L'Algérie et le Polisario ont été surpris par la fuite du projet de résolution du Conseil de sécurité de l'ONU concernant le Sahara. Dans la foulée, le Polisario a soumis une « contre-proposition ». Le nouveau projet de résolution américain appelle les parties au conflit à négocier sur la base de la proposition d'autonomie soumise par le Maroc en 2007, la présentant comme la « seule solution » au différend régional et comme le cadre exclusif pour parvenir à un règlement. Cette tournure a pris de court l'Algérie et le Polisario, qui espéraient maintenir le statu quo. Cependant, cinquante ans après le début du conflit, la communauté internationale affine ses positions. Ces dernières années, la proposition d'autonomie a gagné en soutien sur la scène internationale, y compris auprès de parties historiques dans ce dossier et de membres permanents du Conseil de sécurité. L'Algérie et le Polisario, qui lui est aligné, ont choisi d'ignorer ces évolutions, avant d'être surpris par la fuite du projet de résolution. Voyant que la proposition d'autonomie sous souveraineté marocaine est sur le point d'être actée de manière quasi irréversible, le Polisario de Brahim Ghali a présenté une prétendue « proposition élargie pour une solution politique ». Celle-ci ne semble pourtant être qu'une reformulation de la position qu'il défend depuis le début du conflit. À l'approche d'un vote crucial du Conseil de sécurité prévu pour la fin du mois, qui doit entériner une nouvelle résolution sur l'affaire du Sahara, et après la clarification de la position de la Russie – qui s'avère proche de celle du Maroc – le piège semble se refermer sur la diplomatie algérienne et les partisans du Polisario. Ils se retrouvent dans une impasse largement de leur fait. En ayant tenté de perpétuer le statu quo pendant cinq décennies, les deux protagonistes se heurtent aujourd'hui au réalisme et à la volonté internationale de clore ce dossier. Dans une proposition présentée lundi au Secrétaire général de l'ONU, Antonio Guterres, le chef du Polisario, Brahim Ghali, affirme vouloir « partager les coûts de la paix avec l'autre partie » (le Maroc), se disant prêt à « négocier avec le Royaume du Maroc en vue de l'établissement de relations stratégiques et mutuellement bénéfiques entre les deux pays », se présentant ainsi comme un « pays » bien que non reconnu par l'ONU. En réalité, la proposition du Polisario reste inchangée. Elle continue de prôner un référendum d'autodétermination qui serait « supervisé » par les Nations Unies et l'Union africaine. Alors que la communauté internationale soutient à toutes les occasions l'exclusivité du cadre onusien, le Polisario souhaite intégrer l'UA, celle-ci étant la seule institution qui le reconnaît. Le mouvement séparatiste continue de prôner l'organisation d'un référendum, bien que cette option ait été écartée il y a plusieurs années, suite aux conclusions sur l'impossibilité de sa mise en œuvre. La Russie a récemment soutenu que cette option n'était pas réalisable, renvoyant aux conclusions de l'ancien Envoyé personnel du Secrétaire général de l'ONU, James Baker. La tentative du Polisario est en décalage avec la dynamique portée par la communauté internationale, qui pousse en faveur d'une résolution du conflit via la proposition d'autonomie. La fuite en avant du Polisario semble être une vaine tentative de revenir sur le devant de la scène sans proposer de réelle alternative crédible. Dans sa proposition, le mouvement séparatiste indique vouloir engager des pourparlers directs avec le Maroc, se présentant comme un interlocuteur légitime et unique. Or, l'ONU et la communauté internationale appellent à des discussions incluant « toutes » les parties au conflit, ce qui comprend le Maroc, la Mauritanie, le Polisario, et surtout l'Algérie, qui est l'autre partie essentielle de ce dossier. Cette idée de discussions bilatérales entre le Maroc et le Polisario est également défendue par l'Algérie. Mais l'Envoyé personnel du Secrétaire général de l'ONU, Staffan de Mistura, a récemment rappelé la nécessité pour toutes les parties de revenir au format des « tables rondes » initiées en 2019 sous les auspices de l'ONU. Après des années de blocages imputables à l'Algérie et au Polisario, les deux parties se retrouvent aujourd'hui coincées face au soutien grandissant à la proposition marocaine d'autonomie et à la clarification des positions de puissances majeures comme la Russie. La volonté internationale de régler ce dossier est manifeste. En allant à contre-courant, l'Algérie et le Polisario voient leur stratégie atteindre ses limites.