Le Journal du dimanche dénonce avec vigueur, dans son édition du 6 juillet, la politique du silence adoptée par les autorités françaises face à la condamnation de l'écrivain franco-algérien Boualem Sansal, emprisonné en Algérie depuis plusieurs mois. Dans un texte publié, l'hebdomadaire fustige un aveuglement diplomatique, une passivité coupable et une soumission morale, nourries, selon lui, par une mauvaise conscience postcoloniale. «Pendant des mois, la France a cru que son silence servirait à obtenir la grâce de Sansal. En vain», écrit le journal en ouverture. L'auteur de la tribune, Arnaud Benedetti, y dresse un inventaire précis des illusions entretenues par les autorités françaises à mesure que la répression judiciaire se poursuivait. «Il faut aller jusqu'au procès et après il sera libéré ; puis on nous a dit : il faut aller jusqu'à la fin du ramadan et il sera libéré ; et on nous a encore dit : il faut aller jusqu'à l'appel et il sera libéré ; et on nous a redit : il faut se taire encore et il sera gracié à l'occasion de la fête nationale...» Ce refrain répété est qualifié de «seconde prodigieuse faute de se taire», à savoir une stratégie diplomatique de l'effacement, dont le journal constate la stérilité manifeste. Depuis sa condamnation le 29 juin à sept ans de détention, Boualem Sansal reste incarcéré, sans qu'aucune évolution favorable ne se profile. Son procès et sa peine sont perçus comme l'expression d'un arbitraire d'Etat. Une erreur de jugement persistante Selon le Journal du dimanche, cette posture française relève d'un malentendu prolongé et d'un défaut fondamental de jugement. «Depuis sept mois, le cas dramatique de Boualem Sansal est obéré par cette erreur de jugement qui, par sa persévérance, interroge au point d'apparaître comme le témoignage d'une incompréhensible soumission.» La tribune y voit l'aveu d'un affaiblissement moral et politique. Elle accuse l'exécutif français de s'être enfermé dans une stratégie d'inaction, paralysée par la crainte d'aggraver les relations avec Alger. Cette prudence devient, sous la plume du JDD, un aveu de capitulation : «En un mot : l'exécutif français a peur, domestiqué par une 'mauvaise conscience' post-coloniale.» Un régime algérien qualifié de dictature manipulatrice Le tableau dressé du pouvoir algérien est sévère et sans appel. L'hebdomadaire décrit un système autoritaire multiforme, imperméable au dialogue, et fondé sur la dissimulation. «En bref, l'Algérie subit une dictature manipulatrice, corruptrice, dissimulatrice, à laquelle nous voulons répondre avec des méthodes qui préjugent qu'elles sont également propres à nos interlocuteurs.» Le Journal du dimanche insiste sur la vacuité du langage diplomatique employé face à un régime qui ne respecte ni la parole ni la logique du compromis. Il écrit : «Le mot n'est pas à la première ou à la seconde place dans ces régimes, mais toujours utilisé comme le plus petit dénominateur commun entre les clans qui peuvent s'opposer au sein même de l'Etat profond algérien.» Le cas Sansal y devient un révélateur : celui de la rupture entre deux cultures politiques, entre un pouvoir autoritaire qui instrumentalise la justice et une diplomatie française incapable de nommer les choses. La tribune se conclut par un appel pressant à rompre avec la politique actuelle et à assumer, enfin, une parole ferme. Le journal appelle à une inflexion stratégique et morale : «Il faut beaucoup de lucidité ; il faut beaucoup de courage ; et ce qui nous a manqué depuis ces trop nombreux mois. Il est temps de changer de méthode.»