Une opération de soutien aux éleveurs dans la région de Chefchaouen déclenche un débat sur le prix unitaire de chèvres importées d'Espagne. Face à la controverse, la direction régionale de l'Agriculture défend le bien-fondé des montants avancés. L'annonce par la direction provinciale de l'Agriculture à Chefchaouen d'un appel d'offres portant sur l'acquisition de 250 têtes de chèvres, dans le cadre d'un projet de développement local destiné à appuyer les agriculteurs du cercle de Bab Taza, a suscité une vague de réactions autour des prix proposés par les entreprises en lice. D'après les données relayées, les montants avancés pour l'importation des chèvres, selon les critères fixés par le ministère de tutelle, oscillent entre 6.000 et 6.500 dirhams par tête. Un montant jugé excessif par de nombreux observateurs, puisqu'il dépasse de loin les prix pratiqués sur le marché local. Contacté par Hespress, le directeur régional de l'Agriculture de Tanger-Tétouan-Al Hoceïma, Abdelkarim Kenfaoui, a affirmé que ces chiffres sont « tout à fait raisonnables et normaux ». Il a précisé que la commande porte sur des races bien spécifiques, en l'occurrence les chèvres « Murciano-Granadina » et « Florida » (souvent désignées localement par « Moshiana » et « Karadanina »), principalement importées d'Espagne. Ces races sont rares au Maroc, et les éleveurs locaux sont généralement peu enclins à s'en séparer. Selon Kenfaoui, le prix de ces chèvres sur le marché espagnol avoisine les 350 euros, soit entre 3.500 et 4.000 dirhams. À cela s'ajoutent les coûts d'analyse génétique pour attester de leur pureté raciale, estimés à 1.000 dirhams par tête, sans compter le transport, la mise en quarantaine dans un espace sécurisé, ainsi que les analyses exigées par l'Office national de sécurité sanitaire des produits alimentaires (ONSSA), évaluées à 280 dirhams. Le responsable a précisé que l'administration opère une sélection stricte parmi les bêtes proposées par l'entreprise retenue. Si certains spécimens ne correspondent pas aux attentes, ils sont écartés. Il a également indiqué que certains éleveurs marocains refusent de céder ces races à moins de 7.500 dirhams. « C'est le prix le plus bas que nous puissions obtenir. Nous peinons à en trouver à 8.000 dirhams, alors qu'il s'agit de chèvres en parfaite santé, capables de donner naissance à des jumeaux », a-t-il expliqué. Kenfaoui a insisté sur la rigueur sanitaire imposée par le Maroc, qui exige des tests redoutés par les exportateurs espagnols et français. Ces tests peuvent révéler la présence de maladies et entraîner des pertes massives si des cas positifs sont détectés, même isolés. Réagissant aux commentaires évoquant des chèvres à 1.500 dirhams sur le marché local, il s'est interrogé : « D'où viennent ces chiffres ? Comment peut-on prétendre qu'une chèvre de deux ans, de bonne race et proche de la mise bas, coûte ce prix ? » Enfin, le directeur régional a mis en garde contre la désinformation et les discours dévalorisants, soulignant que la reconstitution du cheptel national ne peut réussir « dans un climat de suspicion et de fausses polémiques ».