En un peu plus de deux décennies, le Maroc a hissé son secteur touristique au rang de pilier structurel de son économie. Cette montée en puissance résulte d'une vision royale claire et d'une stratégie d'investissement ambitieuse, pensée comme un vecteur de croissance inclusive, de développement territorial et de rayonnement international. Selon l'expert en tourisme Zoubir Bouhout, le socle de cette transformation remonte à janvier 2001, avec le lancement de la Vision 2010. Cette stratégie fondatrice, dévoilée à Marrakech, visait à hisser le Maroc au rang de destination méditerranéenne de référence, en attirant 10 millions de touristes à l'horizon 2010, en augmentant la capacité d'accueil à 230 000 lits et en professionnalisant la filière à travers la formation de plus de 70 000 cadres et techniciens. Résultat : 9,3 millions de touristes accueillis en 2010, soit 94 % de l'objectif initial. En novembre 2010, la Vision 2020 a pris le relais avec l'ambition de doubler la taille du secteur en structurant l'offre touristique autour de huit grandes régions. Le référentiel reposait sur quatre piliers : valorisation de l'authenticité, diversification de l'offre, montée en gamme des services et intégration des principes de durabilité. Sur la scène internationale, le Maroc s'est affirmé comme un acteur engagé, présidant le comité de pilotage du Partenariat mondial pour le tourisme durable entre 2013 et 2015. La pandémie de Covid-19 a mis à rude épreuve la résilience de l'écosystème touristique. Mais le Maroc a rapidement déployé une réponse ciblée. Sur haute instruction royale, un Fonds spécial doté de 37 milliards de dirhams a été mis en place. Les salariés affiliés à la CNSS ont bénéficié d'une indemnité mensuelle de 2 000 dirhams, contribuant à atténuer l'impact social de la crise et à préserver les ressources humaines du secteur. L'année 2022 a constitué un catalyseur inattendu. La performance exceptionnelle de la sélection nationale lors de la Coupe du Monde de la FIFA au Qatar a déclenché un engouement mondial sans précédent. En quelques semaines, les recherches Google liées au Maroc sont passées de 500 000 par an à plus de 13 millions. Cet effet de halo s'est traduit par un record historique de fréquentation touristique en 2024, avec 17,4 millions de visiteurs. Forte de cette dynamique, la nouvelle feuille de route touristique vise à atteindre 26 millions de visiteurs d'ici 2030. Cette ambition s'appuie sur des projections solides, avec 21 millions d'arrivées prévues dès 2025. La candidature conjointe du Maroc à l'organisation de la Coupe du Monde 2030 avec l'Espagne et le Portugal agit comme un puissant levier d'accélération. Plusieurs milliards d'euros sont engagés dans le secteur, dont 2,5 milliards spécifiquement destinés à l'augmentation de la capacité hôtelière de 25 %. De vastes chantiers sont également lancés pour moderniser les infrastructures aéroportuaires et ferroviaires, en particulier le réseau à grande vitesse. Sur le plan des indicateurs, les résultats sont spectaculaires. Le Royaume est passé de 4,27 millions d'arrivées en 2000 à 17,4 millions en 2024. Les recettes touristiques ont été multipliées par cinq, atteignant 112,5 milliards de dirhams contre 21,7 milliards en 2000. La capacité d'accueil est passée de 70 000 à 400 000 lits en 24 ans, avec une projection de 500 000 lits à l'horizon 2030. L'emploi direct dans le secteur a suivi une évolution similaire, passant de 140 000 à 827 000 postes. Sur la période, les investissements cumulés dépassent les 200 milliards de dirhams. Au-delà de la performance économique, le secteur est devenu un vecteur de transformation sociale, d'attractivité territoriale et d'influence géopolitique. Grâce à l'engagement constant du Roi Mohammed VI et à la synergie des acteurs publics et privés, le Maroc a transformé un potentiel latent en moteur de croissance. Le tourisme ne se contente plus de générer des devises : il façonne l'image du pays, renforce sa résilience et inscrit son développement dans une perspective durable et inclusive. Le Maroc entend désormais passer du statut de destination émergente à celui de référence mondiale.
