En plaçant la compétitivité au cœur de la politique budgétaire, le projet de loi de finances (PLF) de l'année 2026 traduit l'ambition du Maroc de consolider son repositionnement stratégique vers une économie d'offre fondée sur la productivité et la durabilité. Cette orientation a pour objectif de renforcer davantage la résilience de l'économie nationale, en abaissant les coûts de production, stimulant l'investissement productif et modernisant le cadre fiscal. En effet, le PLF 2026 s'inscrit dans la continuité des réformes structurelles engagées par le Royaume, dans la perspective d'améliorer la compétitivité pour soutenir une croissance à la fois inclusive et durable, tout en préservant la stabilité macroéconomique. Contacté par la MAP, El Hassane Gatra, docteur et agrégé en sciences économiques, estime que l'accent mis sur la compétitivité révèle une stratégie budgétaire assumée d'économie d'offre. Selon lui, l'Exécutif entend accélérer les chantiers du « Maroc émergent » en orientant la dépense et l'investissement publics vers ce qui abaisse durablement les coûts de production et améliore la productivité. Cette stratégie, explique-t-il, repose sur des leviers fondamentaux, à savoir une énergie plus compétitive et plus verte, une logistique modernisée, un financement accru de l'investissement privé et une amélioration du capital humain, tout en renforçant les services sociaux de base, notamment la santé et l'éducation. « En d'autres termes, la compétitivité n'est pas appréhendée comme un objectif isolé, mais comme le vecteur qui permet d'attirer l'investissement, de soutenir l'export et de financer durablement l'État social », souligne M. Gatra. Interrogé sur les leviers principaux de cette compétitivité, l'économiste insiste sur l'importance de l'investissement privé, adossé à la mise en œuvre effective de la Charte de l'investissement, à l'activation du Fonds Mohammed VI pour l'investissement et au recours accru aux partenariats public-privé. À cela s'ajoute une amélioration continue du climat des affaires, condition essentielle pour libérer le potentiel des entreprises et attirer davantage de capitaux productifs. Sur le plan fiscal et douanier, le PLF 2026 introduit une série de mesures destinées à élargir l'assiette, renforcer la traçabilité et réduire les comportements d'évasion, tout en soutenant l'investissement productif. Parmi les dispositions phares figurent l'extension de la retenue à la source, l'alignement de la taxe sur la valeur ajoutée (TVA) sur les biens d'investissement, les exonérations ciblées pour certains intrants tels que les matières fertilisantes, ainsi que les réaménagements tarifaires visant à protéger la production nationale sans alourdir la charge fiscale. Sur le plan sectoriel, le PLF 2026 met l'accent sur les métiers à haute valeur ajoutée et les écosystèmes industriels porteurs. M. Gatra rappelle à cet égard que les chaînes logistiques et industrielles, appuyées par des investissements majeurs dans les ports et le ferroviaire, les énergies renouvelables et l'hydrogène vert, la transformation numérique, les services mondialisés, ainsi que les écosystèmes agricoles, touristiques et d'économie sociale, figurent parmi les axes structurants du Budget. Ces priorités traduisent l'ambition de positionner le Maroc sur des segments technologiques et durables à forte valeur ajoutée, tout en favorisant une répartition régionale plus équilibrée des opportunités économiques. La montée en gamme du tissu productif vise à consolider l'intégration industrielle et à ancrer le Royaume dans les nouvelles chaînes de valeur mondiales. La compétitivité inclusive et durable comme cap stratégique Pour M. Gatra, la compétitivité, telle que définie par le PLF 2026, soutient une croissance plus inclusive parce qu'elle crée des emplois formels le long des chaînes de valeur stimulées par l'investissement et la baisse des coûts logistiques et énergétiques. Elle favorise également, ajoute-t-il, une réallocation des moyens vers la santé et l'éducation, avec un effort budgétaire accru et la création de milliers de nouveaux postes. Et de relever : « Elle devient durable dès lors qu'elle intègre la contrainte hydrique et le virage vers les énergies renouvelables et l'hydrogène, conditions d'une compétitivité verte compatible avec la résilience climatique et la justice spatiale ». Parallèlement à la dynamique économique, le PLF 2026 reflète une volonté de concilier efficacité et équité. Il ne s'agit plus seulement de produire davantage, mais de produire mieux, avec une empreinte environnementale maîtrisée et une redistribution plus équitable des fruits de la croissance. En renforçant la cohérence entre compétitivité, productivité et durabilité, le projet de loi de finances cherche à poser les bases d'un nouveau pacte économique et social, où la performance devient un moyen au service du citoyen. Ce cadre budgétaire marque une évolution de fond dans la gouvernance publique, à même de faire de l'investissement un levier de transformation structurelle. Ainsi, le PLF 2026 se veut un budget porteur d'une ambition économique cohérente, dans la perspective de consolider les fondements de la trajectoire du « Maroc émergent ».