Challenge N°975 : Du 27 juin au 3 juillet 2025    Rabat : arrestation d'une extrémiste affiliée à « Daech »    Le Maroc pourrait accueillir la plus haute roue du monde, alors que Madrid tergiverse    Benguérir : le parquet dément toute interpellation arbitraire et confirme la mise en garde à vue de deux frères pour outrage, ivresse et dégradation de biens publics    Les prévisions du samedi 28 juin    À Rabat, une étudiante radicalisée acquise à l'idéologie de l'Etat islamique et qui préparait un grave projet d'attentat interpellée    Algérie : 7 ans de prison requis contre l'historien Mohamed Belghit    France : Peines de prison pour les membres du groupe d'ultradroite AFO projetant des attentats terroristes anti-musulmans    Des Marocains emprisonnés en Somalie appellent à l'aide le Maroc    Fondation Hassan II : 960 enfants marocains du monde bénéficieront du camp culturel à l'été 2025    Islamophobie et racisme en France : Des étudiants d'une grande école de commerce brisent le silence    Un drone des FAR a touché les éléments du Polisario ayant tiré des roquettes sur Es-Smara    Terrorisme : Les conséquences d'une inscription du Polisario sur la liste FTO aux Etats-Unis    Un dron de las FAR alcanzó a los elementos del Polisario que habían lanzado cohetes sobre Es-Smara.    Alerte incendies de forêt au Maroc : risque extrême du 27 juin au 4 juillet 2025    Interpol : Arrestation d'un citoyen arabe à l'aéroport Mohammed V suite à un mandat des Emirats arabes unis    L'actrice Kaoutar Boudarraja est décédée    Amical : les Lionnes de l'Atlas défient la Tanzanie ce samedi à Rabat    Bounou, Diaz et Hakimi en 8èmes, le WAC bon dernier    Le Forum Canarien Sahraoui remet une lettre officielle au Haut-Commissaire aux droits de l'Homme documentant des violations qualifiées de « graves et systématiques » dans les camps de Tindouf    Religion et solidarité    Nouvel an de l'Hégire 1447: SM le Roi, Amir Al Mouminine, adresse des cartes de vœux aux Chefs d'Etat des pays islamiques    À l'occasion du 80e anniversaire de la Charte des Nations Unies, la Chine appelle à raviver son esprit et à renforcer l'action collective pour un monde meilleur    Le Maroc renforce sa croissance économique à travers 47 projets d'investissement totalisant 5,1 milliards de dollars    Les exportations chinoises d'acide sulfurique doublent et atteignent 176 000 tonnes vers le Maroc    À Rabat, la mécanique chinoise soutient l'essor architectural du centre sportif olympique    Les progrès de la Chine en matière de droits humains au cœur d'un séminaire à Madrid    La Chine et le Maroc renforcent leurs liens culturels à travers la figure d'Ibn Battouta... Une délégation de haut niveau de la province du Fujian en visite dans la région de Tanger    DLA Piper encadre juridiquement le projet industriel de Benteler à Kénitra    Par une frappe de drone de haute précision, le Maroc neutralise entièrement la cellule terroriste du Polisario impliquée dans l'attaque contre Smara    En Allemagne, le Maroc poursuit son évaluation du système Patriot auprès du 5e bataillon américain    Le secrétaire général de l'Asean entérine une convergence diplomatique durable entre l'organisation régionale asiatique et Rabat    Le taux de pénétration d'Internet franchit les 108 % au premier trimestre 2025    Smara... Quatre projectiles tombent en périphérie de la ville    À Damas, les prémices d'un ralliement à la position marocaine sur le Sahara    L'Etat accorde plus de neuf millions de dirhams de subventions à 177 projets culturels en 2025    Energie électrique : hausse de la production de 6,5% à fin avril 2025    Le 1er Moharram 1447 correspondra au vendredi 27 juin 2025, Hespress FR vous souhaite une heureuse année de l'Hégire    Le Wydad de Casablanca termine sa participation à la "Coupe du Monde des Clubs" par trois défaites et aucun point récolté    Reda Benjelloun prend les rênes du Centre cinématographique marocain    Mawazine 2025 : Will Smith livre à l'OLM Souissi un show exaltant à l'américaine    Abderahman Elebbar : le DJ qui transforme les rues d'Essaouira en scène musicale    Espagne : Séville veut attirer le tourisme marocain via l'Histoire et la culture communes    La gigantesque grue ZCC9800W du chinois Zoomlion façonne le chantier du stade de Rabat en vue du Mondial 2030    Coupe du Monde des Clubs 2025 : clap de fin pour l'Afrique    Mercato : Hamza Igamane aurait choisi de rejoindre le LOSC    Associations, festivals… plus de 9 MDH de subventions accordées au titre de 2025    Jazzablanca en ville: une programmation gratuite au cœur de Casablanca    







Merci d'avoir signalé!
Cette image sera automatiquement bloquée après qu'elle soit signalée par plusieurs personnes.



Révolution silencieuse : comment l'IA redéfinit l'avenir du travail au Maroc
Publié dans Maroc Diplomatique le 19 - 05 - 2025

L'intelligence artificielle (IA) s'impose comme un moteur de transformation du monde du travail. À l'échelle internationale, le cabinet McKinsey estime que l'automatisation et l'IA pourraient affecter 800 millions d'emplois d'ici 2030, tout en créant de nouveaux, souvent plus qualifiés. Le Maroc, bien que situé en périphérie des grandes puissances technologiques, n'est pas épargné par cette révolution silencieuse. Dans le Royaume, les premiers signes de l'impact de l'IA sont perceptibles dans plusieurs secteurs. Entre fascination technologique et inquiétudes sociales, l'IA soulève une double dynamique : promesse de modernisation d'un côté, et risque de fracture de l'autre.
Une enquête Ipsos Maroc menée en décembre 2024 révèle que 70 % des Marocains redoutent que l'IA provoque des pertes d'emplois, tandis que 64 % considèrent qu'elle peut aussi créer de nouvelles opportunités. Cette perception ambivalente reflète une société en alerte : consciente des bouleversements en cours, mais peu préparée à y faire face.
Selon une étude de l'Organisation internationale du travail (OIT) en Afrique du Nord, 50 à 60 % des emplois actuels au Maroc comportent des tâches pouvant être automatisées à des degrés divers. Mais contrairement à une idée reçue, les métiers entièrement automatisables sont rares. L'enjeu n'est donc pas la disparition du travail, mais sa transformation profonde.
À titre d'exemple, le secteur des centres d'appels, véritable pilier de l'outsourcing au Maroc, emploie environ 90 000 personnes (données de l'AMRC, 2023). L'introduction de l'IA générative — capable de répondre automatiquement aux demandes simples des clients — modifie en profondeur l'organisation du travail.
Des entreprises comme Intelcia ou Webhelp ont déjà commencé à intégrer des assistants virtuels alimentés par l'IA pour améliorer la productivité. Mais loin de remplacer les agents humains, ces technologies viennent en soutien. Intelcia rappelle que le rôle de l'humain reste prépondérant, insistant sur l'importance de l'intelligence émotionnelle dans les interactions complexes : gestion de crise, rétention de clients, relation personnalisée.
L'avenir du secteur pourrait ainsi évoluer vers des métiers hybrides, combinant savoir-être humain et assistance technologique, avec une montée en compétences indispensable.
L'industrie manufacturière, deuxième secteur le plus touché, connaît des effets contrastés. Une étude de l'Université Mohammed VI Polytechnique, en collaboration avec le ministère de l'Industrie et du Commerce, menée auprès de 41 entreprises en 2023, indique que 23 % d'entre elles ont commencé à automatiser certaines chaînes de production via l'IA et la robotique.
Résultat : les métiers les plus répétitifs (opérateurs sur lignes, manutentionnaires) sont en déclin. Mais en parallèle, les entreprises recrutent des profils en programmation industrielle, maintenance prédictive, cybersécurité ou analyse de données. Le rapport souligne que les employés diplômés du supérieur sont trois fois moins exposés à l'automatisation que les ouvriers peu qualifiés.
La formation, un pilier essentiel
Face à cette reconfiguration du travail, la clé réside dans la formation. Le programme Maroc Digital 2030, lancé en 2022, prévoit la création de 270 000 emplois numériques d'ici 2030, et la formation de 100 000 talents chaque année, incluant des cursus universitaires, des bootcamps, et des dispositifs de reconversion.
Bien qu'ambitieux, ce plan bute sur plusieurs obstacles. Le Conseil Economique, Social et Environnemental (CESE), dans son rapport de 2023 intitulé « Intelligence artificielle et enjeux socioéconomiques », souligne trois freins majeurs :
* Un déficit de compétences locales en IA,
* Une recherche académique trop théorique et déconnectée du tissu productif,
* Une faible interopérabilité entre les universités, les entreprises et les centres technologiques.
Le rapport recommande notamment :
* La mise en place d'un cadre juridique clair pour l'IA (protection des données, éthique algorithmique),
* Le financement ciblé de startups spécialisées en IA dans les secteurs stratégiques (santé, agriculture, énergie),
* Et le développement de clusters IA régionaux pour ancrer l'innovation dans les territoires.
Lire aussi : Lancement de l'application JAWAZ, un service digital simplifiant les déplacements sur autoroute
L'administration marocaine commence à intégrer l'IA, surtout dans le cadre de la digitalisation des services publics. Le projet Idarati de digitalisation des démarches administratives, ou encore le portail Chikaya.ma de traitement automatisé des réclamations, montrent le potentiel de l'IA pour améliorer la transparence et la réactivité de l'Etat.
Toutefois, la majorité des ministères et collectivités locales restent à un stade préliminaire, faute de moyens, de compétences et parfois de volonté politique. Pour combler ce retard, le Pôle Digital de l'Agence de Développement du Digital (ADD) prévoit de créer 12 « IA Labs » régionaux d'ici 2027.
Ethique, dignité et redistribution : le vrai débat
Au-delà des chiffres, l'IA bouleverse la conception même du travail. Elle oblige à repenser la dignité professionnelle, la qualité des emplois, et surtout la redistribution des gains de productivité. Qui bénéficiera de l'automatisation ? Les entreprises ? L'Etat ? Les travailleurs ?
En effet, si les politiques publiques n'encadrent pas activement les transformations, les inégalités risquent de se creuser : entre travailleurs qualifiés et non qualifiés, zones urbaines et rurales, hommes et femmes.
Dans ce sens, l'UNESCO, dans son rapport intitulé Evaluation des besoins en intelligence artificielle en Afrique (2021), met en lumière les principaux défis auxquels le continent est confronté pour tirer pleinement parti des technologies d'IA. Le rapport souligne notamment l'insuffisance de cadres juridiques adaptés, le manque de données accessibles, et la faiblesse des capacités de recherche locales. Une mise à jour de cette étude en 2024 renforce ces constats et appelle à une meilleure gouvernance éthique de l'IA, à la protection des données personnelles, ainsi qu'à l'intégration de l'IA dans les systèmes éducatifs et les politiques publiques. L'UNESCO insiste également sur la nécessité de former les talents africains, de promouvoir la diversité culturelle dans les technologies, et de réduire les biais algorithmiques, afin que le développement de l'IA serve réellement les objectifs de développement durable du continent.
En somme, l'IA n'annonce pas la fin du travail, mais son repositionnement. Le Maroc peut y voir une opportunité de rattrapage technologique, à condition d'investir dans le capital humain, l'innovation locale et l'inclusion sociale. Une IA pensée comme levier, non comme menace. Une révolution silencieuse, mais pas aveugle.


Cliquez ici pour lire l'article depuis sa source.