Après la fermeture de Sover Casablanca, dernière usine de production de verres marocains, Bouchaib Harmouzi, hôtelier à Marrakech se retrouve sans verreries. L'idée de ressusciter le verre marocain naît chez cet hôtelier qui devient associé-gérant de Kessy Verre Beldi dans les environs de Marrakech. Depuis, mars 2014, 5.000 verres soufflés sortent de son usine chaque jour. Il a même récupéré une vingtaine d'anciens ouvriers Sover. «En tant que propriétaire de la maison d'hôtes Azalai Desert Lodge en région de Marrakech, j'utilisais les verres marocains pour mes hôtes. Un jour, notre fournisseur Marrakechi nous a informés qu'il ne pouvait plus nous approvisionner en verres. Et pour cause, la dernière usine à fabriquer des verres artisanaux, en l'occurrence Sover Casablanca avait fermé en 2013», lance d'emblée Bouchaib Harmouzi, associé-gérant de Kessy Verre Beldi, entreprise de production de verres artisanaux marocains. Depuis, cet hôtelier a essayé de reprendre l'usine casablancaise. «J'ai pensé à reprendre cette activité pour ne pas laisser disparaître une partie du patrimoine du Maroc, mais l'usine était impossible à reprendre. C'était très compliqué. Le dossier était chez un avocat. Une famille et plusieurs héritiers attendaient leur dû», reprend Harmouzi. Ce dernier ne laissera pas tomber son projet pour autant. Lors d'un déjeuner, il propose à Marc Alberola, un industriel franco-espagnol natif du Maroc, de l'accompagner dans le projet. Une offre qui n'a pas était déclinée. Du verre recyclé qui atterrit à Paris et Amsterdam «Nous avons démarré le projet en mars 2014 à Sidi Bou Othmane entre Benguérir et Marrakech avec un investissement de 4 millions de dirhams entre achat de terrain, de matériel et réalisation de constructions. Nous avons même repris une vingtaine d'anciens employés de Sover Casablanca. Il faut savoir que ce sont les derniers souffleurs du Maroc. On voulait dans ce cadre réaliser une structure où les touristes pouvaient s'arrêter et visiter l'usine, mais l'autorisation fait défaut. Il fallait être installés dans une zone industrielle. Aujourd'hui, nous produisons 5.000 verres/jour, d'autant plus que la matière première est disponible car issue du verre recyclé», déclare l'associé gérant de Kessy Verre. En effet, pour s'approvisionner, Kessy Verre récupère les bouteilles de vins et de bière, notamment Heineken qui donnent la couleur verte à ses articles. Pour ce faire, la PME qui emploie 25 personnes travaille avec les récupérateurs de verre qui sévissent dans la décharge de Marrakech. Il faut savoir que le kilo de verre est acheté 1,20DH. «Tous les jours, nous avons des arrivages. Il existe deux collectes différentes. La première réside en une tournée des bars et restaurants effectuée par un chineur qui collectent les bouteilles de vin et de bière Heineken. L'autre circuit est la collecte des récupérateurs de bouteilles directement dans la décharge de Marrakech», explique Harmouzi, mais la disponibilité de la matière première et l'entraide des chineurs ne garantit pas pour autant le succès des produits Kessy au national. En réalité, la production de cette unité artisanale de Marrakech trouve preneur surtout en Europe et aux Etats-Unis chez les boutiques d'objets de décoration et cadeaux. «Ces gens-là ont un souci écologique et artisanal. C'est ce qui motive leur choix d'autant plus que notre chiffre d'affaires à l'export est beaucoup plus important que le national. Au Maroc, le verre industriel a remplacé l'artisanal car il est trois fois moins cher. De plus, notre verre contient des imperfections du fait du travail artisanal, ce qui réduit son attractivité chez les nationaux, mais nous espérons bientôt nouer des partenariats avec des magasins d'objets de décoration à Casablanca, Rabat, Meknès ou Tanger», espère Harmouzi. Bientôt, l'entreprise lancera de nouvelles gammes de produits confectionnés avec des designers. Saladiers, vases et photophores orneront nos tables. C'est du moins le souhait du management de Kessy Verre !