L'australien Royal Road Minerals fore 1 000 mètres à Lalla Aziza et révèle une continuité cuprifère exploitable    L'Inde conclut de nouveaux accords d'approvisionnement en phosphates avec le Maroc et l'Arabie saoudite    Le barrage de Sakia El Hamra atteint 83 % de réalisation, selon l'Agence du bassin hydraulique    En Couv'. Nouveau modèle de l'enseignement : Les contours de l'école publique de demain    Dessalement : OCP lance le pipeline Jorf-Khouribga    Sa Majesté le Roi félicite le Président français à l'occasion de la fête nationale de son pays    Agadir : Le wali Amzazi recadre la gestion des plages    TGR : Les recettes douanières en hausse de 8% à fin juin    Championnat féminin de la CAF : face aux provocations puériles, le Maroc digne et droit dans ses bottes    Benguérir : éclaircissements après l'arrestation de deux frères pour ivresse, outrage et vandalisme devant un commissariat    Un séisme ressenti au Maroc après une secousse de magnitude 5,5 au large de Cabo de Palos    Le Maroc accorde soixante bourses d'études à des étudiants équatoriens dans le sillage du rapprochement diplomatique    José Manuel Albares : «Madrid et Rabat s'étaient entendus sur un dispositif pour suspendre temporairement le transit de marchandises lorsque la fluidité du passage des voyageurs l'exige»    Le Maroc engage des négociations avec trois groupes émiratis pour édifier des parcs éoliens dans la région du Sahara    Le souverain chérifien se félicite du «partenariat d'exception renforcé» entre Rabat et Paris dans un message adressé au président Emmanuel Macron    Maroc Telecom célèbre la 21e édition de son festival estival autour de la musique et du lien social    Les prévision du lundi 14 juillet    Casablanca : Un nouveau tronçon routier pour désengorger l'axe Hay Hassani - Dar Bouazza    Droits de l'Homme au Sahara : Le Royaume-Uni exprime sa position    Morocco advances to Women's Africa Cup of Nations quarter-finals with victory over Senegal    Violences racistes à Murcie : la FEERI dénonce une vague d'islamophobie et appelle au calme    Jazzablanca 2025 : Une édition qui fête le jazz avec les habitants, au-delà de la scène    Macklemore clôt le festival Jazzablanca avec un puissant message de solidarité pour la Palestine    Blessés dans un accident à Marrakech, Fidji Ruiz et Anas donnent des nouvelles    Sofiane Kiyine impliqué dans un nouvel accident de la route    Manchester United : André Onana forfait pour la tournée américaine de pré-saison    Fès, la spiritualité Tidjane au cœur du lien entre le Maroc et l'Afrique de l'Ouest    Arafat Najib, le gardien d'Al-Aqsa... des années de résistance face à l'exil et à l'arrestation    Dubaï : Trois fugitifs recherchés par Interpol et Europol, dont El Ballouti, arrêtés et extradés vers la Belgique    Renforcement du partenariat stratégique entre Moscou et Pékin : Lavrov rencontre Wang Yi à Pékin    Trottinettes électriques : l'ombre des incendies de batteries lithium-ion    Sit-in à Ouled Youssef : la réaction du CNDH    Finale. CDMC : dispositif sécuritaire exceptionnel pour la venue de Donald Trump    Mondial des clubs : Achraf Hakimi sacré meilleur défenseur avant la finale contre Chelsea    Rissani : Lancement des travaux de sauvegarde et de valorisation du site archéologique de Sijilmassa pour 245,5 MDH    El Jadida en transe : le come-back triomphal de Saad Lamjarred !    Jazzablanca 2025 : Clôture en apothéose aux rythmes de gnawa et d'un show explosif de Macklemore    Marruecos: El Comité de Liberación de Ceuta y Melilla renace de sus cenizas    Alerte météo. Vague de chaleur extrême de mardi à vendredi dans plusieurs provinces    Clap de fin haut en couleur pour Jazzablanca    Le Nigeria et l'UE s'allient pour la promotion des musées et des industries créatives    Bitcoin: le portefeuille du Salvador dépasse 700 millions de dollars    Le Maroc atteint les quarts de finale de la CAN féminine en battant le Sénégal    Ballon d'Or 2025 : Un front africain se forme pour soutenir Hakimi    Coopération Sud-Sud: le Maroc a fait de la solidarité et du codéveloppement un pilier de sa politique étrangère    Plus de 311.600 candidats scolarisés décrochent leur baccalauréat en 2025    Un objet céleste mystérieux venu de l'extérieur du système solaire s'approche du Soleil à une vitesse fulgurante, suscitant la perplexité des scientifiques    Trump menace d'imposer des tarifs douaniers de 30% à l'UE et au Mexique    







Merci d'avoir signalé!
Cette image sera automatiquement bloquée après qu'elle soit signalée par plusieurs personnes.



L'écriture pour quoi faire!
Publié dans Albayane le 09 - 07 - 2020

Rousseau sur les chemins de ses vagabondages, donne libre cours à sa rêverie, Baudelaire cherche inlassablement l'instant fugitif, Rimbaud se voit un autre dans son écriture, Flaubert déclare que «Madame Bovary est moi», Edgar Alain Poe ensanglante ses mots, Kafka a laissé derrière lui le silence infernal, il refusait à son existence le droit d'avoir un sillage.
Tous ces grands hommes de lettres ont marqué leurs époques par la singularité de leurs textes, la pertinence et la profondeur de leurs réflexions. L'écriture est donc un territoire intime où l'écrivain dévoile ses désirs et ses obsessions inachevés, et un miroir où tout le monde peut retrouver la trace du temps proustien.
Au-delà de l'écriture, « le verbe est toujours absent« . Cette formule magique de Rahimi Atiq montre que l'écriture est un exil. Face au désastre, à la terreur, à la destruction systématique du moi, le verbe devient le seul bastion de résistance et de survie.
C'est là toute la symbolique de l'écriture. Grâce à la littérature, le regard profond et attentif de l'auteur parvient à éveiller l'âme du lecteur qui cherche aussi un moyen pour survivre. De ce fait, l'écriture détruit et sauve au même temps des vies. Ceux qui ont lu les souffrances d'un jeune Werther se sont suicidés parce qu'ils n'ont pas pu résister au pouvoir destructeur de la souffrance littéraire, alors que ceux qui ont accompagné Robinson Crusoé dans ses aventures, connaissaient déjà que la vie est une grande aventure et ont survécu parce qu'ils ont cru au pouvoir de l'espoir littéraire.
Lire par exemple Hermann Hesse changera sans aucun doute notre conception du monde et de l'homme. Loin de son rôle de divertissement, la littérature construit l'homme par son aspect éducatif et émotionnel. Elle nous apprend à vivre, à nous adapter à la machine infernale de ce monde en vitesse, à penser au fond du chaos, à vivre malgré le désarroi et le désordre. La littérature peut nous transformer, comme le dit Antoine Compagnon : « Un essai de Montagne, une tragédie de Racine, un poème de Baudelaire, le roman de Proust nous en apprennent plus sur la vie que de longs traités savants » (La littérature pour quoi faire ? p. 35). Elle a le pouvoir de libérer l'individu de sa soumission aux forces extérieures. La littérature est le refuge des solitaires, des blessés, des pessimistes, des révolutionnaires, des rêveurs...etc.
La littérature marocaine par exemple est un tissu de souffrances, de rêves, de peurs, de joies incomplètes et de désirs inachevés. Elle traduit la condition sociale marginalisée de la plupart des marocains, démasque les liens sociaux et familiaux dominants, réinterroge les valeurs sociales, dénonce l'injustice et remet en question la notion de l'individu. Elle est l'image et le produit de notre société.
Chez les maghrébins, l'écriture est l'espace où l'écrivain se constitue comme matière de réflexion. Il y a dans leurs textes le désir de repenser la notion de l'individu à travers la dualité de l'identité et de l'altérité. Driss Chraïbi repense les valeurs collectives, Abdelkébir Khatibi se réjouit de son rapport à la fois amoureux et libérateur avec la littérature, Abdelwahad Meddeb puise son inspiration dans l'héritage des anciens cherchant tout ce qui est « autre » et « différent », tout ce qui conduit à une écriture créative, en disant que : « nous sommes à chaque seconde autres. Nous ne cessons de renaître (Phantasia p. 17). » Face à l'oubli et à la mort, l'écriture devient le refuge des mémoires tatouées et le lieu des identités réinventées. Mohammed Khair-Eddine attache beaucoup d'importance à cette question identitaire qui se manifeste dans ses écrits à travers les symboles de : la famille, la religion, la généalogie, l'Etat, la tribu...etc.
D'autres écrivains comme Kateb Yacine et Malek Haddad participent à ce débat en remettant en cause leur langue d'écriture. Ecrire dans une langue c'est garantir une certaine identité, véhiculer un héritage culturel et donner à l'écriture une nouvelle dimension à la fois esthétique et idéologique. De l'amour bilingue à l'étrangeté du «je», l'écriture ravive les souvenirs du passé simple et donne à la mémoire le pouvoir de la jouissance et de la séduction. Tous ces exemples empruntés à la littérature maghrébine nous montrent à quel point l'écriture est au centre des préoccupations de l'homme.
Fasciné par l'Histoire, Rachid Boudjedra déclare que l'écriture est sa seule passion, Mahi Binebine qui vient de remporter le Prix Méditerranée de littérature 2020, la considère comme une affaire intérieure, une sorte d'évasion. A travers une écriture humaniste, Kebir Mustapha Ammi s'interroge sur le mensonge, l'imposture et la cruauté. Il renverse les rôles pour faire parler des personnages rejetés par leurs communautés. Mokhtar Chaoui nous apprend à « décortiquer les sens de toutes les créatures et de saisir le langage commun ». (Le Silence Blanc p. 167) Tous ces écrivains ont fait le pari d'interroger leurs identités à travers une écriture qui met « l'Autre » au centre de ses finalités. L'expérience poétique a montré aussi que rien ne peut remplacer le rôle de l'écriture. Laâbi par exemple fait de ses poèmes un vœu de libération de soi en vue d'une quête de l'altérité. Selon Khalid Hadji, Laâbi parvient à développer une écriture où l'évanescence du pays réel ou nostalgique finit par l'adaptation (et l'adoption) de l'être à la condition poétique qui est inexpugnable.
De ce fait, l'écrivain marocain croit au pouvoir de l'écriture même dans une société qui souffre d'une crise de culture et d'un taux de lecture très faible. Faut-il soulever ici le problème de la situation des écrivains marocains ? Sans nul doute, tout écrivain marocain a lu d'autres écrivains nationaux ou étrangers et a cherché une ascendance spirituelle pour continuer à écrire malgré sa condition désenchantée. La plupart des lecteurs marocains avertis et non avertis s'intéressent aux littératures étrangères au lieu de promouvoir la littérature nationale pour diverses raisons : qualité du produit littéraire, l'arrogance intellectuelle de certains critiques, dominance des œuvres étrangères programmées aux écoles et à l'université, une quasi-absence de la critique universitaire, le goût du lecteur, l'imitation littéraire, le problème de la répétition...etc. Tout cela n'empêche pas les écrivains marocains de continuer à écrire et à produire des nouvelles œuvres chaque année, parce que l'écriture pour eux est devenue un mode de vie.
L'écriture pour quoi faire ? Pour changer, pour déranger, pour créer un monde possible où le bonheur et la jouissance n'ont aucune limite. On écrit par besoin et par nécessité pour nous débarrasser du bruit de nos cris et faire parler l'enfant qui nous habite. L'écriture nous dévoile la face cachée de l'homme, son aspect intime et solitaire, ses hallucinations et obsessions, sa peur ininterrompue de l'avenir.


Cliquez ici pour lire l'article depuis sa source.