Le collectif de jeunes Marocains GenZ 212 s'enlise dans la désunion et perd l'attention du public, le retrait des régions orientales confirmé    Longines Global Champions Tour: Le Prince Moulay El Hassan préside le Grand Prix de Rabat    MAGAZINE : Abdelkrim Ghattas, retour d'âme    Espagne: Mystérieuse disparition d'un tableau de Picasso entre Madrid et Grenade    Les importations marocaines de produits pétroliers atteignent 250 000 barils par jour sur les neuf premiers mois de 2025    Le Parisien: « Le Maroc parmi les meilleures nations de la planète foot »    La RTVE présente une nouvelle fois le Sahara comme partie intégrante du Maroc    Les bénéfices des sociétés cotées à Casablanca progresseront de 30,8 % pour atteindre 41,2 milliards de dirhams en 2025    Deux ouvriers tués et un autre porté disparu dans un accident au port de Phosboucraa à Laâyoune    Maroc : Bilan du retour aux manifestations GenZ dans 12 villes ce week-end    46e Championnat d'Afrique de handball des clubs champions : Derb Sultan-Red Star en demi-finale ce dimanche    Finale CDM U20 Chili 25/ Maroc-Argentine : Les Lionceaux à l'assaut de l'Histoire !    Real Madrid : Kylian Mbappé prêt pour le retour contre Getafe après sa blessure à la cheville    Le RSB s'incline face aux Pyramids qui remportent la Supercoupe de la CAF    Donald Trump impose de nouveaux tarifs douaniers sur les poids lourds et les autocars    Les températures attendues ce dimanche 19 octobre 2025    Le temps qu'il fera ce dimanche 19 octobre 2025    Settat: Une caravane médicale pluridisciplinaire pour les populations rurales    Affaire Epstein : Le prince Andrew renonce à ses titres royaux    Marruecos: Corrupción, salud, justicia, carta abierta de un ciudadano marroquí residente en el extranjero al jefe del Gobierno [Tribuna]    Diaspo #411: Khalid Allali, una pasión por el taekwondo desde Beni Mellal hasta Bélgica    USFP : Driss Lachgar rempile pour un 4e mandat    Wahbi tacle Royal Air Maroc : Les supporters marocains méritaient plus que deux avions pour soutenir les Lionceaux en finale du Mondial !    Des chercheurs marocains conçoivent un système de nettoyage photovoltaïque à film roulant d'un coût modeste    El Jadida : la démolition des cabines de Deauville ou la dissolution d'une strate mémorielle    Décès du physicien chinois Chen-Ning Yang à 103 ans    L'Algérie en impasse diplomatique après le rapprochement russo-marocain : des manœuvres désespérées vers l'Ukraine révèlent une perte totale de repères    Visiter la Chine devient plus facile : de nouvelles mesures facilitant l'accueil des visiteurs étrangers    DGSN: Ouverture d'une enquête pour élucider une tentative de suicide d'un fonctionnaire de police    Finale du Mondial U20 – Mohamed Ouahbi : « Il n'y a pas d'équipe invincible, nous ferons le maximum pour remporter le titre »    Alger snobe Moscou : la brouille silencieuse entre Tebboune et le Kremlin    Lachgar dénonce "une élite déconnectée" et plaide pour une refondation politique    Sahara marocain : Washington soumet un projet de résolution entérinant le plan d'autonomie    La délégation de l'USFP-France dénonce les conditions du congrès national et annonce son boycott    Pragmatisme russe    ONU : près d'un milliard de personnes pauvres menacées par les catastrophes climatiques    Marché avicole : l'association des éleveurs alerte sur les dérives des prix des poussins    Le Policy Center for the New South publie une étude sur la «ruse psychopolitique» qui alimente la fracture entre générations, en marge du mouvement de la Gen Z-212    Ouahbi veut dépénaliser la faute médicale    "Yallah' Afrika", une exposition collective à Rabat célébrant la CAN Maroc 2025    Flottille vers Gaza : L'incarcération en Israël de deux Marocains s'invite à l'ONU    La mémoire de Hassan Ouakrim honorée lors d'une projection documentaire à Washington    John Bolton, la voix de l'Algérie à Washington, risque la taule après son inculpation    La Nuit de l'Horreur transforme les cinémas marocains en labyrinthes du frisson    L'humeur : Diane Keaton, au cinéma comme à la vie    Jalil Tijani en tournée : Un nouveau spectacle « habitus » entre rires et vérités    Festival du Cinéma Méditerranéen de Tétouan : la 30e édition lève le voile sur sa sélection officielle    Le compositeur marocain Youssef Guezoum en lice pour les Grammy Awards 2025    







Merci d'avoir signalé!
Cette image sera automatiquement bloquée après qu'elle soit signalée par plusieurs personnes.



Moutons noirs et illusions numériques : pour une IA lucide et enracinée au Maroc
Publié dans L'opinion le 07 - 05 - 2025

Le 5 mai 2025, dans un entretien au Figaro, Luc Julia – co-créateur de Siri et actuel directeur scientifique de Renault – tirait la sonnette d'alarme : « Nous sommes à la veille de la désillusion face aux IA génératives ». Pour cet expert reconnu, les intelligences dites « artificielles » ne sont ni intelligentes, ni créatives, et l'anthropomorphisme excessif qui les entoure risque d'induire en erreur décideurs comme citoyens. Cette mise en garde résonne fortement au Maroc, où l'effervescence technologique autour de l'IA masque parfois les réalités du terrain. Un mois plus tôt, dans L'Opinion du 5 avril 2025, je publiais un article intitulé « Les moutons noirs de l'IA au Maroc – Entre visibilité et légitimité ». J'y décrivais ces acteurs invisibles qui, loin du buzz, œuvrent pour une IA ancrée dans les réalités locales, inclusive et au service de la société. Face aux illusions technologiques globales, il est temps pour le Maroc de recentrer le débat sur les véritables enjeux de l'intelligence artificielle : ceux de la pertinence, de l'éthique et de la souveraineté.
Luc Julia souligne l'un des malentendus les plus tenaces du moment : l'idée que les IA génératives seraient capables de pensée autonome, de créativité ou même de jugement. Or, comme il le rappelle dans son ouvrage « IA génératives, pas créatives », ces outils ne font que « prédire statistiquement les mots les plus probables » en réponse à une requête. Il s'agit d'automatismes puissants, certes, mais sans conscience, sans compréhension, ni intention. L'engouement actuel pour des modèles comme ChatGPT ou Gemini, dopés par les discours commerciaux, cache une réalité bien plus simple : ces outils dépendent entièrement des données humaines qu'ils consomment, reproduisent et réassemblent. Rien de magique, donc, et beaucoup d'illusions entretenues.
Au Maroc, l'effet de mode autour de l'IA prend parfois des accents mimétiques. On importe des solutions standardisées, on cite des cas d'usage étrangers hors sol, et l'on multiplie les effets d'annonce sans toujours consulter les véritables acteurs du terrain. Pendant ce temps, des chercheurs, enseignants, ingénieurs ou développeurs marocains, que j'ai appelés les « moutons noirs de l'IA », travaillent avec rigueur et humilité à des projets adaptés à nos réalités. Ces professionnels ne courent pas les conférences internationales, ne sont pas toujours présents sur LinkedIn, mais ils développent des IA pour l'agriculture, la santé, l'éducation, ou encore le patrimoine, avec peu de moyens mais beaucoup de pertinence. Leur invisibilité médiatique contraste avec leur utilité sociale.
Face à cette double dérive – illusion technologique globale et invisibilisation locale – il est urgent de redéfinir une voie marocaine pour l'intelligence artificielle. Cette voie devrait s'appuyer sur : une reconnaissance institutionnelle des « moutons noirs » (financement, valorisation de leurs travaux, création de labels nationaux) ; un ancrage territorial des projets IA, en partant des besoins concrets des régions et des secteurs productifs ; un encadrement éthique et stratégique, via la formation, la législation, la souveraineté numérique et le développement d'un cloud national ; enfin, une pédagogie de la lucidité, pour éduquer les jeunes (et les moins jeunes) à comprendre ce que l'IA peut, mais surtout ce qu'elle ne peut pas.
L'intelligence artificielle ne doit pas être un miroir aux alouettes. Elle peut être un outil puissant, à condition d'être bien comprise, bien utilisée, et surtout bien située. En s'inspirant des mises en garde de Luc Julia et en valorisant ses propres talents invisibles – les « moutons noirs » – le Maroc peut tracer une voie originale, responsable et souveraine vers l'intelligence artificielle.
* Dr. Az-Eddine Bennani est ingénieur en informatique, titulaire d'un MBA de Chicago, docteur en sciences économiques de la Sorbonne, et expert en management stratégique, gouvernance digitale et intelligence artificielle. Avec plus de 40 ans d'expérience en France, au Maroc et à l'international, il a été ingénieur système, consultant et manager chez Hewlett-Packard en France, en Europe et au MEA, a été professeur-chercheur à La Sorbonne Universités/UTC et à NEOMA Business School, et est actuellement professeur associé à l'Université Al Akhawayn.


Cliquez ici pour lire l'article depuis sa source.