Le chômage des jeunes, et plus particulièrement celui des diplômés, s'installe comme l'un des défis les plus critiques pour la stabilité au Maroc. Loin d'être un simple indicateur économique, il représente une fracture grandissante, poussant de nombreux acteurs sociaux et économiques à tirer la sonnette d'alarme sur le risque d'une crise majeure. Les chiffres sont sans appel et témoignent d'une situation préoccupante. Avec un taux de chômage national avoisinant les 13 %, les diplômés de l'enseignement supérieur figurent parmi les plus touchés. Selon plusieurs sources médiatiques, près d'un quart d'entre eux restent sans emploi, tandis que le taux grimpe à 35,8 % chez les jeunes âgés de 15 à 24 ans. Encore plus alarmant, 70 % des lauréats universitaires doivent patienter jusqu'à cinq ans avant de décrocher un premier emploi, révélant ainsi un profond décalage entre la formation académique et les exigences réelles du marché du travail. Pour de nombreux observateurs, cette situation n'est pas une fatalité, mais le résultat de politiques publiques qui peinent à produire des effets durables. Des programmes d'emploi dotés de budgets conséquents, comme « Awrach » ou « Forsa », sont critiqués pour leur approche jugée superficielle, sans impact réel sur la création d'emplois qualifiés. La structure de l'économie marocaine est également pointée du doigt, sa dépendance à des secteurs comme l'agriculture ou le tourisme offrant peu de débouchés aux profils les plus formés. Lire aussi : Marché du travail : une reprise en trompe-l'œil ? Cette inadéquation du système éducatif est un sentiment largement partagé. Un rapport de la Banque mondiale a d'ailleurs révélé que 70 % des familles marocaines se disent insatisfaites de la qualité de l'enseignement supérieur, renforçant l'idée d'une réforme profonde et nécessaire. Face à ce diagnostic, plusieurs pistes de solutions structurantes émergent dans le débat public. Certains plaident pour une réorientation massive des investissements de l'Etat vers des secteurs d'avenir comme l'industrie, le numérique ou les énergies renouvelables. D'autres appellent à un renforcement de la fonction publique, jugée sous-dimensionnée par rapport aux standards régionaux, en proposant la création de postes et la suppression des limites d'âge aux concours. Sur le plan social, la demande pour une allocation chômage digne, au moins équivalente au SMIG, gagne du terrain afin de soutenir les diplômés durant leur longue période de recherche. À l'approche des grands débats budgétaires, la pression s'accentue pour qu'un dialogue national inclusif soit lancé, afin de repenser en profondeur la politique de l'emploi et d'éviter que la souffrance individuelle ne se transforme en une crise aux conséquences imprévisibles.