Face au recul de la natalité et à l'essor de modèles sociétaux importés, l'ancien ministre Aziz Rabbah appelle à un sursaut national pour placer la famille au cœur des politiques publiques, estimant que l'immigration ne saurait pallier un déclin démographique. Au moment où l'indice de fécondité marocain passe durablement sous le seuil de renouvellement des générations, la question démographique s'installe au cœur du débat politique. L'ancien ministre de l'Energie et ex-figure du Parti de la justice et du développement (PJD), Aziz Rabbah, a lancé un appel à « une mobilisation nationale totale » pour enrayer ce qu'il qualifie de « crise silencieuse » de la natalité. Selon lui, l'immigration, parfois envisagée dans d'autres pays comme solution de court terme, ne saurait constituer pour le Maroc une réponse viable. S'inscrivant dans le sillage des orientations royales en matière de cohésion sociale, l'ancien responsable propose un arsenal de réformes mêlant législation, régulation des médias et politiques sociales. Il appelle notamment à criminaliser tout discours dévalorisant le mariage ou la famille, à combattre les stéréotypes nuisant à l'image morale des Marocains, et à interdire la promotion du divorce ou des contenus susceptibles de fragiliser les couples. Il souhaite aussi faire de la famille un axe prioritaire dans l'éducation, les médias et la production culturelle, développer la médiation conjugale, encadrer les réseaux sociaux et suspendre le financement public de contenus jugés « anti-familiaux ». Lire aussi : Le déclin de la fécondité met en péril la prospérité des générations futures dans les pays de l'OCDE Sur le plan économique, il plaide pour un dispositif massif d'aides financières aux familles, destiné à soutenir l'éducation et l'épanouissement des enfants. « Détruire une famille est plus grave que vandaliser un bien public », martèle-t-il, citant les expériences étrangères pour illustrer la faisabilité de telles politiques. La France a, depuis plusieurs décennies, mis en place un système d'allocations familiales et d'incitations fiscales qui figure parmi les plus généreux d'Europe, combinant prestations directes, réduction d'impôts et soutien à la garde d'enfants. Ce modèle, bien qu'ayant permis de maintenir un indice de fécondité autour de 1,8 enfant par femme — l'un des plus élevés du continent —, reste insuffisant pour atteindre le seuil de renouvellement. En Europe centrale, la Hongrie a adopté, sous le gouvernement de Viktor Orbán, une politique nataliste offensive. Celle-ci inclut l'exonération d'impôt à vie pour les mères de quatre enfants, des prêts immobiliers partiellement annulés en fonction du nombre de naissances et un réseau d'infrastructures de garde à faible coût. Les résultats sont tangibles mais limités : le taux de fécondité est passé de 1,25 en 2010 à environ 1,6 en 2023, sans pour autant inverser le vieillissement de la population. À l'autre extrémité du spectre, le Japon illustre les limites des politiques démographiques lorsqu'elles interviennent tardivement. Malgré des aides financières, des subventions au logement et des réformes du marché du travail pour faciliter la parentalité, l'indice de fécondité nippon reste figé à 1,26 enfant par femme, avec une population en déclin depuis 2008. Les raisons tiennent à des facteurs socioculturels profonds : retards dans l'âge du mariage, coût de l'éducation, et changements dans les aspirations individuelles. L'exemple de ces trois pays confirme que les mesures financières seules ne suffisent pas, et doivent s'accompagner d'une transformation culturelle. Le Maroc, où l'indice de fécondité est passé de 7 enfants par femme en 1962 à 2,19 en 2024, pourrait descendre sous 1,8 d'ici 2050, selon le Haut-Commissariat au Plan. Cette évolution, conjuguée à un allongement de l'espérance de vie, exercerait une pression croissante sur les systèmes de retraite et de santé. Cependant, le Royaume a les moyens de redonner à la famille la place qu'elle mérite et d'assurer ainsi la continuité de son identité à travers les générations, le pays doit tirer les leçons des réussites partielles de la France et de la Hongrie, tout en évitant les impasses observées au Japon.