégique dans la consolidation de l'économie nationale.