Un programme de rénovation de la médina de Fès, classée au patrimoine mondial par l'Unesco, a été annoncé la semaine dernière par l'Agence pour le développement et la réhabilitation (ADER) de la capitale spirituelle du Maroc, pour un coût évalué à 330 millions de dirhams. Le projet, rendu public à l'occasion du 25e anniversaire de la création de l'ADER, concerne 3.666 habitations menaçant de s'effondrer dont 143 bâtisses seront détruites. Classée au patrimoine mondial par l'Unesco au début en 1981, la médina de Fès, qui compte environ 160.000 habitants, est l'une des plus anciennes et des plus grandes (280 hectares) au monde. Ses monuments, dont ses tanneries et la plus vieille université islamique du monde arabo-musulman (Quaraouiyine), font de la cité idrisside fondée à la fin du VIIIe siècle une des principales destinations touristiques du royaume. Le bilan du programme du traitement du bâti menaçant ruine de la période 2013 au 18 juin 2014 s'élève à 17 projets exécutés en totalité à Fès Médina parmi un total de 128 opérations lancées, dont 22 à Méchouar Fès Jdid et 106 à Fès Médina. Quelque 114 projets ont été achevés également au niveau du programme d'intervention d'urgence, dont 79 à Fès Médina et 35 à Méchouar Fès Jdid. S'agissant du programme de démolition, l'ADER a fait état de 7 projets achevés et 5 en cours de réalisation à Fès Médina Toutefois, l'an dernier, en dépit de précédents programmes de «traitement du bâti menaçant de tomber en ruines», plus de 4.000 de ses habitations risquaient de s'effondrer, selon des chiffres officiels. A cette date, des intempéries printanières avaient ainsi entraîné la mort d'une personne dans l'effondrement de deux immeubles. Plus d'une dizaine de projets -pour les seules démolitions- ont d'ores et déjà été entrepris depuis. Le programme de restauration des monuments historiques a, quant à lui , mobilisé des investissements de l'ordre de 285,5 millions de dirhams et porte sur la réhabilitation de cinq médersas, quatre borjs, trois foundouks, trois tanneries, deux murailles, deux ponts et huit monuments divers. Selon le directeur général de l'ADER, Fouad Serghini, le phénomène des bâtisses menaçant ruine dans l'ancienne médina reflète la complexité du traitement du tissu ancien, celui-ci étant une réalité socio-économique qui nécessite une nouvelle approche. La structuration et la préservation des monuments historiques vise à réhabiliter le tissu urbanistique de la ville dans le cadre d'un processus de développement global afin d'amorcer une réelle dynamique locale et d'ériger le patrimoine de la ville en vecteur de développement durable. Pour rappel, la médina de Fès, fondée en 809, compte une population actuelle d'environ 160 000 habitants occupant 12 000 unités d'habitation sur une superficie d'un peu moind de 300 hectares. Elle se compose de deux zones distinctes: la médina médiévale traditionnelle, Fès el Bali, où logent 77% de la population et une zone plus récente, Fès-Jdid. La vieille ville actuelle a connu un processus de dégradation continu tout au long du 20e siècle. Plusieurs facteurs rendent compte de ce processus. Le facteur originel réside dans l'ouverture de l'économie marocaine au commerce européen et au système capitaliste à partir de la moitié du 19e siècle. D'autre part, le transfert du centre de gravité économique et politique du Maroc de l'intérieur du pays vers des villes littorales comme Casablanca et Rabat, a eu comme conséquence la marginalisation de Fès. Cette marginalisation s'est accentuée lors de la création, par décision politique, de la ville coloniale – appelée la ville «nouvelle» – à l'écart de la vieille ville et destinée à accueillir les colons et les activités mises en place lors du protectorat. Le départ croissant des fassis aisés vers la ville «nouvelle» et vers les villes côtières a eu pour conséquence un repeuplement des maisons vidées qui ont été remplies peu à peu par des vagues de migrants ruraux, pauvres dans leur majorité et qui s'y sont installés directement. La sur-occupation des habitations a provoqué leur dégradation: ces mutations ont été à la base de la dégradation de l'habitat de cette médina et de son environnement. D'autres vieilles villes au Maroc sont confrontées au même problème, des bâtiments menaçant d'y tomber en ruines, dont celles de Meknès, Rabat et Casablanca. En 2012, le gouvernement avait évalué à plus de 114.000 le nombre d'habitations concernées sur l'ensemble du territoire. (Avec agences)