Dans sa dernière note mensuelle consultée par Barlamane.com, le Département de l'agriculture des Etats-Unis (ministère fédéral de l'agriculture) esquisse les contours d'un marché céréalier mondial en mutation, où le Maroc, souvent relégué au rang de simple importateur méditerranéen, se distingue cette année par une régression notable de ses achats extérieurs à la faveur d'une amélioration des rendements locaux. Ce réajustement reflète dans un contexte marqué par des récoltes pléthoriques et des repositionnements commerciaux entre puissances agricoles. Repli des importations marocaines grâce à une meilleure récolte nationale Selon la direction des marchés agricoles internationaux du ministère américain, les importations marocaines de blé devraient s'établir à 6,7 millions de tonnes pour la campagne 2025-2026, soit un recul de 200 000 tonnes par rapport à la période précédente. Ce fait s'explique par «des disponibilités domestiques améliorées», précise le rapport, qui classe le Maroc parmi les rares pays à réduire ses achats en 2025, avec l'Algérie et le Brésil. Malgré une demande nationale soutenue, le royaume parvient à amortir la dépendance aux marchés extérieurs grâce à des stratégies de stockage et à une gestion prudente des prix à l'importation. Cette orientation contraste avec le profil de nombreux autres pays du Sud, toujours exposés à la volatilité des cours internationaux. Surabondance mondiale et concurrence exacerbée entre exportateurs À l'échelle planétaire, la production de blé atteindrait 808,5 millions de tonnes – un sommet historique, alimenté par la reprise des récoltes dans l'Union européenne et une campagne robuste en Inde. La Russie conserverait son rang de premier exportateur mondial avec 45 millions de tonnes, devant l'Union européenne (34 Mt) et l'Australie (24 Mt), dans un jeu de recomposition des parts de marché où l'Afrique reste une zone de compétition intense. Dans ce cadre, le Maroc, par son profil d'acheteur régulier et institutionnalisé, continue d'influencer subtilement l'orientation des flux, en modulant ses appels d'offres en fonction des impératifs budgétaires, des conditions climatiques et des arbitrages politiques. Maïs : une dépendance qui persiste, mais maîtrisée S'agissant du maïs, autre grande composante des importations céréalières marocaines, le rapport anticipe une progression modérée des volumes importés, à 2,9 millions de tonnes (+200 000 t). Utilisé principalement dans l'alimentation animale, ce maïs provient majoritairement d'Ukraine, du Brésil et des Etats-Unis. La hausse est attribuée à «la vigueur des importations observées à ce jour», reflet de la résilience de la filière avicole et des élevages industriels marocains. Soutiens publics et régulation : la méthode marocaine Le document met également en lumière le rôle central des instruments publics marocains – au premier rang desquels l'Office national interprofessionnel des céréales et légumineuses (ONICL) – dans la régulation du marché, tant par le jeu des subventions que par la stratégie d'anticipation des achats. Ces dispositifs permettent d'amortir les chocs exogènes tout en assurant une relative stabilité des prix sur le marché intérieur. Sans en avoir l'envergure, le Maroc agit en révélateur. En réduisant ses achats de blé dans une année de surabondance mondiale, tout en maintenant une dépendance mesurée au maïs importé, il illustre une double réalité : celle d'une gestion fine des équilibres nationaux et d'une lecture stratégique des perspectives offertes par les marchés internationaux.