Le ministère marocain de l'Intérieur a lancé une nouvelle offensive pour mettre fin au phénomène des « élus fantômes » au sein des conseils des collectivités territoriales. Des sources bien informées ont indiqué à Hespress que la Direction générale des collectivités territoriales a émis des directives strictes à l'intention des présidents de communes, sous la supervision des walis et gouverneurs, afin de dresser avec précision les listes de présence et d'absence lors des sessions ordinaires et extraordinaires des conseils. Ces instructions interviennent dans un contexte marqué par la multiplication des cas d'élus absents de manière répétée depuis les élections de septembre 2021, sans fournir de justificatifs valables. Les rapports ayant motivé cette décision ont révélé que certains présidents de conseil ont volontairement dissimulé ces absences prolongées, de peur de fragiliser les équilibres politiques locaux et de compromettre les alliances majoritaires nouées depuis le début de leur mandat. Les documents transmis par les départements des affaires générales dans les préfectures, notamment dans les provinces de Nouaceur, Berrechid et Médiouna (région Casablanca-Settat), ont mis en lumière des violations manifestes de la loi. Des élus de premier plan, parfois présidents de conseils communaux, de régions ou de préfectures, sont accusés d'inaction délibérée face aux absences répétées de leurs collègues. Or, la loi organique 113.14 relative aux communes impose la présence obligatoire aux sessions, et prévoit des mesures de révocation pour tout membre absent à trois sessions consécutives ou cinq sessions discontinues sans excuse recevable. Toujours selon les mêmes sources, plusieurs conseils communaux ont eu du mal à atteindre le quorum lors des sessions ordinaires de février et de mai 2025, en raison de désaccords de dernière minute au sein des majorités locales. C'est dans ce contexte que le ministère a exigé des présidents de communes de recenser les absents et de consigner ces données dans des tableaux numériques classés selon les types d'absence, la nature des justificatifs fournis, et leur validité. Cette mesure vise notamment à encadrer l'usage abusif des certificats médicaux, souvent présentés sans contrôle rigoureux, ni demande de contre-visite médicale, en dépit des dispositions légales en vigueur. La question des « élus fantômes » a également été soulevée par des membres de l'opposition durant les dernières sessions de mai. Certains ont dénoncé le fait que des vice-présidents perçoivent depuis cinq ans des indemnités mensuelles, sans jamais mettre les pieds dans les sièges de leurs communes, ni participer aux réunions ou superviser les secteurs dont ils ont la charge. Malgré cela, plusieurs présidents ont ignoré les appels à appliquer les textes juridiques qui imposent au conseil de se réunir pour constater les conditions de révocation, conformément au principe de la reddition des comptes. En parallèle à ces mesures, Hespress a révélé que des magistrats des Cours régionales des comptes ont ouvert des audits ciblés concernant la gestion des indemnités versées aux élus absents. Ces dysfonctionnements ont lourdement pesé sur les budgets des communes. Les juges ont ainsi requis des documents relatifs à l'ordonnancement des paiements mensuels, aux indemnités de déplacement et aux missions effectuées, certaines ayant été qualifiées de fictives sur la base d'éléments vérifiés. Ce durcissement intervient dans un souci de restauration de la transparence et de la crédibilité des institutions locales, au moment où la gouvernance territoriale constitue l'un des piliers majeurs du nouveau modèle de développement du Royaume.