Le Maroc entend se poser en exemple continental en matière de statistiques du commerce international, alors que les échanges extérieurs du Royaume ont connu une progression de 83 % entre 2014 et 2024, atteignant 1 216 milliards de dirhams contre 662 milliards une décennie plus tôt. Cette ambition a été proclamée, mardi à Marrakech, par Driss Benchikh, directeur de l'Office des changes (OC) lors de l'ouverture de la réunion du groupe d'experts sur les statistiques du commerce international, organisée en partenariat avec le Département des statistiques des Nations unies. Une parole d'autorité, dans une époque de soupçon «Les statistiques produites par l'Office des changes sont établies dans le strict respect des principes fondamentaux que sont la rigueur, l'indépendance, la transparence et la comparabilité», a soutenu M. Benchikh. Il a affirmé que l'institution poursuivait la numérisation intégrale de ses processus, tout en renforçant la sécurité de ses systèmes d'information conformément aux standards internationaux les plus contraignants. Cette déclaration résonne comme une mise au point face aux doutes à peine voilés de certains cercles gouvernementaux, dont les hésitations récurrentes trahissent une méfiance tenace envers les données qui dérangent ou contredisent les fables officielles. Une stature internationale au service d'une souveraineté méthodologique Le directeur de l'Office a rappelé les partenariats tissés avec les principales organisations multilatérales – Nations unies, Fonds monétaire international, OCDE, Organisation mondiale du commerce et Eurostat – ainsi que la participation active du Royaume aux programmes européens MEDSTAT, aux travaux sur la valeur ajoutée dans le commerce (TiVa) et aux statistiques des investissements directs étrangers. Le Maroc co-préside désormais l'Equipe spéciale des Nations unies sur les statistiques du commerce international (TT-ITS), consacrant, selon M. Benchikh, «un cheminement patient et sans tapage, fondé sur la compétence et la régularité.» De son côté, Mehdi Tazi, vice-président général de la Confédération générale des entreprises du Maroc (CGEM), a souligné l'importance cruciale des statistiques dans un monde où «la donnée n'est pas un luxe, mais une condition de lucidité économique.» Il a rappelé que le ratio échanges extérieurs/PIB du Maroc demeure parmi les plus élevés de la région, comparable à celui de pays comme l'Espagne, le Portugal ou la France. Une cartographie des déséquilibres trop souvent ignorée À l'échelle microéconomique, M. Tazi a plaidé pour une base de données publique interrogeable, permettant aux entreprises de repérer les déséquilibres commerciaux structurels, d'identifier les créneaux porteurs et de s'ancrer davantage dans une logique d'exportation fondée sur les potentialités réelles du pays. Les travaux du groupe d'experts, qui se poursuivent jusqu'au 9 mai, visent la finalisation des nouveaux manuels méthodologiques relatifs aux statistiques du commerce international de biens et services. Trente-deux pays y sont représentés, aux côtés de vingt organisations internationales et de hauts responsables issus des banques centrales, administrations douanières, ministères techniques et offices statistiques. Ce rendez-vous, qui place le Maroc au cœur des débats sur l'architecture statistique mondiale, n'est pas sans faire apparaître le contraste entre la précision des chiffres et l'embarras des discours officiels lorsqu'ils s'y heurtent.