Le Maroc dompte le Mali (3‐1) et file en demi‐finale    Bourse de Casablanca : Deux records historiques à la clôture de la semaine du 14 au 18 juillet    CNSS. Sécurité renforcée et délais prolongés pour les déclarations    Info en images. Port de Dakhla Atlantique, un taux d'avancement des travaux de 40%    CAN 2025 et Mondial 2030 : une stratégie marocaine d'investissements pour un héritage durable    Programme "Moussalaha" : 390 détenus bénéficiaires    Yaoundé vibre avec les « Renaissance Music Awards »    Espagne : Un feu de forêt provoque un énorme nuage de fumée près de Madrid    « Le Monde » et l'art de blanchir les fugitifs : Mehdi Hijaouy, un imposteur promu martyr    Pêche : Ouverture de la campagne estivale du poulpe après une phase de repos biologique (Secrétariat d'Etat)    CAN (f) Maroc 24 : Les arbitres désignés pour les quarts de finale de ce vendredi    CAN féminine : le Nigéria surclasse la Zambie et file en demi-finales    Le président de la Chambre des conseillers reçoit une délégation de l'OLP    Brésil : l'ex-président Bolsonaro contraint au port d'un bracelet électronique, dénonce une « suprême humiliation »    Alphavest Capital y Boeing establecerán centros de excelencia aeronáutica en Marruecos    Football : Le milieu de terrain marocain Neil El Aynaoui est sur le point de rejoindre l'AS Roma    El Jadida : un gardien de voitures tué pour avoir voulu empêcher une bagarre    Le Real Madrid étend son programme éducatif au Maroc pour la saison 2025-2026    Pose de la première pierre du projet de valorisation du site archéologique de Sejilmassa    Allemagne : Des Marocains condamnés pour des attaques à l'explosif contre des distributeurs automatiques    La campagne chinoise « Voyage de la lumière » redonne la vue à des centaines de patients à Chefchaouen    Selon le prestigieux institut américain WINEP, «Alger pourrait contribuer à persuader le Polisario d'accepter un modèle négocié d'autonomie, la proposition marocaine servant de canevas»    Médiateur du Royaume : 13.142 plaintes traitées en deux ans    Ferhat Mehenni honoré lors d'une prestigieuse cérémonie internationale à Paris    Peng Liyuan assiste à un événement sur l'amitié entre les jeunes chinois et américains    Deux hauts dignitaires catholiques à Gaza après la frappe contre une église    Les Marocains représentent 8,8 % des victimes de délits de haine recensées en Espagne en 2024    Data Centers au Maroc : comment ça marche ?    Le Ghana sollicite l'expertise marocaine dans la régulation du cannabis à usage contrôlé    Inauguration d'un Centre de Médecine Traditionnelle Chinoise à Mohammedia : L'Ambassade de Chine au Maroc renforce la coopération sanitaire entre Rabat et Pékin    Les relations avec le Maroc sont un "pilier" de la politique étrangère américaine (Directeur au Hudson Institute)    Festival : Jazzablanca, un final éclatant de stars et de jeunes talents    Maroc/France: Les villes de Dakhla et Nice renforcent leur coopération    Aéronautique: Alphavest Capital et Boeing vont créer des centres d'excellence au Maroc    Mobile Payment : Al Barid Bank lance sa solution    Minéraux critiques: Leila Benali appelle à l'adoption d'un cadre ESG africain pour assurer la transition énergétique    Talbi El Alami reçoit Jacob Zuma, ancien président d'Afrique du Sud    Marruecos extiende la alfombra roja a Jacob Zuma tras el acercamiento sobre el Sahara    El conflicto se intensifica entre la Unión Europea y Argelia    Le temps qu'il fera ce vendredi 18 juillet 2025    Nadia Fettah: « Tous les partenaires sont convaincus de la nécessité d'une solution consensuelle »    Décès d'Ahmed Faras : le président de la FIFA rend hommage à la carrière exceptionnelle d'une légende du football africain    CHAN 2024 : Six arbitres marocains désignés    L'Humeur : Timitar, cette bombe qui éclate mou    Summer Series Au Blast : Un été en live, au cœur de la ville ocre    Le ministère français de la Culture salue l'essor culturel du Maroc    Festival des Plages Maroc Telecom : Une soirée d'ouverture réussie à M'diq sous le signe de la fête et du partage    Temps'Danse fait rayonner le Maroc à la Coupe du monde de danse en Espagne    







Merci d'avoir signalé!
Cette image sera automatiquement bloquée après qu'elle soit signalée par plusieurs personnes.



France : Les démons de l'islamisme (20)
Publié dans Aujourd'hui le Maroc le 10 - 12 - 2004

Publié chez Albin Michel, «Les islamistes sont déjà là» des deux journalistes français Christophe Deloire et Christophe Dubois est présenté comme «une enquête sur une guerre secrète». L'ouvrage vaut la peine d'être lu ne serait-ce que pour les notes des «services» qui semblent avoir fortement «inspiré» les deux co-auteurs. Bonnes feuilles.
«Je suis parti la fleur au fusil»
Palais de justice, 30 mars 2004
Ils ont dormi dans des conditions de fortune, mangé parfois moins qu'à leur faim, enduré d'épuisants parcours du combattant. Les trois hommes se retrouvent assis sur un banc dans une belle salle chauffée. Mais c'est celle du tribunal correctionnel de Paris. Dans le box, ils sont trois. Il y a d'abord David Courtailler, un Savoyard de vingt-neuf ans, converti à l'Islam. À son côté, l'on aperçoit un autre Français, Ahmed Laïdouni, trente-six ans. Il est né à Montfermeil, en Seine-Saint-Denis. Enfin voici l'Algérien Chaouki Baadache, trente-six ans. En mars 2004, ils comparaissent pour leur participation présumée à des camps d'entraînement en Afghanistan. Chacun d'entre eux a suivi un itinéraire particulier jusque dans ces camps, où toute une génération de militants du djihad s'est formée. Barbe naissante et visage fermé, Courtailler assure avoir pris cette voie pour «se sortir de problèmes de drogue et d'alcool». Il raconte sur procès-verbal être «parti la fleur au fusil» dans les camps d'Al Qaïda. Le jeune Français fait profil bas. Son nom est cité dans l'enquête sur les attentats de Madrid. Non pas qu'il y ait participé. Mais fin 1998, lors d'un séjour en Espagne, il a rencontré l'un des suspects principaux, Djamal Zougam.
Lunettes fines et barbe courte, le deuxième homme du box, Baadache, a été considéré par la justice comme l'un des principaux animateurs d'une filière de jeunes combattants vers l'Afghanistan. Il aurait remplacé à ce poste Abou Zoubeïda, l'un des collaborateurs d'Oussama Ben Laden. Volubile, Baadache déclare être domicilié à Bagdad. Il revendique le djihad, en faisant allusion à l'assassinat par Tsahal du leader du Hamas, le cheikh Yacine, quelques jours auparavant : «Quand un gouvernement israélien assassine un vieux de soixante-sept ans, il est de mon devoir de musulman d'aller me battre contre les Israéliens.» Baadache reconnaît «Allah» comme seul avocat. Barbe longue, Laïdouni paraît le plus distrait des trois. Avec Courtailler, il est soupçonné par la DST d'être revenu en France «en vue de commettre une action violente».
Les deux hommes contestent avoir été jamais investis d'une telle «mission». Cette scène est une première: jamais les membres présumés d'une «filière afghane» n'avaient été jugés en France. C'est le résultat d'une information judiciaire ouverte dès le 12 octobre 1995 par le parquet de Paris. Le premier dossier ayant révélé l'existence de ces «filières afghanes» en France est celui de l'attentat commis le 24 août 1994 contre un hôtel de Marrakech. L'explosion s'était soldée par la mort de deux touristes aspagnols.
Seize militants impliqués dans ce dossier, domiciliés dans la région d'Orléans, avaient suivi les stages paramilitaires en Afghanistan.
L'équation de la terreur est simple: l'ensemble des enquêtes portant sur des projets d'attentats mettent en évidence la participation d'anciens «stagiaires» des camps des «fous de Dieu». C'est le cas de la vague d'attentats de l'été 1995 en France, du démantèlement d'un réseau islamiste à la veille de la Coupe du monde de football en 1998, des projets fomentés contre la cathédrale de Strasbourg en 2000 et l'ambassade des États-unis à Paris en 2001… Sans oublier l'assassinat du commandant Massoud ou les attentats-suicides contre le World Trade Center et le Pantagone.
Le Franco-marocain Zacarias Moussaoui, mis en cause par la justice américaine, a effectué des «stages» en Afghanistan de 1998 à 2000. Combien sont-ils à avoir effectué le cursus du parfait poseur de bombes ? «Environ 230 à 240 agents dormants en France», estime un haut fonctionnaire du secrétariat général de la Défense nationale. Au total, plusieurs milliers de «stagiaires» du monde entier sont passés par les officines du terrorisme islamiste. Un ancien substitut du parquet antiterroriste explique : «L'objectif des stages est de sélectionner les meilleures recrues possible, parmi tous ces mercenaires du djihad, venus d'horizons géographiques différents.» Premier juge d'instruction au tribunal de grande instance de Paris, Jean-François Ricard relève : «Dès 1994, l'étude de ces réseaux devait permettre la mise au jour d'acheminements de volontaires et notamment d'Europe vers la zone afghano-pakistanaise, aux fins d'être formés dans des camps; il s'agit là d'un élément central portant en germe le nouveau visage de l'islamisme radical de la période suivante 1.» En l'occurence, ce sera l'internationalisation du terrorisme et la mise en place d'une «armée» totalement protéiforme et imprévisible : «Le caractère mutant de ces réseaux se retrouve aussi par le fait que la localisation du combattant agissant depuis un pays, voire un continent, est aussi devenu un mode de fonctionnement dépassé», poursuit le magistrat. En clair, un combattant algérien formé en Afghanistan pourra désormais être envoyé en mission loin de ses bases au nom de la «guerre contre les mécréants». C'est donc une véritable internationale du terrorisme qui se met en place et dont la France est l'une des bases. Et pas la moins importante.
«Loin d'être éteinte, cette génération continuera longtemps à nous poser problème», souligne d'ailleurs Pierre de Bousquet de Florian, le directeur de la DST. Quel est le profil de ces «bombes à retardement» ?
Dans son réquisitoire du 18 décembre 2003 consacré aux «filières afghanes», le vice-procureur de Paris, Christophe Tessier, précise : «Le recrutement est effectué dans les couches sociales les plus défavorisées, ce qui permet un encadrement par des musulmans éduqués.» Autre point commun des «stagiaires du djihad»: «Une hostilité à l'égard des gouvernements occidentaux, ces derniers apparaissant comme un frein à la mise en place des théocraties islamistes.» Leur mobile? «Les Français ont bien une armée. Pourquoi les musulmans n'en auraient-ils pas une?» répond un «vétéran afghan» à un juge d'instruction parisien.
La machine à former ces routards du terrorisme fonctionne à plein régime jusqu'à l'offensive américaine en Afghanistan. Dès leur arrivée à l'aéroport de Peshawar, au Pakistan, un instructeur les prend en charge et les conduit dans une villa de transit, une madafa. Le tri est fait en fonction de leur nationalité. Là, les «stagiaires» remettent leurs passeports. D'autres détenteurs pourront toujours en faire bon usage. Les «bleus» choisissent un pseudonyme, afin de protéger leur anonymat. Ensuite, dans les camps d'entraînement militaire, les hommes suivent une formation au maniement des armes et explosifs, ainsi qu'un endoctrinement religieux.
Affublés d'un nom de guerre, les «diplômés» sont «réinjectés» sur les fronts du djihad international. Ils font figure d'exemple. «Ces individus apparaissaient aux yeux des jeunes gens défavorisés ou désœuvrés comme des modèles», explique le chef de la section antiterroriste du parquet. «Prônant pour seule valeur la haine» de tout ce qui s'oppose à eux, ces anciens d'Afghanistan sont capables de mobiliser autour d'eux des petites cellules autonomes et cloisonnées.
Contrairement aus apparences, l'intervantion alliée en Afghanistan n'a pas épuisé le filon. Juste modifié la destination des filières. Les services de renseignements observent désormais le départ discret de Français vers la syrie, le Yémen, la Thaïlande, le Maroc, le Soudan et l'Irak. Le retour de ces quelques centaines d'hommes est très attendu par les services spécialisés. Ils viendront renforcer les rangs de l'armée secrète composée d'agents dormants qui attendent l'heure de la mobilisation. En attendant, Baadache a été condamné en mai 2004 par le tribunal de Paris à dix ans de prison, Laïdouni à sept ans de prison, et Courtailler à quatre ans (dont deux avec sursis). La justice s'est montrée ferme.
1- SOS Attentats, Terrorisme, victimes
et responsabilité pénale internationale, dir.
Ghislaine Doucet, Calmann-Lévy, 2004.


Cliquez ici pour lire l'article depuis sa source.