Au cours de la dernière décennie, le Maroc a subi des changements importants, qui ont fait que le pays réalise des progrès sur de nombreux fronts, grimpant dans les classements pour trois des quatre piliers de l'Index d'ouverture économique. Ainsi, depuis le début du millénaire, « le PIB par habitant a augmenté de plus de 70% en termes réels. Les taux de pauvreté absolue et relative ont diminué, en passant respectivement de 7,1% à 1,4% et de 21,4% à 19,7% entre 2012 et 2017 », relève le Legatum Institut dans une étude du cas du Maroc en termes d'ouverture économique. Toutefois, relève-t-il, le classement du Maroc pour la gouvernance a chuté : Le pays est mal classé sur le plan de la responsabilité politique, et l'efficacité du gouvernement a connu une baisse des contraintes exécutives, l'état de droit et la qualité réglementaire. Pour expliquer cet état de fait, l'étude fait observer que « l'économie est caractérisée par un ensemble de marchés très concentrés, qui sont souvent le résultat d'interventions gouvernementales qui restreignent l'entrée, facilitent la domination ou créent des inégalités ». « Il y a aussi un Maroc parallèle et plus pauvre, avec une économie informelle assurant jusqu'à 40% de la totalité des emplois », ajoute l'analyse, qui précise que « même avant l'impact économique de la pandémie du coronavirus, le progrès ralentissait : le taux de croissance du PIB par habitant pendant 2010-2019 représentait la moitié de celui des dix années précédentes (…). Cependant, le système économique bénéficierait d'une plus grande place faite à un secteur privé dynamique et innovant qui pourrait permettre aux petites entreprises performantes de s'imposer sur le marché et répartir la prospérité ». Et de mettre en avant que « parmi plusieurs problèmes exogènes auxquels le Maroc est maintenant confronté, deux se démarquent : À court-terme, l'impact de la pandémie du coronavirus menace deux principaux secteurs d'activité dynamiques du Maroc, à savoir le commerce international et le tourisme, et à long terme, l'impact d'une récente sécheresse sur l'important secteur agricole marocain, qui a mis en évidence la vulnérabilité du pays au changement climatique ». Bien que le Maroc dispose de nombreux atouts pour naviguer dans ces eaux difficiles, ce rapport met en évidence les domaines dans lesquels de nouvelles réformes prépareraient le pays à tirer profit de ses atouts et à franchir la prochaine étape du développement économique. Dans son étude, le Legatum Institut s'est concentré sur les facteurs structurels de l'Ouverture Economique, en évaluant dans quelle mesure le Maroc possède les quatre caractéristiques fondamentales des économies ouvertes. Il s'agit de l'accès aux Marchés et Infrastructures, l'environnement d'Investissement, les conditions de Création d'Entreprises et en fin, la gouvernance qui est soutenue par l'état de droit ainsi que par l'intégrité et l'efficacité du gouvernement. Tout en soulignant que le pays « possède plusieurs atouts et un potentiel économique important, avec une gestion macro-économique prudente qui pourrait favoriser la prospérité future, l'étude a identifié les «quatre limitations » à une plus grande ouverture économique du Maroc Investir dans les infrastructures Elle préconise à cet effet d'investir davantage dans les infrastructures, en particulier dans les ressources en eau et dans les infrastructures haut-débit Trois autres domaines d'infrastructure sont relativement de mauvaise qualité par rapport aux normes internationales : La couverture en haut-débit et les infrastructures routières et ferroviaires, ajoute l'analyse. En matière de couverture en haut-débit, elle estime que « le Maroc devrait prendre les mesures nécessaires pour rendre l'Agence Nationale de Régulation des Télécommunications indépendante des ministres du gouvernement, accroître la concurrence en introduisant un régime d'accès au marché, et appliquer une batterie de mesures comprenant la promotion des partenariats public-privé et utilisant pleinement le fonds de service universel ». Encourager la compétition Selon le Legatum Institut, le royaume devrait aussi s'atteler à « augmenter la croissance et le dynamisme de l'économie en augmentant progressivement le rôle du secteur privé dans les secteurs clés de l'économie », cette dernière étant « freinée par un manque de compétition ». Ainsi, considère-t-il, « pour favoriser la croissance et le dynamisme, l'Etat pourrait limiter son intervention directe dans l'économie et réduire les chances d'accès privilégié aux marchés dont les entreprises nationales bénéficient. Plus particulièrement, le Maroc pourrait introduire les principes de concurrence dans les secteurs d'appui clés tels que l'énergie et les télécoms, garantir que les entreprises privées et publiques sont soumises aux mêmes règles et renforcer les marchés publics ». Dans le secteur agricole, l'étude plaide pour une « ouverture progressive des marchés agricoles », en ce sens qu' «une stratégie agricole devrait offrir de meilleures opportunités pour que les petites et grandes exploitations transforment le secteur agroalimentaire en une source stable de croissance, de compétitivité et de développement économique dans les régions rurales ». Rendre le marché du travail plus flexible Le marché du travail est l'une des faiblesses majeures du Maroc, et demeure marqué par « une faible inclusion des jeunes et des femmes en particulier, une croissance lente de l'emploi et un degré élevé d'informalité », souligne l'Etude. Elle affirme que pour rendre le marché du travail plus flexible, « le pays peut ralentir l'augmentation du salaire minimum, baisser le coût des licenciements, faciliter le recours au licenciement pour les petites entreprises, rendre les contrats à durée limitée plus flexibles, mais aussi introduire une forme d'assurance chômage plus étendue ». Renforcer la gouvernance L'étude du cas du Maroc note à ce propos, que «pour libérer les potentialités de l'économie nationale, l'Etat pourrait s'attaquer à la fois à la corruption et réduire considérablement la prévalence des entreprises publiques dans l'économie, ainsi que les distorsions qui y sont associées ». Pour y parvenir, estime-t-elle, le rôle de l'Instance Nationale de la Probité, de la Prévention et de Lutte contre la Corruption (INPPLC) devrait être renforcé en favorisant son autonomie et son indépendance et en lui allouant les moyens nécessaires. En outre, ajoute l'étude, «le Maroc pourrait créer des régulateurs indépendants légalement dans tous les secteurs d'utilité publique qui peuvent mettre en place de nouvelles réglementations et veiller à l'application de celles déjà existantes. Ces régulateurs ne devraient pas avoir des représentants gouvernementaux au sein de leurs conseils, le gouvernement devant seulement assurer un pilotage stratégique ». Pour conclure que «l'histoire et l'évolution récentes du Maroc ont démontré qu'avec une réelle volonté politique, le Royaume peut mener à bien ses réformes. En poursuivant cette voie et en appliquant les recommandations suggérées dans cette étude de cas, le Maroc deviendrait plus compétitif dans l'économie mondiale ».