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Maroc-Israël : les énormes acquis politiques, économiques et militaires d'une déclaration conjointe présentée toujours à tort comme une «normalisation»
Le terme «normalisation» appliqué aux relations entre le Maroc et Israël s'avère trompeur et relève d'une certaine malhonnêteté intellectuelle. Le Centre de Jérusalem pour les affaires de sécurité et les relations internationales (JCFA) précise qu'il s'agit en réalité d'une «déclaration conjointe», dépourvue de toute dimension interconfessionnelle ou culturelle. Contrairement aux accords signés par d'autres Etats arabes, l'entente marocaine «ne prévoit pas la mise en place d'un dialogue interconfessionnel, ni la lutte contre la haine, l'incitation à la haine et la discrimination» et ne contient «pas le mot Abraham». Ce rapprochement politique et économique, bien que dépourvu de ces engagements, revêt néanmoins une portée stratégique majeure. La signature des accords d'Abraham marque une avancée symbolique inédite vers l'acceptation d'Israël et du peuple juif par le monde arabe, même si des divergences religieuses, des hostilités anciennes et des traités régionaux contradictoires persistent. Le Centre de Jérusalem pour les affaires de sécurité et les relations internationales (JCFA) souligne que ces accords gagneraient à être confortés par la présence de nouveaux pays. Le JCFA formule l'espoir que ces accords, ainsi que leur extension éventuelle à d'autres Etats arabes et musulmans, constitueront une étape décisive vers la paix entre Israël et le monde arabe. Un accord marocain aux contreparties politiques et stratégiques Parmi les accords conclus à la faveur des évolutions diplomatiques récentes entre certains Etats arabes et Israël, celui du Maroc se distingue par ses gains politiques, militaires et stratégiques. Le JCFA rappelle que Rabat a obtenu, le 22 décembre 2020, la reconnaissance par les Etats-Unis et Israël de sa souveraineté sur le Sahara en marge de la reprise de ses relations avec l'Etat hébreu. Il s'agit d'une déclaration conjointe (et non une normalisation) signée à Rabat par le Maroc, les Etats-Unis et Israël, laquelle «établit des relations amicales et pacifiques» et autorise «les vols directs et les survols de territoires, ainsi qu'une coopération bilatérale dans le commerce, la finance, l'investissement, l'innovation et la technologie, le tourisme, l'eau, l'agriculture, l'énergie et les télécommunications». Le texte précise également que «les bureaux de liaison à Rabat et Tel-Aviv ont été rouverts». Accords à portée économique et militaire Selon le JCFA, cet engagement, d'abord politique et économique, s'est doublé d'un approfondissement notable de la coopération militaire. En novembre 2021, «un accord a formalisé les liens de défense entre le Maroc et Israël», comprenant la livraison de 150 drones, d'un système de défense aérienne et la présence d'observateurs israéliens lors de l'exercice multinational African Lion. À la différence d'autres textes signés dans le cadre des accords dits d'Abraham, la déclaration marocaine «ne prévoit pas la mise en place d'un dialogue interconfessionnel, ni la lutte contre la haine, l'incitation à la haine et la discrimination». Elle «ne fait pas référence aux accords et ne contient pas le mot Abraham», insiste l'institut. Des concessions substantielles pour les Emirats arabes unis Parallèlement au cas marocain, le JCFA observe que les Emirats arabes unis ont rattaché leur normalisation diplomatique à des avantages militaires et politiques. L'accord a été conclu «en échange de la suspension du plan d'annexion israélien de la Judée et de la Samarie» et de la livraison par les Etats-Unis de matériels militaires, dont des avions de combat F-35 et d'autres systèmes, pour un montant d'environ 23 milliards de dollars, «avec l'aval tacite d'Israël». Bien que la réception des appareils ait été différée à la demande d'Abou Dhabi, l'institut précise que «le contrat demeure valide». Bahreïn, Soudan et Kosovo : bénéfices diplomatiques ciblés Dans le cas de Bahreïn, le texte signé, intitulé «Déclaration de paix, de coopération et de relations diplomatiques et amicales constructives», consacre l'établissement officiel de liens avec Israël. Pour le Soudan, la principale contrepartie a été la radiation, en octobre 2020, de la liste américaine des Etats soutenant le terrorisme, même si «Israël n'est pas mentionné dans le document et ne l'a pas signé». Quant au Kosovo, il a obtenu la reconnaissance officielle de l'Etat d'Israël. Bénéfices pour Israël et les Etats-Unis Le JCFA relève que, dans leur ensemble, ces accords ont permis de formaliser des relations économiques, financières et diplomatiques entre Israël et plusieurs Etats musulmans, tout en conférant à l'Etat hébreu une portée internationale accrue. Ils ont aussi constitué «un moment historique pour Israël, les Etats-Unis et les régions d'Afrique du Nord et du Moyen-Orient», en modifiant les discours officiels de certains dirigeants arabes et la perception de leurs sociétés civiles. Selon les données de l'Institut pour la paix des accords d'Abraham, «le commerce officiel total des accords d'Abraham dépasse quatre milliards de dollars, en hausse de 16 % sur un an entre 2020 et 2023». Après les attaques du 7 octobre 2023, «les relations diplomatiques sont demeurées stables et le commerce n'a reculé que de 4 %, contre une baisse de 18 % pour l'ensemble des échanges commerciaux d'Israël». En 2022, «27 % des exportations de défense israéliennes étaient destinées aux Emirats arabes unis, à Bahreïn, à la Jordanie, à l'Egypte et au Maroc, pour un montant avoisinant trois milliards de dollars».