Ce colosse de vingt-huit ans, qui se tient devant les trois magistrats de la chambre criminelle près la Cour d'appel de Casablanca, semble ne pas réaliser la gravité de son acte criminel. «Je ne voulais pas le tuer, mais le destin en a voulu autrement», s'est ainsi, aussi simplement que ça, que le mis en cause a essayé de justifier son crime devant la Cour. Son casier judiciaire renseigne qu'il a purgé une seule peine d'emprisonnement de six mois ferme pour trafic de drogue. A-t-il repris son activité illicite après sa sortie de prison ? «Non», a-t-il assuré, alors que chez la police judiciaire il a répondu par l'affirmative. Justement, selon le procès-verbal de son audition, le mobile de son crime n'était autre qu'un malentendu portant sur le fief exploité pour le commerce de la drogue par chacun d'eux, lui et sa victime, qui était également un trafiquant de drogue. Âgé de trente-et-un ans, la victime est un jeune homme qui a purgé à trois reprises des peines d'emprisonnement ferme : deux fois pour trafic de drogue et une seule pour complicité au vol qualifié. En fait, selon les témoins qui ont été auditionnés par les enquêteurs, il n'avait jamais eu un accroc avec l'auteur du crime. Chacun respectait le territoire de l'autre. Seulement, la dernière fois, le mis en cause a reproché à la victime de dépasser les limites de son champ d'activité et de détourner ses propres clients. Mais ce dernier n'a rien voulu entendre. «Il m'a traité de cupide et que je voulais avoir le monopole du marché», a-t-il raconté à la Cour avant d'ajouter qu'il est rentré chez lui très remonté contre la victime. Il se sentait humilié. Une demi-heure plus tard, le mis en cause a quitté son domicile pour retrouver son rival. Dès qu'il l'a remarqué, il l'a attaqué au couteau ne lui laissant même pas le temps de se défendre. Pour homicide volontaire avec guet-apens et préméditation, il a été condamné à trente ans de réclusion criminelle.
