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Assurance : incursion dans le maquis de l'expertise automobile
Publié dans La Vie éco le 14 - 06 - 2017

Non-respect des diligences, erreurs d'appréciation, manque d'impartialité, de compétences techniques et clientélisme, l'expertise est dénaturée par plusieurs anomalies. Les clients sont obligés, souvent à tort, de contribuer aux frais de réparation de leurs véhicules. La multiplicité des critères techniques et des méthodes d'évaluation ouvre la voie aux abus.
L'expertise automobile est de plus en plus vécue comme un mal nécessaire par une majorité d'assurés et une aubaine de gains par plusieurs intervenants dans le processus. Une enquête menée par La Vie éco auprès des assurés, compagnies d'assurance, concessionnaires, experts, experts assermentés et direction des affaires civiles du ministère de la justice jette la lumière sur la question. Selon les commentaires et explications des uns et des autres, des anomalies et des pratiques à la limite de la légalité entachent le processus et les rapports d'expertise. Non-respect des diligences, erreurs d'appréciation, impartialité, manque de compétences techniques, clientélisme et autres arrangements portent préjudice souvent à l'assuré et défavorisent parfois l'assureur.
Logiquement, si ce dernier choisit un expert donné ou un cabinet d'expertise automobile, c'est pour défendre en premier ressort ses intérêts. En conséquence, «les experts vont pencher vers l'évaluation de dégâts qui arrange le plus possible l'assureur au nom duquel ils interviennent. Ce qu'ils font dans la plupart des dossiers», avance un expert assermenté près la Cour d'appel de Casablanca. «Nos rapports sont scrutés régulièrement. Nous avons des comptes à rendre au management de la compagnie», avoue l'expert. Il explique qu'il est souvent recadré par la direction des sinistres quand l'évaluation des dégâts frôle un palier donné, bien qu'elle soit objective et dûment motivée. Pas de magie alors : les remboursements sont nivelés par le bas en règle générale.
Un garagiste affirme que la remise en l'état du véhicule n'est pas le souci majeur des experts. Il confie que plusieurs de ses clients ont dû mettre la main à la poche pour payer le reliquat nécessaire à la réparation de leurs voitures ! Pour se ranger du côté de l'assureur, plusieurs experts n'hésitent pas à tailler dans le devis des réparations en minorant au maximum tous les postes de charges : tôlerie, mécanique, pièces de rechange, fongibles, taux de main-d'œuvre horaire, etc.
Un assuré témoigne que sur un devis de 17 000 DH, l'expert a proposé un remboursement rapide de moins de 10000 DH. Un autre a reçu une proposition de 2500 DH sur un devis de 8 000 DH, avant d'obtenir 4 500 DH à force de mettre la pression sur la compagnie. La remise de son véhicule en l'état lui a coûté au final 7800 DH.
Les garagistes gonflent les frais
Les experts ne s'en cachent pas ! Ils déclarent ouvertement que la rapidité des centres check auto -très prisés par les assurés- induit une minoration systématique des frais qui peut aller jusqu'à 30% du remboursement par la procédure normale. Ils se défendent néanmoins en arguant que les garagistes gonflent souvent leur frais de réparation.
D'autres experts s'arrangent «dans la mesure du possible» (sans que les montants soient flagrants) avec le client pour partager le surplus obtenu de la majoration des réparations. La marge de manœuvre est plus grande sur les travaux de tôlerie, les pièces de rechange et le consommable que sur les travaux de mécanique. «Souvent, les deux parties se mettent d'accord pour minorer l'ancienneté du véhicule, et partant le taux de vétusté à la charge de l'assuré, dans le cas où ce dernier remplace les pièces endommagés par des pièces neuves», informe le propriétaire d'un garage de réparation. Les réseaux et les affinités développés par les experts au niveau des concessions, des garages, avec les vendeurs de pièces et même avec les ferrailleurs facilitent ces pratiques. Il y en a qui vont jusqu'à ordonner la réforme technique et parfois économique du véhicule (ne plus rouler), alors que les dégâts sont moyens. Un assureur explique que cela peut se faire pour faire gagner les épavistes et ferrailleurs.
Autre pratique répandue, de plus en plus de sociétés disposant d'un parc auto de grande taille (loueurs, concessions…) exigent que la compagnie nomme un seul expert dédié pour tous les sinistres de sa flotte. «C'est une manière de s'entourer d'un prestataire attitré pouvant défendre les intérêts de l'entreprise, moyennant récompense, au détriment de la compagnie», accuse un assureur.
En fait, la multiplicité des critères techniques et des méthodes d'évaluation ouvre la voie aux abus. La majorité des détails sont laissés à l'appréciation de l'expert. Ainsi du calcul de la valeur vénale du véhicule avant le sinistre qui dépend de plusieurs facteurs (âge, kilométrage, motorisation, état apparent de la carrosserie, type du véhicule, marque…) et des méthodes d'évaluation (amortissement kilométrique, abattement en pourcentage par année, argus du marché…). De plus, l'expert a toute la latitude de décider du changement de certaines pièces, comme il peut se limiter à leur remise en état. Il peut aussi s'entendre avec le garagiste sur le temps nécessaire pour la réparation (carrosserie, mécanique, glace, peinture, électricité…). D'où une hausse de la facture.
Les clients sont aussi tentés par la fraude
En face, l'avis d'un expert n'oblige pas (heureusement) l'assuré qui a le droit de contester l'évaluation des dommages en avisant directement l'expert ou en informant la compagnie d'assurance via l'agent ou le courtier. Il lui sera demandé de revoir le dossier en prenant en considération les arguments présentés par l'assuré, ou carrément faire appel à d'autres experts pour confirmer ou infirmer les conclusions du premier. Sur le marché, des assureurs rapportent que 4 propositions de remboursement sur 10 sont contestées. Ce qui dénote déjà du climat qui marque les relations ! Ce ratio pourrait être largement plus élevé si la majorité des assurés ne font pas l'économie des procédures et préfèrent donner fin à la procédure au lieu de s'éterniser dans les dédales des expertises et des contre-expertises.
Mais il n'y a pas que les experts qui sont montrés du doigt, beaucoup d'assurés trichent. A en croire les assureurs et experts sondés, les fraudes qui reviennent le plus sont les fausses déclarations de sinistre, le changement des pièces en bon état par des pièces endommagées pour inclure leur valeur dans le remboursement (voiture maquillée) et la prise en charge de sinistres antérieurs à la date de souscription de l'assurance. «Même si parfois les experts dénoncent ces tentatives de fraudes à la compagnie, ils essayent aussi de trouver un terrain d'entente avec l'assuré pour partager les gains», explique un grand réparateur de vitrage et pare-brise. Un grand responsable d'une compagnie confie qu'il fait appel à des «enquêteurs», sorte de détectives privés, pour mener les investigations requises en vue de vérifier la véracité du sinistre et le niveau des dégâts à rembourser (contrepoids à l'évaluation de l'expert).
Aucune barrière à l'entrée pour le métier d'expert automobile
Ce grand cafouillage est accentué par le fait que l'accès au métier est entièrement libre. Aucun diplôme n'est requis pour l'obtention de titre d'expert. Les compagnies choisissent leurs prestataires selon des critères de compétence, d'expérience et de réputation sur le marché. Apparemment, le Maroc représente à ce titre une exception. Aux Etats-Unis et en France, un certificat d'expert automobile avec baccalauréat est imposé. En Tunisie, un bac+2, en plus de cinq ans d'expérience dans l'automobile, est requis et le dossier étudié par la Fédération tunisienne des sociétés d'assurance. Au Sénégal, la réglementation exige un Bac technique, trois ans d'expérience et l'inscription à l'Ordre national des experts et évaluateurs agréés du Sénégal. Signe de la sensibilité du métier, c'est la Banque centrale du Bahreïn qui délivre l'agrément d'expert dans ce pays du Golfe.
Selon les professionnels, le vide juridique qui prévaut au Maroc facilite l'incursion de dizaines de pseudo-experts. Il y en a qui viennent même de professions qui n'ont aucun lien avec l'automobile. Actuellement, on parle de 500 à 600 experts (personnes physiques et cabinets) dont 260 assermentés selon la direction des affaires civiles du ministère de la justice.
Selon une source à la FMSAR, il est difficile, excepté pour les assermentés, d'avancer un chiffre exact, puisqu'il n'y a pas de délimitation exacte des critères du métier.
Interpellés sur l'organisation de l'activité, des responsables du ministère de la justice estiment que l'assuré est protégé puisqu'en cas de litige, les parties ont recours en dernier ressort à l'expert assermenté. Celui-ci, de par son serment, les sanctions lourdes auxquelles il s'expose et le double contrôle des procureurs généraux et des présidents de tribunaux, est suffisamment entouré de garde-fous qui l'obligent à être impartial. Pas tant que ça! Les données exclusives de la Direction des affaires civiles montrent que 120 praticiens ont été mis en cause lors du Comité chargé de se prononcer sur l'activité des experts judiciaires qui s'est réuni au courant de la deuxième quinzaine d'octobre dernier. 30 sont des experts de l'automobile. Ce n'est pas rien par comparaison aux 260 assermentés ! Quoi qu'il en soit, les juristes de la Direction des affaires civiles recommandent aux compagnies de solliciter systématiquement ces auxiliaires de justice. Toutefois, ils se disent conscients du fait que leur nombre n'est pas suffisant pour répondre à la demande de tous les donneurs d'ordre. «Nous pouvons discuter avec le secteur, notamment la FMSAR, des modalités pour rendre la base de l'assermentation plus large, une façon de satisfaire les besoins si les compagnies se mettent d'accord pour ne mandater que des experts listés auprès des juridictions», confie une source au ministère de la justice. Celui de l'équipement et des transports a également son mot à dire. Un arrêté du ministre de l'équipement relatif aux véhicules gravement accidentés a instauré l'obligation pour les experts de suivre une formation initiale de 30 heures.


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