Morocco and Zambia draw in thrilling Women's AFCON opener in Rabat    CAN 2024 féminine : Le Maroc tire son épingle du jeu face à la Zambie    FUS of Rabat wins Throne Cup in basketball defeating AS Salé in final    Mondial des clubs: Le Real file en demi après avoir battu Dortmund    Jazzablanca : Black Eyed Peas, Nubya Garcia et Caravan Palace enflamment la scène    CAN féminine: L'équipe du Maroc et de Zambie se neutralisent (2-2)    Melenchon reafirma su postura sobre el Sáhara Occidental alineándose con la ONU    The Sahara issue featured prominently in discussions between Morocco and Russia    Coupe du trône de basketball : Le FUS Rabat sacré champion aux dépens de l'AS Salé    Jazzablanca day two : Seu Jorge grooves, Kool & The Gang celebrates    Jour deux de Jazzablanca : Seu Jorge fait groover, Kool & The Gang célèbre    Japon: nouveau séisme de magnitude 5,4 frappe au large des îles Tokara    Des cargaisons de gazole russe transitent par le Maroc vers l'Espagne malgré les sanctions européennes, des négociants mise en cause    Le Maroc et l'Equateur partagent les mêmes aspirations de souveraineté, d'intégration et de dialogue structuré    Vie partisane. L'Istiqlal s'insurge contre les démagogues    Entretiens maroco–équatoriens sur les perspectives de coopération commerciale et industrielle    Togo: Des partis d'opposition réclament le report des élections municipales    Le Roi Mohammed VI félicite le président Neves à l'occasion de la fête nationale du Cap-Vert    Tanger : Mise en place d'un nouveau système de stationnement des véhicules    Le dirham marocain s'étend en Afrique de l'Ouest et au Sahel comme alternative monétaire au franc CFA    Le Trésor place 4,4 MMDH d'excédents de trésorerie    Un appel humanitaire lancé pour sauver Aya, une étudiante hospitalisée à Paris    Journée internationale des coopératives : L'INDH, un exemple de l'engagement en faveur des coopératives    Ryanair s'explique après une fausse alerte incendie    La Malaisie impose des droits anti-dumping sur l'acier chinois, coréen et vietnamien    Détails révélateurs : une découverte génétique relie les anciens Egyptiens au Maroc...    Jazzablanca 2025 : Seu Jorge ou quand la fièvre de la Samba moderne s'empare de Casablanca    Jazzablanca 2025 : Seal, Hindi Zahra et El Comité embrasent la scène d'ouverture    CAN (f) 2024 : Le président de la FRMF a rendu visite aux Lionnes avant le match d'aujourdui    Mercato : le Marocain Chemsdine Talbi tout proche de Sunderland    Transition énergétique : Face aux canicules, faut-il repenser la climatisation ? [INTEGRAL]    Asile au Maroc : Malgré la conformité aux normes internationales, la stagnation perdure    Le Maroc et l'Equateur inaugurent une nouvelle ère de coopération stratégique avec l'ouverture de l'ambassade équatorienne à Rabat et la signature d'accords de partenariat global    Rabat et Shanghai : Renforcement des liens maroco-chinois à travers les arts martiaux    TGCC lance une ambitieuse opération d'augmentation de capital    Ferhat Mehenni lance une pétition internationale pour dénoncer la répression de la liberté d'opinion et l'arrestation des militants politiques en Kabylie    Les pays de l'Opep+ augmenteront leur production en août    Le Maroc réélu au Conseil de la FAO    Le temps qu'il fera ce samedi 5 juillet 2025    Les températures attendues ce samedi 5 juillet 2025    Revue de presse de ce samedi 5 juillet 2025    Billetterie sportive : La Sonarges s'engage à garantir un accès transparent, équitable et non discriminatoire    La question du Sahara au menu d'entretiens entre le Maroc et la Russie    Après la visite d'un député LFI à Alger, Mélenchon s'exprime sur le Sahara    Jazzablanca s'ouvre en beauté avec Seal, Hindi Zahra et l'effervescence du village    Alerte canicule. Chergui et fortes rafales de vent avec chasse-sables, samedi et dimanche    «ImagineTaVille » : La Fondation Attijariwafa bank dévoile les lauréats de la 2ème édition    Fondation Mohammed V : 13 nouveaux centres au service de la cohésion sociale    







Merci d'avoir signalé!
Cette image sera automatiquement bloquée après qu'elle soit signalée par plusieurs personnes.



«Réinventer la terre crue», Nadya Rouizem Labied sur les pas d'une architecture pionnière au Maroc [Interview]
Publié dans Yabiladi le 04 - 04 - 2022

Docteure en aménagement à Paris I Sorbonne, chercheuse au laboratoire Architecture histoire technique territoire patrimoine (AHTTEP) et enseignante à l'Ecole nationale supérieure d'architecture (ENSA) de Paris-La Villette, Nadya Rouizem Labied a publié, le 4 avril, son ouvrage «Réinventer la terre crue. Expérimentations au Maroc depuis 1960» (éd. Recherches). Issu de sa thèse de doctorat, ce livre propose une perspective historique et contemporaine à la fois, concernant l'usage de la terre dans le bâtiment moderne.
Pourquoi un livre consacré à la terre crue dans le bâtiment et dans l'architecture au Maroc ?
Je suis architecte depuis 2003. J'ai fait mes études à Paris et j'ai commencé à travailler en agences, dans un premier temps. Au bout de 14 ans, je me suis rendue compte que cela ne me satisfaisait pas et j'ai repris mes études en 2016. Je voulais retrouver cet aspet de recherche qui m'intéressait le plus dans l'architecture et après un postmaster, puis je me suis inscrite ensuite en doctorat. Je connaissais l'architecture vernaculaire, l'actualité du domaine, mais je ne savais pas qu'il existait des opérations dans les années 1960, faites par l'Etat marocain, avec la particularité d'utiliser la terre crue mais au-delà de la technique artisanale. Alain Masson, ingénieur en ponts et chaussées, a réalisé la première conception moderne dans tout son ensemble, en réfléchissant sur la réactualisation de ce matériau.
Au sujet de la terre crue, j'ai voulu aussi continuer ce que j'ai déjà commencé dans le cadre de mon diplôme. J'ai travaillé sur le logement social au Maroc et le bâtiment dans les années 1950 à Casablanca. J'ai repris les recherches et j'ai fait de nouvelles lectures, durant lesquelles je suis tombée sur un article du grand architecte Jean Dethier, intitulé «60 ans d'urbanisme au Maroc». Il retrace l'Histoire de l'architecture au Maroc depuis le début du protectorat, de 1912 à 1972. C'est un article reste encore une référence, car il y a eu peu de travaux sur la période de postindépendance dans l'architecture dans notre pays. C'est pour cela justement que j'ai décidé de travailler sur ces opérations que j'ai découvertes à travers les deux qu'il a présentées, avant que je ne découvre une troisième par moi-même. Il m'a aidée aussi à découvrir les archives inédites d'Alain Masson et de Jean Hensens.
Tout ceci s'inscrit dans une dynamique mondiale observée dès les années 1940, depuis lesquelles il y a eu beaucoup d'opérations dans des pays en développement, en Inde, en Amérique latine… D'ailleurs, la presse utilisée pour réaliser les blocs de terre comprimée au Maroc a été conçue en Colombie dans les années 1950 et importée de France par Alain Masson pour les opérations d'utilisation moderne de la terre crue dans le bâtiment dans notre pays. On sait que ce procédé a beaucoup été utilisée dans les années 1980, mais on en sait moins sur la réactualisation de ce matériau dès les années 1960 au Maroc.
Quel a été l'apport de l'utilisation de la terre crue et de son industrialisation dans le bâtiment au Maroc ?
La particularité de la terre crue est l'inertie et non pas l'isolation. Cela fait que quand il fait chaud à l'extérieur, par exemple, elle garde la fraîcheur plus longtemps à l'intérieur et inversement lorsqu'il fait froid, la chaleur emmagasinée dans les murs reste dans la construction. En d'autres termes, elle permet de maintenir la température intérieure du bâtiment à travers ce mécanisme.
Grâce à ses propriétés d'inertie, ce matériau a été industrialisé. Mais lors des premières opérations au Maroc, ce n'est pas pour cela qu'il a été utilisé. Le contexte est différent. Il est vrai que l'on s'intéresse maintenant à la terre crue pour ses avantages écologiques, mais dans les 1950, l'intérêt pour son utilisation s'est expliqué surtout par des considérations économiques et sociales : c'est un matériau gratuit, il peut être mis en œuvre par une main-d'œuvre moins expérimentée que celle demandée pour le béton, par exemple.
Alain Masson a été le premier ingénieur qui a conçu la première opération, à Marrakech. Il a souhaité employer la main-d'œuvre de la Promotion nationale, constituée de sans-emploi et de personne peu formées. Il y a eu donc derrière toute cette conception et l'utilisation de la terre crue une dimension sociale inclusive. En plus des aspects économique et sociale, l'aspect culturel a beaucoup compté dans le recours à la terre crue, puisque son usage dans la construction traditionnelle fait partie de l'identité marocaine.
On peut vérifier davantage que l'aspect écologique n'est pas celui retenu par les architectes, au vu de l'épaisseur des murs qui ne permet pas suffisamment d'inertie. Pour la première opération, on a été à 13 cm d'épaisseur et à 20 pour la deuxième.
Avez-vous sorti ce livre maintenant, vu la prise de conscience sur les avantages écologiques de ce matériau ?
Tout à fait. Ce qui m'a intéressée bien sûr quand j'ai découvert l'existence de ces opérations, c'est le caractère pionnier montrant qu'il y a soixante ans déjà, des personnes ont réalisé le potentiel de la terre crue alors qu'aujourd'hui, on a encore du mal redémarrer cette filière. C'est pour cela que j'ai décidé de m'intéresser à ces opérations en faisant des recherches sur plusieurs décennies. D'ailleurs, la réactualisation de la terre crue est encore plus dynamique, ces dernières années.
Dans les années 1960, les projets se sont arrêtés, mais d'autres ont été relancés dans les années 1970, puis ont repris dans les années 1980. Récemment, nous remarquons une nouvelle reprise dans les pays d'Europe, notamment en France. Une petite usine vient d'ouvrir il y a six mois, en région parisienne, surtout qu'aujourd'hui, on essaye de faire de la stabilisation avec des matériaux autres que le ciment. L'idée est de réemployer les terres du métro pour produire des blocs de terre comprimée, donc les mêmes que celles utilisés à Marrakech. L'usine a commencé ses activités il y a six mois, mais cela fait cinq ans que le projet a démarré.
C'est pour vous dire qu'une dynamique est en train de se remettre en place, mais que c'est beaucoup plus long, alors que dans les années 1960 au Maroc, cela s'est fait avec une grande rapidité. Lorsqu'Alain Masson s'y est investi, le projet a vu le jour en décembre 1961 et a été lancé en mars 1962, soit quatre mois. Grâce à cela, 2 750 logements ont été construits, ce qui est devenu le plus grand projet urbain en terre crue au Maroc construit à l'aide de techniques modernes.
A côté des logements sociaux, avez-vous répertorié autres constructions au Maroc où la même technique est utilisée ?
Dans le dernier chapitre du livre, je fais justement une liste – qui n'est pas exhaustive –, mais je cite plusieurs bâtiments, comme l'école de jardinage du Bouregreg, le Centre de l'environnement un peu plus loin, mais l'usage de la terre y est moins important, à part quelques murs en pisé. Il y a aussi toute une liste de bâtiments construits dans les années 1980 et 1990, ainsi que quelques opérations qui n'ont pas fonctionné.


Cliquez ici pour lire l'article depuis sa source.