Kadija Leclere Réalisatrice-comédienne Elle vient présenter son film qu'elle porte depuis des années. «Ahlam el kassirates», traduction de «sac de farine» de Kadija Leclere est le premier long-métrage de cette réalisatrice-actrice qui a longtemps travaillé dans le monde du casting. Chronique d'un parcours touchant. Comédienne sortie du conservatoire royal d'art dramatique de Bruxelles en 1997, elle exerce ce métier pendant quelques années avant de travailler comme directrice de casting sur une centaine de films comme «Indigènes» de Rachid Bouchareb, «Survivre avec les loups» de Véra Belmont, «Mr Nobody» de Jaco Van Dormael, «Les Barons» de Nabyl Ben Yadir, «Illégal» de Olivier Masset-Depasse...Aujourd'hui, après une expérience riche dans l'ombre, Kadija Leclere revient derrière les caméras. Après trois courts-métrages, elle s'attaque à son premier long : «Sac de farine» ou «Ahlam al kassirates». «Passer d'un court-métrage à un long est presque naturel. Il est important de passer par les courts-métrages avant de se lancer dans un long. Je ne suis pas contre la télévision parce que c'est à travers cela que l'on touche les gens. Je ne cherche pas à faire des films d'auteur, je suis populaire. Mon but est de raconter des histoires et non polémiquer», explique la réalisatrice née à Berkane, qui quitte le pays pour l'exil après exactement 2 ans, 4 mois et 10 jours. Une expérience qui se ressent dans ses films qui tournent autour de la condition féminine et de la biculturalité. «Je crois que quoi que l'on raconte, on se raconte forcément. Que ce soit le chant, la peinture...c'est une partie de nous. Ce sont des choses qui nous touchent et si cela nous touche, c'est que cela correspond à quelque chose. On dit souvent que les premiers films font souvent référence à soi et après on commence à s'éloigner petit à petit et à s'envoler vers autre chose. Je suis une femme, j'ai deux cultures, cela se ressent dans mes films, mais ce n'est pas volontaire». Ce film qui a vu le jour il y a 5 ans, vient d'arriver au Maroc et se retrouve dans les salles depuis le mercredi 16 avril grâce au soutien d'Imane Mesbahi, qui croit en ce long-métrage non soutenu depuis longtemps. Le film a été jugé «non représentatif» du Maroc et a même été hué au festival de Tanger il y a quelques années. Un traumatisme pour Kadija Leclere, vite oublié, de par son bel accueil au Magarama la semaine dernière. «Mon expérience au Maroc, c'est le rapt familial. J'avais une peur inexpliquée du Maroc et de venir tourner ici, mais elle s'est dissipée très vite. J'ai adoré tourné au Maroc». Le film raconte l'histoire de Sarah, 8 ans, qui vit dans un foyer d'accueil catholique à Alsemberg en 1975. Un jour, son père biologique, qu'elle n'a jamais vu, se présente pour l'emmener en week-end à Paris, mais c'est au Maroc que Sarah se réveille avec l'appel à la prière. Depuis ce moment, sa vie, son combat, sera celui de choisir sa vie et non de subir celle qu'on a choisie pour elle. Un tournage avec des acteurs de talent comme Hafsia Herzi, Hiam Abbas ou encore Mehdi Dehbi. La réalisatrice a contacté Smain par facebook pour lui proposer le rôle du père sombre, méconnaissable lorsque l'on connaît l'humoriste qu'il est. Elle découvre les acteurs de chez nous comme le talentueux Hassan Foulane ou encore Souad Saber et elle révèle une carrière au grand jour, celle de l'étonnante Rania Mellouli (8 ans), qui incarne Sarah durant sa jeunesse. «De plus en plus, je me dis que les ateliers de théâtre et de jeu sont importants. Les corps parlent différentes langues, il n'y a pas une direction d'acteur mais chaque acteur est différent. C'est comme faire la cuisine, il faut ajouter un peu d'un ingrédient, doser, ajouter sa sauce parfois, y mettre de l'intuition, mais il y a des recettes de base». Un exercice et un statut d'acteur qu'elle a appris à apprivoiser pendant sa carrière dans le casting. «Quand j'étais comédienne, je ne comprenais pas pourquoi on ne me prenait pas pour jouer une suédoise car pour moi un bon comédien peut tout jouer, mais ce n'est pas vrai. Mon expérience dans la direction de casting m'a fait comprendre tout cela. Il faut quelqu'un qui rêve de toi, c'est comme les histoires d'amour. Tu ne peux pas obliger quelqu'un à t'aimer. Je pense que lorsque l'on est comédien, il faut prendre ce que l'on a et le faire très bien au lieu de râler et de toujours vouloir autre chose. Il faut marquer pour pouvoir faire autre chose». Autre chose, c'est déjà ce qu'elle décide de faire en écrivant, en ce moment le scénario de son nouveau film sur la «kafala» au Maroc. En attendant : «Ahlam Al Kassirates» est dans les salles depuis mercredi.